L’époque où la croissance du marché actions asiatique provenait de la big tech est révolue. Les meilleures opportunités de croissance résident désormais dans les nouvelles entreprises technologiques de plus petite taille, ainsi que dans le secteur des soins de santé en plein essor. C’est ce que déclare Albert Kwok, gestionnaire du PGIM Jennison Emerging Markets Equity Fund, lors d’un entretien avec Fondsnieuws.
« Je ne suis plus vraiment fan des grandes entreprises technologiques, car elles ne proposent pas de technologies disruptives », explique Kwok. L’État chinois se mêle également de plus en plus des grandes entreprises technologiques. La première victime a été Alibaba, qui a vu l’introduction en bourse de sa branche fintech Ant Financial contrecarrée l’année dernière. Les autorités chinoises ont également lancé une enquête afin de déterminer si la société abuse de sa position sur le marché. L’équipe de Jennison Emerging Market a décidé de vendre sa position dans Alibaba à la fin de l’année dernière.
Maintenant, c’est Tencent, dans lequel le fonds avait encore une position de 3,5 % à la fin du mois de février, qui semble être la prochaine cible des autorités https://www.bloomberg.com/news/articles/2021-03-15/tencent-loses-62-bil…. Le cours de l’action a déjà chuté d’environ 15 % au cours du mois dernier.
On ne sait pas exactement ce que recherche le gouvernement chinois, ajoute Kwok. Nous nous attendons à une surveillance réglementaire accrue, mais la forme qu’elle prendra n’est pas encore claire à ce stade. Bien sûr, ce mécontentement à l’égard de la big tech n’est pas un phénomène purement chinois. Les critiques à l’encontre des grandes entreprises technologiques se multiplient, non seulement de la part des autorités, mais aussi d’utilisateurs du monde entier. De nos jours, de nombreuses personnes passent 6 heures par jour sur leur smartphone. Partout, on observe que les entreprises technologiques sont confrontées à de nouvelles réglementations. Nous pensons donc que cette tendance va se poursuivre. »
Prochaine génération
Mais selon Kwok, la régulation de la big tech est positive pour les petites entreprises technologiques émergentes. Kwok : « Les géants de la technologie ne sont pas propices à l’innovation, par exemple parce qu’ils peuvent facilement surpasser leurs rivaux de plus petite taille. Mais la nouvelle réglementation peut justement faire de la place pour les entreprises technologiques de nouvelle génération. »
Le PGIM Jennison Emerging Markets Equity Fund investit déjà activement dans ce type d’entreprises. Ces dernières années, l’accent du portefeuille s’est de plus en plus déplacé vers les petites capitalisations à croissance plus rapide. La capitalisation boursière médiane des entreprises du fonds n’est encore que de 24 milliards d’euros.
À titre d’exemples d’entreprises pouvant bénéficier du relâchement de l’emprise de la big tech, Kwok cite Bilibili, ‘le YouTube chinois’, Meituan Dianping (une sorte d’Alibaba pour les services) ainsi que la société d’e-commerce SEA de Singapour (avec une allocation de 7,5 %, la position la plus importante du fonds). « SEA est particulièrement importante en Asie du Sud-Est et connaît une croissance considérable aussi bien dans l’e-commerce que dans les jeux en ligne. » De même, l’entreprise est provisoirement moins gênée par les régulateurs. « Elle a récemment obtenu une licence de banque numérique à Singapour, ce qui est une excellente nouvelle pour sa branche fintech. »
Bilibili compte aujourd’hui 200 millions d’utilisateurs, et ce nombre devrait doubler tous les deux ans, estime Kwok. « Sa capitalisation boursière n’est encore que de 40 milliards de dollars. » Alibaba et Tencent prévoient d’ailleurs de profiter de l’essor des petites entreprises technologiques. Les deux sociétés ont une participation minoritaire dans Bilibili. « Elles ne se mêlent pas du processus opérationnel, mais le considèrent surtout comme un investissement stratégique. »
Cependant, Kwok investit également dans les leaders du marché de l’e-commerce, comme l’entreprise latino-américaine MercadoLibre, avec une allocation de 5,9 % la deuxième position la plus importante de son fonds. En effet, MercadoLibre a encore un énorme potentiel de croissance. « La part de marché de l’e-commerce y est encore très faible, à peu près comme en Chine il y a dix ans. »
Soins de santé
Cependant, c’est dans le secteur des soins de santé, et surtout en Chine, que Kwok voit les meilleures opportunités de croissance sur les marchés émergents. C’est notamment dû au fait que le gouvernement encourage les investissements dans le développement de médicaments afin de réduire la dépendance aux médicaments occidentaux. « Il y a dix ans, l’industrie pharmaceutique chinoise était encore dominée par des sociétés pharmaceutiques qui fabriquaient des médicaments bon marché et peu distinctifs, mais ces deux dernières années, la biotechnologie a connu des développements considérables. En 2019, plus de 200 nouveaux médicaments ont été brevetés en Chine. À titre de comparaison, ce chiffre n’était que de 90 en 2014. »
Kwok : « En Chine, 4,3 millions de diagnostics de cancer sont posés chaque année, et ce nombre augmente rapidement en raison de la combinaison de la croissance économique et du vieillissement de la population. Le gouvernement chinois considère donc l’autosuffisance médicale comme une priorité nationale absolue, tout comme il veut construire une industrie nationale des semi-conducteurs. »
De plus, la Chine consacre encore relativement peu d’argent aux soins de santé, environ 5 % du revenu national. « Ce pourcentage continuera de croître rapidement, alimenté par les investissements de la Chine elle-même dans les soins de santé et la biotechnologie. Nous avions d’ailleurs déjà observé cette tendance avant la pandémie, mais elle ne fera que s’intensifier. Cela vaut pour la Chine, mais en fait pour tous les marchés émergents, dans une plus ou moins grande mesure. » Fin février, le fonds de Kwok avait une allocation de 22,3 % au secteur de la santé, soit plus de cinq fois plus que l’indice MSCI Emerging Markets.