
Selon le Fonds monétaire international, les événements géopolitiques majeurs sont susceptibles de faire baisser les cours des actions internationales d’environ 1 % par mois. Dans les marchés émergents, ce chiffre peut même atteindre 2,5 %. L’institut basé à Washington constate qu’en quelques années seulement, la géopolitique a commencé à exercer une plus grande influence sur les marchés boursiers.
Les conflits militaires et les guerres commerciales peuvent notamment avoir un impact durable. Les conflits militaires internationaux, tels que l’invasion de l’Ukraine par la Russie en 2022, ont même entraîné une chute des cours boursiers de 5 % par mois en moyenne, écrit l’organisation dans son dernier Rapport sur la stabilité financière dans le monde. Ce rapport est publié deux fois par an, à l’occasion des réunions de printemps et d’automne du FMI. C’est deux fois plus que pour les autres risques géopolitiques.
Depuis le début de la guerre entre la Russie et l’Ukraine en 2022, l’intensité des conflits dans les points chauds du globe s’est accrue. Les facteurs géopolitiques ne sont plus considérés par les marchés financiers comme des perturbations passagères. Selon le rapport du FMI, il en résulte une volatilité accrue des marchés et une pression sur les finances publiques.
Joyce Chang, présidente la recherche internationale chez JP Morgan, a déclaré la semaine dernière, lors d’un séminaire en ligne du FMI sur l’impact des risques géopolitiques sur le secteur, que la façon dont les marchés perçoivent les risques géopolitiques a changé. « Pendant longtemps, on a pensé que la géopolitique n’avait pas d’impact réel sur les tendances du marché. Le Covid-19 et la guerre entre la Russie et l’Ukraine ont montré que certains chocs sont beaucoup plus durables qu’on ne le pensait auparavant. »
Ainsi, selon le FMI, les risques ne sont pas isolés, mais se propagent à travers les réseaux commerciaux et financiers. Même si un pays n’est pas directement impliqué dans une guerre, les conséquences peuvent se faire sentir, indique l’organisation dans son rapport semestriel sur les marchés financiers.
La géopolitique affecte doublement les marchés
Les auteurs identifient deux façons dont les risques géopolitiques conduisent à l’instabilité financière. Tout d’abord, les escalades géopolitiques touchent l’économie par le biais de restrictions commerciales, de sorties de capitaux et de perturbations des chaînes d’approvisionnement. Les dommages causés aux infrastructures lors des conflits militaires laissent également des traces dans l’économie.
Deuxièmement, l’incertitude liée aux tensions géopolitiques affecte le sentiment du marché et entraîne une augmentation de l’aversion pour le risque. Selon le FMI, cette situation accroît le risque de tensions systémiques, telles que les ventes forcées et la détérioration de la liquidité. Les marchés financiers sont tellement interconnectés que les risques se propagent rapidement, même sans implication directe.
Stabilité financière en Europe
Le FMI indique que l’UE souhaite investir 800 milliards d’euros dans la défense pour se prémunir contre une menace russe. Selon Jeroen van Wijngaarden, président de l’association des gestionnaires d’actifs néerlandais Dufas, le fait que la Commission européenne milite en faveur d’un marché des capitaux unifié afin de rendre l’investissement plus attrayant pour les particuliers pourrait s’inscrire dans ce contexte.
« Les Européens ont beaucoup d’argent sur leurs comptes d’épargne. À eux seuls, les Néerlandais disposent d’environ 400 milliards d’euros. Une partie de cet argent pourrait servir à financer le budget de la défense. »
Les pays émergents sont vulnérables
Le FMI appelle les dirigeants des institutions financières à prendre au sérieux les risques géopolitiques en consacrant des ressources suffisantes à l’identification et à la gestion de ces risques. Selon l’organisation, le maintien de solides réserves de capital et de liquidités est essentiel à cet égard.
« Cela est particulièrement important dans les marchés émergents, où les événements géopolitiques entraînent souvent des mouvements de marché plus importants. Ces pays ont généralement moins de réserves et une marge de manœuvre budgétaire limitée, alors que c’est précisément là que se produisent les incidents géopolitiques les plus graves. »
Une nouvelle ère
L’économie mondiale entre dans une nouvelle ère placée sous le signe des droits de douane et d’une incertitude croissante, a averti mardi le FMI dans ses dernières Perspectives de l’économie mondiale. La guerre commerciale entre la Chine et les États-Unis continuera d’avoir des répercussions économiques tangibles après 2025.
Pour 2025, le FMI revoit ses prévisions de croissance mondiale de 3,3 % à 2,8 %, mais ne table pas encore sur une récession planétaire. La Chine et les États-Unis perdent tous deux environ un point de croissance. Les prévisions ne tiennent compte que de la première série de droits de douane, et non des récentes hausses à 145 % sur les produits chinois et de la riposte chinoise à 125 % sur les exportations américaines. Ces niveaux sont nettement supérieurs à 60 %, un seuil qui, selon les économistes, perturbe gravement le commerce bilatéral.
La multiplication des incertitudes freine les investissements et exerce une pression sur les marchés boursiers. Selon le FMI, une nouvelle correction pourrait encore avoir lieu aux États-Unis.