Felix Zulauf, vétéran suisse de l’investissement, était le keynote speaker du Fund Insiders Forum ce mardi. Investment Officer était présent. Zulauf n’a pas délivré un message très encourageant. Il voit de nombreux risques sur les marchés et dans l’économie.
Zulauf a commencé son discours par ce qui en constitue selon lui l’essence même : la croissance démographique. À l’aide d’un graphique illustrant la croissance démographique des pays de l’OCDE complétés par la Chine, le Brésil et la Russie, il a montré que la croissance démographique entre le début des années 1950 et 1990 était d’environ 25 millions par an en chiffres nets. En 2018, nous étions à une croissance zéro, et nous allons finir cette année avec un chiffre négatif. Ce qui pour lui, constitue le cœur du problème. La croissance démographique et celle de la productivité étant toutes les deux nulles, il faut dès lors s’attendre à une très faible croissance, voire à une stagnation.
Classe moyenne
Zulauf a également montré que dans le monde industrialisé, la classe moyenne est l’un des grands retardataires en termes de mondialisation et de croissance mondiale. Ce sont surtout les 1 % les plus riches (actionnaires et CEO) qui ont bénéficié de la croissance effrénée des vingt dernières années. La classe moyenne en Asie en a également grandement bénéficié. Zulauf a souligné que les partis politiques évoluant au centre connaîtront d’énormes difficultés, ce que des populistes comme Donald Trump, Boris Johnson et le jeune Kurz en Autriche ont selon lui parfaitement ressenti. Il estime que ces mouvements deviendront encore plus forts, une tendance qui se poursuivra jusqu’à ce que la classe moyenne ait de nouveau le sentiment d’en faire partie et puisse également bénéficier de la croissance.
Chinois
Zulauf a déclaré : « Les Chinois ont une véritable vision à long terme, tandis que les politiciens occidentaux font tout de travers et courent après les mirages de l’actualité. Les tensions entre l’Occident et la Chine persisteront, affirme-t-il. « Il s’agit d’une bataille pour l’hégémonie mondiale. Au cours des 500 dernières années, nous avons connu 16 scènes de bataille de ce genre, dont douze ont débouché sur une guerre. »
BCE
Zulauf s’est montré particulièrement critique à l’égard de la politique de la BCE : « La BCE a détruit l’euro. Les dettes dans le système augmentent de façon explosive. En 2007, elles s’élevaient à 110 billions. En 2018, elles représentaient déjà 244 billions, avec une augmentation de 40 % du PIB sur la même période. »
Selon lui, l’euro est une ‘mauvaise construction’. Nous évoluons de plus en plus vers une politique socialiste au sein de l’UE, ce qui conduira selon lui à un déclin de la prospérité.
Récession
Zulauf souligne également que nous sommes techniquement déjà en récession : « L’industrie manufacturière mondiale se trouve déjà en récession. Le secteur des services se maintient encore pour l’instant. »
Marchés
Zulauf a conclu sa présentation par un aperçu de ses attentes à l’égard des marchés financiers. Selon lui, les investisseurs doivent accorder une attention particulière au taux de change entre le dollar et le renminbi. Si ce ratio dépasse 8, nous aurons un problème. Nous serons en effet confrontés à une vague déflationniste parce que les producteurs chinois nous inonderont massivement de leurs produits.
Pour les actions, il préfère à long terme la croissance à la valeur. Selon lui, ce dernier style se ‘réveillera’ lorsque des dépenses fiscales massives seront lancées dans le système.
Enfin, il a exposé ses attentes à l’égard des actions mondiales. Au cours des dix prochaines années, il s’attend à un rendement composé d’à peine 2,5 % sur les actions mondiales, dividendes compris qui plus est. Selon lui, les investisseurs qui choisissent les bonnes actions et font du market timing peuvent obtenir un rendement considérablement plus élevé, car nous devons tabler sur des fluctuations du marché de 20 %, à la hausse comme à la baisse. Dans un tel environnement, les stock-pickers peuvent faire nettement mieux.