La lente augmentation du chômage dans la zone euro se poursuit. En août, pour le cinquième mois consécutif, le nombre de chômeurs a augmenté pour atteindre 8,1 % de la population active. La bonne nouvelle est que le rythme des licenciements se ralentit par rapport à juillet, mais les chiffres moyens pour la zone euro ne disent pas tout. L’impact de Covid-19 sur le marché du travail varie fortement d’un pays à l’autre (voir graphique), selon les économistes en chef de la Banque Belfius et d’ING Belgique respectivement, dans des rapports de recherche récemment publiés.
C’est l’Allemagne qui semble le mieux digérer le choc économique. De nouveaux emplois à temps plein ont déjà été créés en juillet et août et le nombre de chômeurs temporaires a diminué de plus de 2 millions depuis mai. En France et dans notre pays également, les dommages causés au marché du travail ont été jusqu’à présent décevants. Les systèmes de chômage temporaire limitent la perte d’emplois et de revenus et contribuent ainsi à la reprise de la demande.
En Espagne, la récession a frappé beaucoup plus durement. Le marché du travail est particulièrement vulnérable en raison du nombre élevé de salariés dans le secteur de l’hôtellerie et du tourisme et des nombreux contrats de travail temporaires. Le gouvernement espagnol craint que d’autres entreprises ne commencent à licencier de façon permanente à l’automne. Par conséquent, l’aide temporaire au chômage en Espagne sera prolongée jusqu’à la fin janvier 2021.
Aide d’urgence
Véronique Goossens, économiste en chef de la Belfius Bank : «Dans le reste de la zone euro également, les systèmes d’urgence seront maintenus pour limiter les pertes d’emplois causées par Covid-19. Le risque de chocs économiques dus à un nouveau verrouillage reste élevé et, en particulier dans le secteur des services, de nombreuses entreprises sont encore soumises à de fortes pressions. Les subventions salariales coûtent très cher aux gouvernements nationaux, mais le fonds européen SURE contribue à payer la facture. Cette semaine, l’UE a donné le feu vert à la distribution de 87,4 milliards d’euros aux États membres sous forme de prêts avantageux. Plus de la moitié de ce montant ira à l’Italie (27,4 milliards) et à l’Espagne (21,3 milliards), tandis que la Belgique arrive en quatrième position avec 7,8 milliards d’euros. Sur le fonds SURE initial, 12,6 milliards d’euros restent en réserve. Cela pourrait encore être utile.
Le Covid-19 pèse non seulement sur l’emploi mais aussi sur les prix. En septembre, les prix à la consommation dans la zone euro ont baissé de 0,3 % par rapport au mois précédent. C’est le deuxième mois consécutif que l’inflation reste en dessous de zéro. En début de semaine, la présidente de la BCE, Mme Lagarde, a déclaré qu’elle s’attendait à une période de déflation plus longue (inflation négative). C’est pourquoi, à l’instar de la banque centrale américaine, la BCE envisage d’ajuster sa stratégie pour permettre le dépassement de l’objectif d’inflation. Toutefois, une décision à ce sujet ne sera pas prise avant la fin de l’année.
Pas de flambée
Peter Van den Houte, économiste en chef d’ING Belgique, l’explique comme suit : Notre scénario de base suppose qu’il n’y aura pas de forte poussée du virus à l’automne et pas de verrouillage local. Les gouvernements mettent davantage l’accent sur la limitation des réunions privées, dont l’impact économique direct est limité. Grâce au télétravail et à la réduction substantielle du nombre de mouvements, le virus a besoin de plus de temps pour se propager, ce qui le rend plus facile à contrôler. Le développement rapide des connaissances sur le virus et l’amélioration des traitements dans les hôpitaux y contribueront également. Les entreprises sont également de plus en plus inventives lorsqu’il s’agit de respecter les restrictions. Cela dit, il est possible que d’autres faillites suivent dans des secteurs fortement touchés, car les entreprises indiquent que leurs activités ne redeviendront pas rentables dans un avenir prévisible. Les vaccins seront disponibles au cours du premier semestre 2021. La distance sociale sera progressivement réduite au cours du second semestre».
Un scénario alternatif pas si irréaliste est celui d’un blocage hivernal (récupération sous forme W). Dans ce scénario, le virus se propage plus rapidement pendant les mois d’hiver car la population passe plus de temps à l’intérieur. Les restrictions sont progressivement renforcées, ce qui pourrait entraîner la fermeture de secteurs tels que la restauration et le tourisme. Contrairement à nos hypothèses précédentes, il n’y a pas de verrouillage national complet, mais plutôt de fréquentes interruptions d’activité dues à des quarantaines locales et régionales, ce qui est très préjudiciable à la confiance des entreprises et des consommateurs. Les entreprises qui ont survécu à la fermeture peuvent toujours passer par-dessus bord, bien que cela dépende de la manière dont le soutien public est utilisé lorsque des quarantaines locales sont déclarées. Certains vaccins seront disponibles au cours du premier semestre 2021».
Source : Belfius