Dans un climat économique incertain qui sera marqué par une intensification de la guerre commerciale, les spécialistes d’ING Banque Belgique prônent davantage de prudence dans les portefeuilles pour les prochains mois. Les actions sont sous-pondérées, tandis que la dette gouvernementale américaine et des valeurs refuges doivent être privilégiées.
« La durée actuelle du cycle d’expansion économique augmente aujourd’hui le risque d’une récession », souligne Peter Vanden Houte (chef économiste d’ING Belgique). Il estime dès lors que la croissance américaine est aujourd’hui plus vulnérable que par le passé, notamment en raison des mesures tarifaires liées à la guerre commerciale que mène Donald Trump avec la Chine. « Un modèle utilisé par la Réserve Fédérale pointe désormais une probabilité de 30% pour un ralentissement économique prononcé durant le second semestre 2020, et ce chiffre a eu tendance à augmenter très rapidement depuis le début de l’année ».
Politiques accommodantes
En outre, Peter Vanden Houte souligne que la victoire remportée récemment face au Mexique va probablement inciter Donald Truimp à poursuivre ses efforts dans cette voie. « Nous pensons désormais que des mesures sur le secteur automobile européen devraient suivre d’ici l’automne prochain ». Il estime que seul le spectre d’un ralentissement économique et la perte des élections présidentielles pourront le convaincre de négocier un accord au début de l’année prochaine. « Les accords qui seront signés risquent toutefois d’être assez peu conséquents, et destinés à lui donner une victoire de facade. Toutefois, cela risque de prendre du temps pour retrouver le momentum économique qui aura été perdu par la cause de ces discordes ».
Dans ce contexte, les politiques des banques centrales vont redevenir assez accommodantes, et il table désormais sur deux baisses du taux directeur américain d’ici la fin 2019, tandis que la Banque Centrale Européenne pourrait descendre encore son taux de dépôt vers -0,5% durant les prochains mois. « La BCE pourrait également relancer son programme de rachats en élargissant le cadre à de nouvelles classes d’actifs, comme par exemple les obligations bancaires ».
Politiques accommodantes
Pour l’économie américaine, il table désormais sur une croissance qui passera sous les 2% dans le courant de l’année 2020, tandis que la croissance de l’activité économique européenne devrait également s’affaiblir mais se maintenir autour de 1%. « Il reste toutefois encore plusieurs facteurs politiques qui pourraient venir peser sur l’activité européenne, notamment une crise ouverte avec l’Italie ou l’impact d’un Brexit dur qui serait signifficatif pour certains pays, et plus particulièrement pour la Belgique ». Les différentes études pointent en moyenne vers un impact négatif de 1% sur la croissance belge (étalé sur plusieurs années).
Au niveau de la Chine, le gouvernement dispose encore de suffisamment de munitions pour soutenir la croissance au-dessus de 6%, et Peter Vanden Houte s’attend à ce que de nouvelles mesures soient décidées durant les prochains mois si l’économie chinoise venait à marquer le pas. « Enfin, la situation des pays émergents restera contrastée, car la croissance de ce groupe de pays reste encore largement dépendante de la croissance globale ».
Politiques accommodantes
Luc Charlier (stratégiste chez ING Belgique) constate pour sa part que l’heure n’est clairement pas à une prise de risque sur les marchés financiers, après les belles performances dégagées sur les bourses depuis le début 2019. « Il y a aujourd’hui une dichotomie claire entre les positionnements respectifs des marchés d’actions et d’obligations. Avec une croissance attendue des résultats au niveau global qui tourne autour de 2,5% pour 2019, il nous semble toutefois le risque est grand de voir les marchés boursiers s’aligner sur le discours plus récessionistes en provnance des marchés obligataires La marge d’erreur pour les marchés boursiers est aujourd’hui très faible ».
Il estime qu’il est aujourd’hui urgent d’adopter un positionnement plus défensif dans les portefeuilles, et diminuant l’exposition sur les secteurs cycliques pour préférer les actions de pays développés en visant des titres de qualité (endettement raisonnable, avec rendement attractif) comme le secteur des biens de consommation durables. « Ce sont les titres qui affichent les meilleures performances depuis le début 2019 ».
Valeurs refuge
« Sur le marché obligataire, nous préférons la dette gouvernementale américaine qui dispose encore d’un potentiel de baisse des taux, ainsi que la dette émergente en devise forte. Nous sommes par contre très prudent sur la dette d’entreprise qui n’offre pas assez de différentiel de taux pour justifier un positionnement trop agressif. La recherche de rendement ne doit pas aveugler les investisseurs, car les taux de défaut seront appelés à grimper si le ralentissement économique venait à se confirmer ». Enfin, Luc Charlier apprécie également le potentiel offert par des valeurs refuge comme le yen ou l’once d’or. « Les banques centrales et les hedge funds sont redevenus assez actifs sur ce segment du marché depuis le début 2019, qui reste un actif de protection face aux incertitudes des marchés financiers ».