Ethias
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Dans notre série d’entretiens avec des CIO de compagnies d’assurance, nous donnons la parole à Joris Laenen, Chief Investment & Life Officer chez Ethias depuis 2021. Avec son équipe, il gère environ 19 milliards d’euros d’actifs.

Comment est composé le portefeuille d’investissement d’Ethias ?
Joris Laenen : « Nous avons environ 50 % en obligations d’État et assimilées, 25 % en obligations d’entreprises et 10 % en placement alternatifs et participations. Les actions représentent 5 à 6 % – autrefois, c’était 8 %. Et nous maintenons 3 % de liquidités. »

À quoi faites-vous attention en ce qui concerne les obligations d’État ? 
« Nous nous concentrons principalement sur la Belgique et la France. En raison des élections dans ces deux pays, nous menons une politique active de couverture des spreads de swaps, afin de nous prémunir contre d’éventuelles fluctuations des taux d’intérêt et des spreads. »

Que pouvez-vous nous dire sur les obligations d’entreprises détenues par Ethias ? 
« Chez nous, les obligations d’entreprises ont généralement une échéance de six à sept ans. Il s’agit principalement d’entreprises européennes, en grande partie du secteur financier. Nous avons également beaucoup d’entreprises cycliques et d’entreprises de biens de consommation. Nous détenions également une grande quantité d’obligations immobilières, mais nous les avons progressivement réduites. En revanche, nous avons toujours un fort appétit pour le secteur financier : les marges sont excellentes et il s’agit d’un marché liquide, bien contrôlé et très transparent. »

Pourquoi avoir allégé la part des obligations immobilières ?
« Nous estimons que le spread ne reflète plus le risque auquel les promoteurs immobiliers sont actuellement exposés. Nous avons en fait commencé à réduire les obligations immobilières immédiatement après la pandémie. Nous sommes partis du principe que si les taux d’intérêt augmentaient, les secteurs surendettés comme les télécommunications et l’immobilier pourraient se retrouver en difficulté. Et c’est ce qui s’est produit. Pour nous, tout est question d’anticipation. En effet, il est impossible de modifier entièrement notre portefeuille en une semaine seulement. »

Comment ces décisions tactiques sont-elles prises ? Travaillez-vous sur la base d’un modèle de consensus ou bien êtes-vous celui qui tranche ? 
« Nous travaillons à quatre équipes. Une première s’occupe de la gestion actif passif (ALM) ainsi que des obligations d’État et dérivées, notamment pour la couverture de l’inflation. Une deuxième équipe se consacre aux obligations d’entreprises, une troisième aux actions et une quatrième à l’immobilier direct, ce qui représente au total une vingtaine de personnes. Nous tenons des réunions hebdomadaires avec les responsables de chaque équipe, au cours desquelles nous discutons de la situation économique et des tendances du marché. Cela nous permet de savoir sur quoi chacun travaille, quelles transactions sont en cours et quels flux nous observons. Nous tirons nos informations de notre propre expérience du marché et de nos contacts avec les grandes banques d’investissement. Au bout du compte, c’est moi qui prends les décisions finales, mais j’essaie toujours de rechercher un consensus. Depuis cinq ans que je travaille ici, je n’ai jamais eu à imposer mon avis. »

Quelle est votre fourchette pour l’exposition en actions et quel est le fil conducteur de ces investissements ? 
« En ce qui concerne les actions, nous disposons d’une certaine flexibilité. Nous pouvons aller jusqu’à 10 % d’actions si nécessaire. Cela peut être un peu plus risqué si le projet et les marchés sont favorables, et nous ne sommes pas tenus de nous limiter à l’Europe. Selon notre modèle ALM, nous recherchons des investissements offrant des dividendes ou des coupons aussi prévisibles que possible. Nous nous concentrons donc principalement sur les actions à dividendes, avec, depuis 2021, une focalisation supplémentaire sur les secteurs dans lesquels nous prévoyons de la croissance. Nous misons sur la logistique depuis 2021, et la technologie et la consommation sont venues s’ajouter en 2022. »

Que pouvez-vous nous dire sur l’immobilier locatif détenu par Ethias ? 
« Un peu moins de la moitié est constituée d’immeubles de bureaux. Nous avons élargi notre portefeuille à l’immobilier de santé, avec une dizaine de maisons de repos. Nous détenons également de l’immobilier logistique dans toute l’Europe, en partenariat avec Weerts Logistics. Nous investissons également dans les logements pour étudiants (via Quares), un secteur très intéressant avec un bon taux d’occupation ainsi que des baux de courte durée et des loyers indexés sur l’inflation. Enfin, nous sommes également investis dans l’immobilier résidentiel via des fonds privés. »

Quelle est l’importance de la durabilité pour Ethias ?

« Ethias signifie Assurance Éthique, le ‘h’ ressortant du logo afin de souligner l’aspect humain. Nous avons une stratégie d’investissement durable assez ambitieuse. On peut dire que nous sommes alignés sur le label Towards Sustainability. (Réfléchit un instant.) Je n’ai pas l’impression que l’ESG ait été le principal moteur de performance ces dernières années, contrairement à l’énergie conventionnelle, à la défense et à la technologie. Cependant, durant certaines périodes, la variante ESG des indices surperforme la variante non ESG. »

Cependant, ces résultats décevants ne rendent pas votre portefeuille moins durable. Pourquoi ? 
« Nous voulons être très stricts en matière de durabilité, afin de pouvoir regarder nos clients droit dans les yeux. D’un autre côté, nous souhaitons continuer à dialoguer avec des secteurs exclus de certaines listes. Prenons l’exemple de notre participation dans Fluxys : l’entreprise est active dans le transport de gaz par pipelines, mais elle détient également la clé de la transition vers l’hydrogène. Certaines entreprises doivent être exclues en raison de certaines activités spécifiques mais d’autres peuvent au contraire être le moteur de la transition. »

Qu’appréciez-vous le plus dans votre travail ? Et qu’est-ce qui vous plaît le moins ? 
« Ce que j’apprécie le plus, ce sont les contacts humains avec les investisseurs et les entrepreneurs. Toutes ces personnes ont leur propre dynamisme, leur propre personnalité et leur propre agenda. Qu’est-ce qui les motive ? Comment cela se traduit-il dans leurs actions ? Et est-ce que j’ai envie d’investir dans cela ? C’est là aussi que se situe toute la différence avec le secteur bancaire, où j’ai travaillé autrefois. Les banques financent, nous investissons. Ce que j’aime le moins, ce sont les projets qu’on doit abandonner. En d’autres termes, faire le ménage. Et cela impacte toute l’année comptable. »

Et qu’est-ce qui vous motive ? 
« Je m’intéresse à tout ce qui touche à l’actualité, l’économie et la politique. En faire partie, même modestement, est très agréable. Il est très gratifiant de voir les projets auxquels nous avons pu contribuer. »

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