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Après des années de sous-performance, les investisseurs en valeur jettent l’éponge. Cette capitulation devrait marquer le début d’un retour de la valeur.

C’est ce qu’a déclaré Richard Halle, gestionnaire du M&G (LUX) European Strategic Value Fund, lors d’un entretien avec Fondsnieuws. Pendant des années, les investisseurs en valeur ont dû assister avec résignation à la diminution croissante du cours des actions de croissance. « Pour la valeur, cette année est même la pire depuis 2008, lorsque nous avons lancé ce fonds », déclare Halle. 

La situation actuelle lui rappelle ses premières années en tant que gestionnaire de fonds à la fin des années 1990, juste avant l’éclatement de la bulle Internet sur les marchés boursiers. « Cela ressemble à une phase de capitulation, durant laquelle chacun abandonne ses actions de valeur. J’ai reçu ces dernières semaines plus d’appels téléphoniques de clients potentiels que durant ces dernières années, car certains concurrents suppriment leurs fonds de valeur en raison d’un manque d’intérêt ou d’importantes sorties. Certains fonds de valeur deviennent aussi tout simplement trop petits pour les investisseurs institutionnels. Autant de signaux indiquant que nous nous approchons du point bas. » 

Actifs bon marché

Selon Halle, l’investissement en valeur est axé sur une approche contraire. « C’est précisément maintenant que les actions de valeur sont cotées avec une décote sans précédent par rapport aux actions de croissance que les investisseurs abandonnent. Il y a donc de fortes chances que ce soit la décennie des actions de valeur européennes et autres actifs bon marché. » Outre les valorisations extrêmement faibles et la capitulation, d’autres arguments viennent étayer ce point de vue. 

Par exemple, la baisse constante des taux d’intérêt depuis les années 1980 a surtout joué en faveur des actions stables et sûres, explique Halle. « La dernière décennie, surtout, a été celle des actifs sûrs. Mais la tendance baissière des taux d’intérêt touche à sa fin maintenant que dans la plupart des économies développées, les taux d’intérêt sont proches de zéro ou même négatifs. Il est donc très probable que le vent arrière d’une nouvelle baisse des taux d’intérêt retombe. On s’attend d’une manière générale à ce que les taux d’intérêt restent encore très longtemps à un niveau bas, mais le consensus est souvent erroné. Compte tenu de l’important déplacement de l’assouplissement quantitatif vers la Théorie monétaire moderne, qui s’accompagne d’une augmentation des dépenses publiques, il est probable que l’inflation revienne. » 

En outre, seuls quelques grands fonds boursiers tirent la charrette. Il est plus probable que les superviseurs surveillent ces entreprises de plus près, car elles peuvent être considérées comme des monopoles. Ce qui, selon Halle, va nuire à l’ensemble de l’univers des actions de croissance. La forte valorisation de certaines entreprises de croissance ne peut plus se justifier, estime le gestionnaire de fonds. Par exemple, les investisseurs de la maison de luxe française LVMH paient plus de 30 fois le bénéfice attendu pour 2021. « Mais que se passera-t-il lorsque la bulle éclatera sur le marché chinois du logement ? Les Chinois pourront-ils encore s’offrir les coûteux sacs à main de Louis Vuitton ? Je ne pense pas. » 

D’autre part, l’environnement pour les actions de valeur en difficulté, comme Nokia et Ericsson, devrait au contraire s’améliorer dans les années à venir, estime Halle. En effet, par crainte de l’espionnage de Pékin, les pays occidentaux se retournent contre leurs concurrents chinois Huawei et ZTE

Actions du secteur de la santé 

Cependant, certaines actions de valeur ne sont pas aussi bon marché pour rien, avertit Halle. En effet, un certain nombre de secteurs sont confrontés à un vent contraire prolongé. Il plaide donc en faveur d’une stratégie d’investissement active. « Par exemple, pendant les neuf premières années de ce fonds, nous étions fortement sous-pondérés dans le secteur financier, précisément en raison des défis structurels auxquels sont confrontées les grandes banques européennes. En nous concentrant sur des entreprises qui ont un bilan solide, nous évitons les pièges de la valeur. » 

Avec une pondération de 20,9 %, contre 15,8 % pour le MSCI Europe, le fonds est actuellement fortement surpondéré dans le secteur de la santé. Les entreprises pharmaceutiques Novartis, Roche, UCB et AstraZeneca figurent parmi les positions les plus importantes. Ce ne sont pourtant pas des actions de valeur typiques ? Halle : « Ce genre d’actions apparemment plus chères se retrouvent sur notre radar parce que nous ajustons la valeur comptable des entreprises. Les entreprises pharmaceutiques investissent beaucoup d’argent dans la R&D et moins dans les usines. En capitalisant ces dépenses, la valeur comptable par action est dans nos modèles beaucoup plus élevée, et la valorisation plus attrayante qu’il n’y paraît. » 

Les actions du secteur de la santé sont également moins dépendantes du climat économique, ce qui améliore la stabilité des portefeuilles. Selon Halle, l’ensemble du segment valeur est très volatil et tire avantage d’une croissance économique plus forte au niveau mondial. Il est optimiste quant aux opportunités de rendement. « Notre portefeuille a un ratio cours/valeur comptable d’environ 1, un rendement en dividendes de près de 4 % et à 15 fois le bénéfice de cette année. Cette valorisation relativement faible constitue un bon point de départ pour un rendement total important dans les années à venir. » 

Double réduction

Selon Halle, le fonds possède un certain nombre d’actions ‘double discount’ dans son portefeuille, c’est-à-dire des actions cotées à un faible ratio cours/bénéfices. « Si les choses s’améliorent, non seulement le bénéfice mais aussi le multiple vont grimper en flèche. » L’assureur irlandais FBD, dont les bénéfices ont doublé par rapport à l’année dernière, en est un exemple. « Bien que l’année ait été particulièrement bonne pour FBD, nous prévoyons une revalorisation significative de cette action. »

Il en va de même pour la compagnie maritime belge Euronav, qui affiche un ratio cours/bénéfice de seulement 3 sur la base du bénéfice de 2019. « À notre avis, le potentiel haussier du cours de ce type d’actions est nettement plus important que celui des actions cotées à 30 ou 40 fois le bénéfice, car les investisseurs paient souvent trop cher pour les bénéfices futurs. »
 

 

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