Soyez maintenant très prudents sur les marchés. Tel est le message que nous livre sans ambages le légendaire investisseur Jeremy Grantham de GMO. Il avait réussi à prévoir les trois dernières bulles sur les marchés. Aujourd’hui, il trouve les marchés américains particulièrement chers. Ils ont augmenté de plus de 40 % par rapport à leur point bas de mars, et le NASDAQ a même établi hier un record absolu : plus de 10 000 points ! Du jamais vu.
Les idées de Grantham proviennent de son dernier bulletin trimestriel, dans lequel il écrit que « pendant le creux de mars, la plupart des marchés risqués semblaient valorisés de manière équitable ou bon marché, même sur la base d’une baisse modérée de la juste valeur due à une grave récession. Dans nos fonds multi-actifs, nous avons ramené ces dernières semaines nos positions en actions et en obligations d’entreprises à leurs plus bas niveaux. »
Grantham : « Nous nous attendions à ce que les marchés restent volatils et ne montent pas beaucoup en raison de la situation économique très incertaine ainsi que du fort potentiel baissier. Toutefois, les marchés ont connu une hausse spectaculaire ces six dernières semaines.
Nous pensons néanmoins que l’économie mondiale a encore un important potentiel baissier. Nous avons donc réduit la pondération des actions dans nos portefeuilles multi-actifs et investi dans des long/short trades. Nous continuons à investir dans des actions relativement bon marché, mais avons réduit la sensibilité des portefeuilles au marché. »
Grantham poursuit : « Les marchés tablent actuellement sur un best case scenario. C’est certainement possible, surtout si un vaccin efficace et largement distribué devait être rapidement disponible. Mais si cela ne se produit pas, nous pourrions connaître de lourdes pertes sur les marchés financiers. Nous ferions donc mieux d’investir dans certaines opportunités d’actions exceptionnelles qu’offre le marché, et de moins miser sur l’évolution des marchés au cours des prochains mois. »
Très chère Amérique
Grantham trouve l’Amérique, en particulier, très fortement valorisée, ce qu’il exprime comme suit : « Le ratio cours/bénéfice actuel du marché américain se situe dans les 10 % supérieurs des valorisations historiques. L’économie américaine, en revanche, se trouve dans les pires 10 % de son histoire, et peut-être même dans le pire 1 %. De plus, tout est incertain.
Ce qui est unique. Le ratio cours/bénéfice des marchés reflète généralement les conditions actuelles. Dans le passé, les marchés ont toujours apprécié les marges bénéficiaires élevées, une faible inflation, la stabilité et, par conséquent, peu d’incertitude. Cela semble être l’un des décalages les plus impressionnants de l’histoire. Cependant, il s’agit d’un nouveau type de crise, tout à fait différent. Il n’y a pas de certitudes, mais il existe probablement des options meilleures et plus sûres. Comme la prudence et la patience, par exemple. »
Dans quoi faut-il alors investir ?
Grantham voit du potentiel sur les marchés émergents, selon lui « la seule classe d’actifs non axée sur la valeur susceptible d’offrir un rendement équitable même dans un mauvais scénario économique. » En effet, ces actions sont beaucoup plus faiblement valorisées. Grantham trouve les pays d’Asie du Sud-Est particulièrement attrayants, car ils ont beaucoup mieux fait face à la crise du coronavirus. Il est certain que les actions des marchés émergents dont la valeur a tendance à augmenter offrent un potentiel attrayant et beaucoup moins de risques que les actions américaines.