i-pfth64w-l.jpg

Les actifs sous gestion des fonds spéculatifs ont bondi au-delà de la barre historique des 4000 milliards de dollars début 2024. Selon les experts, cette croissance est principalement due au récent rebond boursier, plutôt qu’aux entrées nettes.

Au cours du 4e trimestre 2023, le total des actifs des fonds spéculatifs a augmenté pour le cinquième trimestre de suite, à 4110 mille milliards de dollars, soit une augmentation trimestrielle de plus de 112 milliards de dollars, comme l’indiquent les chiffres de Hedge Fund Research (HFR), qui analyse les évolutions dans l’industrie mondiale des fonds spéculatifs. 

« Les investisseurs se concentrent désormais sur l’accélération des risques géopolitiques et l’exploitation des opportunités de fusions-acquisitions, déclare Kenneth Heinz, Président de HFR. Dans le même temps, les inquiétudes persistent concernant la volatilité de l’inflation, les taux d’intérêt et les considérations macroéconomiques qui ont dominé ces deux dernières années. »
Selon HFR, la croissance des capitaux des fonds spéculatifs a été alimentée par de solides gains de performance au quatrième trimestre, déduction faite d’une sortie nette de 24,5 milliards de dollars au cours du même trimestre, les investisseurs ayant réduit leur exposition aux stratégies macroéconomiques non corrélées. 

Les fonds spéculatifs ont bénéficié de leur exposition au secteur technologique, et en particulier à la tendance de l’IA, tandis qu’une accélération des fusions-acquisitions fin 2023 leur a également été bénéfique. 

Quatrième trimestre solide

Etienne Platte, directeur de la société de gestion d’actifs Antaurus, basée à Amsterdam, a également vu les actifs de son fonds spéculatif augmenter pour atteindre environ 380 millions d’euros, une hausse en partie imputable aux excellentes performances boursières de l’année passée. « Le rendement annuel a été intégralement réalisé durant le dernier trimestre, indique Etienne Platte à Investment Officer. Bien que nous n’ayons pas enregistré de croissance notable sur l’ensemble de l’année, nous avons assisté à un regain d’intérêt significatif pour les actions au quatrième trimestre. Cela nous a finalement permis de clôturer l’année avec une croissance de 5 % et un nouveau record d’actifs sous gestion. »

Marc de Kloe, associé chez Theta Capital Management, une société de gestion d’actifs basée à Amsterdam et spécialisée dans les stratégies alternatives, observe une tendance similaire. Pour lui, l’augmentation des actifs gérés par les fonds spéculatifs à l’échelle mondiale s’explique en grande partie par les solides performances de ces dernières années et, dans une moindre mesure, par les entrées de capitaux. 

Etienne Platte attribue quant à lui les faibles entrées de capitaux de l’année précédente à la décevante année boursière 2022. « Une année décevante pour les marchés d’actions est presque toujours suivie de faibles entrées de capitaux l’année suivante. Les investisseurs pansent leurs plaies et, face à une baisse du marché boursier, ne voient pas de raison de réinvestir, alors que les pertes des fonds spéculatifs sont souvent moins importantes que sur les marchés plus larges. » Le directeur observe également le phénomène inverse : « si nous nous réalisons une performance de 20 % cette année, nous pouvons être certains que les entrées de capitaux seront considérables l’année suivante. C’est un phénomène étrange. »

Toujours plus grands

Selon HFR, les flux de capitaux pour 2023 ont été particulièrement défavorables aux plus petits fonds de l’industrie, les entreprises gérant moins d’un milliard de dollars subissant une sortie nette estimée à 10,2 milliards de dollars pour l’année. Les plus grandes entreprises de l’industrie, gérant plus de 5 milliards de dollars, ont au contraire bénéficié d’une collecte nette estimée à 2,7 milliards de dollars en 2023.

Les grands acteurs sont ainsi devenus encore plus grands, observe également Marc de Kloe, ce qu’il attribue en grande partie aux conditions imposées par les fonds. « De nombreuses sociétés de fonds ayant affiché de bonnes performances ces dernières années ont décidé de restructurer leurs fonds spéculatifs au détriment de la liquidité », ajoute-t-il, évoquant l’introduction de nouvelles périodes de lock-up pouvant aller jusqu’à cinq ans. « Cela fait monter le ticket d’entrée, alors que le capital est immobilisé pendant des années. Pour les gestionnaires de patrimoine traditionnels, le ticket d’entrée est devenu prohibitif, ce qui les empêche également de constituer un portefeuille véritablement diversifié avec ces fonds. »

L’expert de Theta souligne également que les grands fonds spéculatifs multi-stratégies bien connus n’acceptent plus de nouveaux investisseurs depuis des années. « Les fonds multi-stratégies similaires qui ont accueilli de nouveaux clients et affichaient déjà un bon historique de performance ont connu en deux ans une augmentation significative de leurs actifs sous gestion, qui sont parfois passés de 1 à 10 milliards de dollars. L’intérêt pour ce type de stratégies a connu une véritable explosion. » Dans l’intervalle, la croissance de ces stratégies s’est quelque peu normalisée, précise Marc de Kloe. 

Tous les fonds spéculatifs n’ont pas connu la même réussite : « en revanche, nous avons observé que certains grands fonds, notamment quantitatifs et macroéconomiques, qui avaient pourtant maintenu leur liquidité, ont affiché des performances décevantes et ont dû faire face à d’importantes sorties de capitaux », déclare Marc de Kloe.

Poursuite de la croissance possible

« Les investisseurs devraient rester concentrés sur les stratégies qui ont démontré leur capacité à naviguer dans la volatilité croissante, non seulement en 2023 mais aussi au cours des quatre dernières années turbulentes, avec une sensibilité aiguë aux risques géopolitiques, aux opportunités de fusions-acquisitions et à la préservation du capital défensif en 2024 », conclut Kenneth Heinz de HFR

Etienne Platte, d’Antaurus, se montre également positif. Le fonds gère actuellement 380 millions d’euros, mais le directeur estime qu’un doublement des actifs dans les cinq prochaines années est tout à fait envisageable. « Nous enregistrons des rendements élevés avec une volatilité extrêmement faible. Si nous continuons sur cette voie, les actifs sous gestion connaîtront une augmentation significative », anticipe-t-il. 

Pour Marc de Kloe, enfin, « c’est toujours le bon moment pour investir dans des fonds spéculatifs. Tout comme pour le marché des actions, il ne faut pas essayer de timer le moment d’entrée. Les fonds spéculatifs ont connu une période difficile entre 2012 et 2017, lorsqu’ils étaient à la traîne par rapport aux places boursières, mais la situation a changé au cours des trois dernières années. Sur la base des rendements ajustés au risque, les fonds spéculatifs affichent aujourd’hui de meilleures performances. »

Articles connexes :

Author(s)
Categories
Target Audiences
Access
Limited
Article type
Article
FD Article
No