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Si les fonds obligataires, ceux ciblant les marchés émergents et les fonds passifs ont été très prisés au cours du premier semestre de 2023, certaines catégories ont aussi perdu grâce aux yeux des investisseurs. Ces derniers ont ainsi boudé les fonds d’allocation et tourné le dos aux stratégies alternatives liquides. Les fonds axés sur la valeur ont également perdu de leur panache.

Les six premiers mois de 2023 n’ont pas été fastes pour les fonds d’allocation : la catégorie a subi une décollecte de près de 22 milliards d’euros. Si cela peut sembler peu au vu de l’actif total investi dans la catégorie (1600 milliards d’euros), en termes absolus, il s’agit des flux sortants les plus importants du semestre. 

Et cette décollecte qui a frappé les fonds multi-actifs est assez inquiétante, puisque la catégorie enregistre son pire premier semestre depuis 15 ans. Sur les soixante trimestres écoulés depuis mi-2008, quatorze ont été marqués par une décollecte. La catégorie enregistre des flux sortants nets pour le quatrième trimestre de suite, un triste record inégalé depuis 2009.

Les fonds multi-actifs sont donc moins populaires, ce qui s’explique probablement par leur incapacité à faire mieux que leur indice de référence. Si le market timing, la sélection des titres et les choix effectués en matière d’allocation jouent un rôle important dans la réussite des fonds mixtes gérés de manière active, Matias Möttölä et Thomas De Fauw concluaient récemment, dans une étude réalisée par Morningstar sur les fonds multi-actifs, que le potentiel de ces stratégies était étroitement corrélé au niveau des frais. De ce fait, notamment le fonds mixte neutre moyen de la catégorie Morningstar correspondante au niveau international affiche un retrait de 2,54 points de pourcentage, en termes annualisés, par rapport à l’indice Morningstar Euro Moderate Global Target Allocation, entre début 2013 et fin 2022.

Le déclin d’Abrdn

L’intérêt des investisseurs pour les stratégies alternatives liquides s’étiole aussi. La catégorie, qui englobe une vaste gamme de stratégies de placement, affiche une décollecte depuis quatorze mois consécutifs déjà. Le déclin des stratégies alternatives, initié en 2018 et qui a été brièvement interrompu par une année de collecte nette en 2021, semble donc se poursuivre. 

La descente aux enfers de l’Abrdn Global Absolute Return Strategy symbolise les difficultés de la catégorie. Le GARS, ancienne figure de proue des fonds d’investissement alternatifs, et autrefois l’une des plus importantes stratégies de rendement absolu d’Europe, avec un actif sous gestion largement supérieur à 30 milliards d’euros, a dû être clôturé après une série de résultats décevants. Après de nombreuses années fastes, son créateur, Euan Munro, a perdu la main. Les changements apportés au niveau du processus d’investissement et de l’équipe de gestion n’ont pas permis de changer de cap : en juillet, Abrdn a annoncé la clôture de la stratégie.

Le nouveau plongeon de la valeur

Le style d’investissement axé sur la valeur, qui opérait une percée depuis fin 2020, semble toutefois repasser au second plan depuis le début de l’année. Les investisseurs montrent ainsi un intérêt moins marqué pour les grandes capitalisations axées sur la valeur d’Europe et d’Amérique. Les fonds ciblant les actions américaines axées sur la valeur ont connu une décollecte de 6,4 milliards d’euros, soit une contraction organique de 15 %. Pour les fonds européens, la baisse, en termes organiques, atteint près de 11 %, ce qui correspond à 2,5 milliards d’euros de flux sortants. 

En termes absolus, les flux de fonds témoignent aussi du peu de confiance des investisseurs à l’égard des actions britanniques. Les grandes capitalisations du pays ont subi une décollecte de près de 10 milliards d’euros en 2023. La catégorie des actions de dividende se classe aussi au rang des grands perdants, avec 3,5 milliards d’euros de flux sortants. La méfiance vis-à-vis du Royaume-Uni persiste toujours : depuis juin 2020, seuls deux mois ont été marqués par une allocation nette positive pour les fonds ciblant les grandes capitalisations britanniques.

Regardons maintenant quels gestionnaires ont été les plus touchés par les tendances actuelles mises en évidence au niveau des flux de fonds. Le top 5 de cette semaine se base sur la décollecte nette, sur le premier semestre de 2023, à la fois pour les fonds actifs et passifs européens.

Credit Suisse, le cancre

Ce sont les fonds de Credit Suisse qui enregistrent la plus forte décollecte (9 milliards d’euros) cette année. Lors d’un week-end marathon, la banque suisse qui avait perdu la confiance des opérateurs a été sauvée par les autorités de surveillance du pays, qui a contraint son concurrent UBS à la racheter. Il est difficile de juger si la décollecte découle directement de cet événement, mais force est de constater que les flux sortants nets de mars 2023, à 4,6 milliards d’euros, n’avaient jamais été aussi importants en quinze ans. Même en juin 2023, les sorties (2,3 milliards d’euros) comptent parmi les dix plus importantes du mois. Parmi les fonds ayant subi la plus forte décollecte figurent de nombreux fonds obligataires, ciblant aussi bien les emprunts d’État que les obligations d’entreprises des marchés émergents.

La deuxième place revient à Royal London, dont la décollecte a atteint plus de 8 milliards d’euros, soit 10 % de l’actif sous gestion total. Le mois de mars a été catastrophique pour la société ; le fonds Royal London US Equity Tilt a subi la plus forte décollecte (7,5 milliards d’euros). Les flux sortants nets ont aussi représenté plus de 70 % de l’encours de la stratégie d’actions japonaise sur le mois. La stratégie UK Core Equity a aussi fait partie des perdants : les investisseurs ont retiré plus de 1,3 milliard d’euros au deuxième trimestre.

Après avoir vu les fonds affluer pendant la pandémie, Baillie Gifford, un gestionnaire axé sur les titres de croissance, n’a pas réussi à inverser la tendance initiée en janvier 2022, et a connu une décollecte, comme chaque mois depuis lors. Sur les six premiers mois de l’année 2023, les flux sortants ont dépassé les 4 milliards d’euros. Les fonds d’allocation de Baillie Gifford ont subi une décollecte de près de 1,2 milliard d’euros, tandis que ceux ciblant les actions perdaient près de 2,8 milliards d’euros. 

Jeffrey Schumacher est directeur de la recherche sur les gérants chez Morningstar. Morningstar analyse et évalue les fonds d’investissement sur la base d’études quantitatives et qualitatives. Partenaire d’Investment Officer, Morningstar propose chaque semaine un classement des cinq meilleurs fonds ou prestataires d’un secteur ou thème donné.

*Cet article est illustré par une photo générée par l’IA.

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Jeffrey Schumacher est directeur de la recherche chez Morningstar. Morningstar analyse et évalue les fonds communs de placement sur la base de recherches quantitatives et qualitatives. Morningstar est l’un des partenaires d’Investment Officer et classe chaque semaine cinq fonds communs de placement ou fournisseurs.

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