L’immobilier belge coté en bourse n’a pas été épargné par la tourmente boursière : l’indice EPRA des sociétés immobilières belges a déjà perdu plus de 15 % depuis le Nouvel An. Les propriétaires de maisons de retraite ont été les plus durement touchés par le tollé suscité par les abus commis à Orpea, en France. Mais il ne faut pas mettre tous les SIR dans le même sac. La diversification restera de mise.
C’est la conclusion d’un document de recherche de Niels Van Lierde, gestionnaire de portefeuille chez Edmond de Rothschild (Europe) à Bruxelles.
Il explique : La principale raison de la baisse des SIR belges est la hausse des taux d’intérêt, qui entraîne une réelle réévaluation de certaines valeurs. Supposons que vous déteniez une action dont le rendement en dividendes est de 4,3 % et qui coûte 100 euros, mais qu’en raison de la hausse des taux d’intérêt, ce montant est insuffisant et que vous souhaitez 4,6 %. Ensuite, la société doit soit augmenter son dividende de 4,3 à 4,6 euros, soit faire chuter le prix à environ 93,50 euros. La raison pour laquelle vous exigez 4,6 % au lieu de 4,3 % réside peut-être dans les rendements obligataires qui sont supérieurs de 30 points de base (0,3 %). Dans le passé, la différence entre le rendement moyen des dividendes des SIR belges et le rendement à 10 ans était proche de 4 points de pourcentage, avec une marge de 1 point de pourcentage à la hausse ou à la baisse.
Si les taux d’intérêt augmentent aussi rapidement qu’ils le font actuellement, M. Van Lierde affirme que cela s’accompagnera inévitablement de réactions violentes des prix des actions immobilières. Le carnage sur les marchés obligataires a conduit à une réévaluation de certains SIR. Nous observons cela principalement dans les SIR actives dans l’immobilier de santé et de logistique avec un rendement de dividende relativement plus faible et une croissance élevée du portefeuille immobilier. L’immobilier commercial, dont le dividende est généralement plus élevé, souffre moins de cette situation. Ainsi, si à court terme, la hausse des taux d’intérêt peut clairement avoir un impact sur le cours des actions des SIR, l’histoire nous montre que ce n’est pas le cas à moyen et long terme.
Performances sectorielles
Source : Edmond de Rothschild (Europe) per 08/02/2022
Les fossoyeurs
Les révélations du livre «Les Fossoyeurs» de Victor Castanet, qui vient de paraître, sur les abus commis à Orpea, provoquent un véritable scandale dans le secteur des soins en France. L’opérateur français de maisons de retraite a perdu plus de la moitié de sa valeur boursière depuis le début de l’année. Un risque de réputation qui touche également les propriétaires de biens immobiliers d’habitation. L’incertitude incite surtout les investisseurs étrangers - qui vendent d’abord et posent ensuite des questions - à appuyer sur les boutons de vente. Les sociétés Bel20 telles qu’Aedifica et Cofinimmo, qui détiennent de nombreux fonds étrangers, en souffrent le plus», indique M. Van Lierde.
À ce stade, dit-il, il est trop tôt pour prédire le résultat et l’impact sur le modèle de fonctionnement du secteur des maisons de retraite. Une nouvelle réglementation plus stricte pourrait freiner la croissance des exploitants de maisons de retraite, ce qui pourrait avoir un impact sur le potentiel de croissance des propriétaires de maisons de retraite. D’autre part, nous pouvons constater que les propriétaires de maisons de retraite ont une base de locataires très diversifiée.
Un acteur comme Aedifica compte 120 prestataires de soins différents et ne reçoit que 6 % de ses revenus locatifs d’Orpea. En outre, ces baux sont fixés pour une très longue durée. Notre conclusion est donc que, pour l’instant, il n’y a pas de raisons fondamentales de s’inquiéter à long terme et que la faiblesse actuelle est plutôt un point d’entrée».
Quant au scandale dans le secteur des soins de santé, M. Van Lierde estime qu’il est trop tôt pour tirer des conclusions majeures. Il estime que les opérateurs qui rognent sur les coûts seront probablement confrontés à une réglementation plus stricte à l’avenir.
Mais n’oublions pas qu’en raison du vieillissement de la population, il y aura un besoin croissant de nouvelles infrastructures de soins, ce qui constitue un catalyseur à long terme pour ce marché. La correction de certaines valeurs immobilières depuis le début de cette année semble donc plutôt saine après une brillante année 2021. Une nouvelle progression de ces SIR pourrait créer des opportunités d’achat à court terme. Il est aujourd’hui plus important que jamais d’avoir une diversification suffisante entre les différents sous-secteurs de l’immobilier (résidentiel, commerces, bureaux, logistique, etc.), combinée à une bonne gestion des risques», conclut-il.
Durabilité
Pascale Nachtergaele, gestionnaire du Nagelmackers European Real Estate Fund, estime que l’immobilier reste intéressant compte tenu de la faiblesse des taux d’intérêt. Sa préférence va toujours à l’immobilier logistique, mais elle voit aussi du potentiel dans d’autres segments. C’est ce qui ressort d’une récente interview.
L’immobilier européen s’est moins bien comporté que les actions mondiales en 2021, mais selon Nachtergaele, il existe un écart important entre les différents segments immobiliers. L’entreposage et la logistique se sont très bien comportés, tout comme l’immobilier de santé, tandis que l’immobilier résidentiel a enregistré une performance négative. Et comme les taux d’intérêt ont été très volatils, le secteur de l’immobilier s’est également comporté de manière volatile en 2021›.
Cependant, elle reste positive pour l’immobilier européen en 2022. Il est toujours opportun de diversifier une partie du portefeuille dans l’immobilier. Après tout, nous ne nous attendons pas à une forte hausse du taux de base allemand, qui est toujours négatif. En outre, le rendement du dividende de 3,4 % en moyenne reste attrayant. L’important tampon entre le dividende moyen et les taux d’intérêt à long terme sera un facteur de soutien. Et en ce qui concerne la croissance économique, nous n’envisageons pas un «scénario faible». Enfin, Mme. Nachtergaele souligne que la durabilité va gagner en importance. La demande de biens immobiliers durables ne fera qu’augmenter. Il y a beaucoup d’opportunités dans ce domaine.