Le groupe de bancassurance Argenta ne fournit plus de conseils sur les fonds externes et joue désormais pleinement la carte de ses propres fonds de portefeuille. Un changement de cap considérable.
Ces derniers mois, le groupe de bancassurance Argenta a préparé en toute discrétion un changement de cap majeur concernant la stratégie d’investissement de la banque. Lorsque les clients en ont été informés, Marc Lauwers (CEO) (photo) et Vincent Varache (Manager du centre de connaissances pour la stratégie d’investissement chez Argenta) ont dévoilé leurs plans lors d’un entretien exclusif avec Investment Officer.
En quoi consiste le nouveau changement de cap ?
Lauwers : « Nous allons miser entièrement sur la gestion propre. C’est la conséquence logique d’un mouvement que nous avons initié dès 2018. Il y a quelques années, nous vendions encore autant de fonds externes que de fonds propres. Par conséquent, nous proposions à nos clients un grand nombre de fonds, mais cette variété et la structure de coûts qu’elle impliquait étaient en contradiction avec notre philosophie de produits simples et à prix raisonnable.
En 2018, nous avons donc choisi de nous concentrer davantage sur la gestion propre afin d’y réaliser un plus grand volume et donc, de mieux maîtriser les coûts. »
Qu’est-ce que cela signifie concrètement ?
Lauwers : « À partir de maintenant, nous ne conseillerons plus de fonds de parties externes. Depuis 2018, le volume des fonds sous gestion propre a considérablement augmenté. Actuellement, ils représentent déjà plus de 90 % des fonds achetés, sur un marché où nous avons vu les volumes augmenter de façon spectaculaire au cours des deux ou trois dernières années. Dans l’intervalle, nous avons acquis suffisamment de track record et de maturité pour jouer pleinement la carte de la gestion propre. »
Qu’est-ce que cela signifie pour Arvestar, la joint-venture avec Degroof Petercam Asset Management pour la gestion des fonds d’épargne-pension ?
Lauwers : « Arvestar a été créée parce que nous voulions avoir davantage de contrôle sur la gestion de ces fonds, notamment parce que nous voulions ici également aller vers plus de durabilité.
Nous avons toujours sous-traité la gestion des fonds d’épargne-pension à Degroof Petercam Asset Management et nous continuons à le faire.
Nous avons une relation à long terme et l’équipe de gestion effectue également un excellent travail. Les performances des fonds d’épargne-pension sont toujours au top, aussi bien à court qu’à long terme.
On ne change pas une équipe qui gagne. Tant les fonds d’épargne-pension que les fonds miroir sont hébergés chez Arvestar et il n’y a aucune raison d’y mettre fin, même si la gestion finale de ces fonds est confiée à Degroof Petercam Asset Management. Cela signifie cependant que nous ne commercialiserons aucun de leurs autres fonds. »
Quelle est votre focalisation avec vos propres fonds ?
Lauwers : « Nous mettons l’accent sur la qualité et la simplicité. J’ai toujours trouvé étrange que de nouveaux fonds ou sous-compartiments soient créés à intervalles réguliers et fassent ensuite l’objet d’un effort commercial. Comme si c’était la friandise du mois. Mais dans le cadre d’une approche portefeuille, on pourrait s’attendre à ce qu’un client ne doive pas décider à chaque fois quel nouveau fonds inclure dans son portefeuille d’investissement.
C’est pourquoi nous croyons beaucoup plus à la possibilité de proposer à l’investisseur moyen un fonds de portefeuille. En effet, le fonds de portefeuille a pour vocation de fournir un portefeuille d’investissement équilibré, tenant bien sûr compte du profil de risque du client.
Et cela correspond également à notre objectif de simplicité : en effet, avec un investissement diversifié dans ce type de fonds, le client moyen devrait toujours pouvoir dormir sur ses deux oreilles. Grâce à l’engagement ferme de regrouper des capitaux dans ces fonds de portefeuille, nous sommes également en mesure de réduire les coûts. Ces dernières années, nous avons donc été à même de réduire de manière significative aussi bien les coûts permanents des fonds de portefeuille que les frais de souscription pour nos clients. »
Comment un fonds de portefeuille est-il composé ?
Varache : « Il s’agit de fonds essentiels, composés aussi bien de fonds d’investissement actifs et d’ETF que d’actions et d’obligations individuelles. Les fonds d’investissement actifs comprennent également nos propres fonds d’accent, qui répondent à des thèmes structurels spécifiques à long terme. Nous avons ainsi défini huit thèmes spécifiques pour nos propres fonds, comme le vieillissement de la population et l’eau.
Nous les complétons par des fonds de tiers, pour des accents très spécifiques dans lesquels nous ne pouvons pas investir directement ou pour lesquels il est plus efficace de faire appel à une expertise externe.
Cela permet aux clients d’avoir accès à un portefeuille mondialement diversifié. À partir de septembre, nous proposerons cinq variantes, allant de très défensive à très dynamique.
Nous offrons ainsi aux clients la garantie que leur portefeuille est chaque jour en ligne avec la vision macro-économique d’Argenta et qu’il est aussi rééquilibré quotidiennement en fonction de leur profil de risque. Et nous remarquons qu’avec le confort et la tranquillité d’esprit que nous pouvons ainsi offrir, nous touchons une corde sensible. Contrairement à nombre de nos concurrents sur le marché, nous n’avons pratiquement pas enregistré de sorties de capitaux au premier semestre 2020, après l’éclatement de la crise du coronavirus. »
Comment envisagez-vous de proposer ces fonds ? Allez-vous, comme de nombreuses autres banques, opter pour une offre numérique ?
Varache : « Nos agents indépendants continuent de jouer un rôle central. Nos clients apprécient le fait que chez nous, l’aspect humain prime. Il y a toujours des gens qui prennent eux-mêmes tout en main et le traitent par voie numérique.
Mais pour des questions telles que les investissements, la grande majorité d’entre eux continuent à demander des conseils personnalisés. Ces dernières années, nous avons beaucoup investi dans les agences et ce sera encore le cas dans les années à venir. Pour nous, c’est exactement ce qui nous permet de nous distinguer des autres banques. »