Juvyns (JP Morgan AM) table sur une reprise progressive à partie du troisième trimestre, avec un impact économique qui ne se reflète pas dans les valorisations boursières. Le positionnement reste donc prudent, avec une exposition sur la technologie ou les soins de santé comme option stratégique pour les portefeuilles.
Vincent Juvyns (stratégiste chez JP Morgan Asset Management) constate que les nouvelles se sont progressivement améliorées ces dernières semaines, avec des données économiques favorables en provenance de Chine tandis que les chiffres d’infection sont en train de s’améliorer dans la plupart des pays européens. « Dans le même temps, l’effondrement des chiffres de l’emploi américain était attendu par le marché, et a finalement provoqué peu de remous ».
Choc économique
Il ne s’attend pas à une reprise rapide des économies développées. « Nous ne sommes plus dans une situation où elles tournent à 65% de leur potentiel, mais nous attendons un redressement graduel durant le troisième trimestre ». L’intervention des gouvernements et des banques centrales a été à la hauteur des attentes, avec des mesures qui ont été prises pour soutenir les pans de l’économie qui ont été les plus affectés.
« Les mesures monétaires prises en Europe ont visé à soutenir notamment la capacité d’octroi de prêts par le secteur bancaire, qui demeure la principale source de financement des entreprises européennes ». Dans l’ensemble, les conditions sont réunies pour absorber le choc économique même si les données économiques vont être négatives dans l’ensemble des régions durant les prochains mois. « Grâce à son filet de sécurité sociale, le retour à la normale pourrait d’ailleurs être beaucoup plus rapide en Europe.
A l’inverse, les entreprises américaines vont devoir réengager des travailleurs qui voudront peut-être changer de travail, ou partir chez un autre employeur. « Il faudra du temps pour que le taux de chômage retombe sous les 10% aux Etats-Unis, et nous ne pensons pas qu’une telle baisse interviendra avant 2021. Le cas chinois nous donne toutefois quelques raisons d’espérer puisque nous n’avons pas eu une seule mauvaise nouvelle en provenance de ce pays ces derniers jours ».
Inflation et taux
Dans ce contexte où la dette va augmenter très fortement dans les grandes économies occidentales, le niveau des taux va rester fortement sous pression. « Les banques centrales ne vont pas autoriser une hausse des taux à court ou moyen terme, et les marchés ne s’attendent d’ailleurs pas à une remontée de l’inflation à court, moyen ou long terme. Il est de toute façon prématuré de s’en inquiéter ».
Il rappelle que les marchés ne reflètent qu’imparfaitement la situation économique, avec des secteurs très importants qui ne sont que peu représentés dans la composition des grands indices. « Ceci explique la dichotomie qui peut exister entre l’évolution des cours et les chiffres de croissance, ou l’explication de la plus grande vulnérabilité des indices européens par rapport aux mauvais chiffres économiques. En tant que gestionnaire actif, nous avons la possibilité de protéger nos investisseurs en se positionnant sur les segments qui seront les plus protégés dans les circonstances actuelles ».
Stratégie
Alors que les marchés fonctionnent aujourd’hui sur des bases plus réalistes, Vincent Juvyns estime que les actions doivent rester légèrement sous-pondérées dans les portefeuilles, avec une exposition qui doit néanmoins privilégier les valeurs américaines et asiatiques. « Au niveau sectoriel, nous apprécions les perspectives défensives des soins de santé et des grandes valeurs technologiques. Les derniers chiffres trimestriels de ces valeurs n’ont clairement pas déçu le marché ».
Une stratégie d’investissement équilibrée va donc nécessiter le maintien d’une exposition sur les marchés obligataires. « Il ne faut pas laisser tomber les obligations gouvernementales, qui constitue une poche de protection contre la volatilité. Dans le même temps, les obligations d’entreprise sont les classes d’actifs qui devraient le plus profiter de l’intervention des banques centrales sur le long terme. Trouver du rendement dans les circonstances actuelles restera difficile, et le crédit de qualité constitue une voie relativement sûre pour trouver un peu de rendement vu le soutien apporté par les autorités publiques et monétaires ».