Les clients de Van Lanschot Belgique gardent la tête froide, mais la nervosité s’insinue davantage que pendant la crise du coronavirus dans leur esprit. Les obligations reprennent du sens et la dynamique commerciale reste forte.
C’est ce qui ressort d’un entretien avec Geoffroy Vermeire (photo), membre du comité de direction de Van Lanschot Belgique. Il se montre satisfait de la dynamique commerciale de la banque privée.
Comment les clients private banking/gestion discrétionnaire/gestion conseil réagissent-ils à la détérioration de la situation du marché depuis le début de l’année ?
Vermeire : « Nos clients sont souvent des investisseurs chevronnés. Ils sont donc déjà habitués à pas mal de choses. De plus, nous les conseillons et les assistons dans notre rôle de conseiller de confiance. C’est dans ce rôle que nous apportons à nos clients un soutien supplémentaire dans les moments difficiles, afin qu’ils restent sur la voie qui mène à la réalisation de leurs objectifs financiers. Il s’agit principalement de les aider à ne pas commettre les erreurs classiques des investisseurs, comme se retirer du marché.
Compte tenu de tout ce qui se passe dans le monde actuellement, nos clients gardent généralement la tête froide. Il n’en reste pas moins que l’incertitude actuelle s’insinue dans leur esprit également. Bien que la correction liée à la pandémie en 2020 ait été beaucoup plus sévère que celle que nous connaissons actuellement sur les marchés boursiers, j’ai l’impression que nos clients sont tout de même un peu plus nerveux aujourd’hui qu’à l’époque. »
Quelles mesures Van Lanschot a-t-elle prises pour protéger les portefeuilles contre l’inflation/les hausses de taux d’intérêt ?
« Depuis quelque temps déjà, nous investissons moins que d’habitude en obligations et avons en outre également maintenu la sensibilité aux taux d’intérêt (duration) de nos investissements obligataires à un niveau plutôt bas, autour de 4,5 ans. Nous n’étions et ne sommes pas investis dans des obligations indexées sur l’inflation. Elles n’offrent pas la protection intuitive à court terme contre la hausse de l’inflation à laquelle de nombreuses personnes s’attendent.
Dans une période comme celle-ci, la liquidité est également très importante, c’est pourquoi nous investissons près de la moitié de nos avoirs obligataires dans des obligations d’État UEM. L’autre moitié est principalement investie dans des obligations d’entreprises IG, avec un petit accent sur les obligations des marchés émergents et le global High Yield. Ces deux dernières catégories sont couvertes en euros. En effet, nous ne connaissons aucun gestionnaire capable d’ajouter constamment de la valeur en prenant un risque de change dans les investissements obligataires. »
Comment se présente un portefeuille équilibré typique ?
« Nous venons de réduire certaines actions européennes pour aboutir à une pondération d’environ 54 %, ce qui est juste en dessous de notre pondération stratégique en actions. Bien que Nordstream 1 ait rouvert ses vannes, l’incertitude concernant l’approvisionnement en gaz russe et la question énergétique en général reste élevée pour la période à venir. Certains chiffres macroéconomiques qui sont tombés, comme les récents PMI, pointent encore plutôt dans la mauvaise direction.
Dans le même temps, la plupart des indicateurs axés sur le sentiment sont tous à leur plus bas niveau. Étant donné qu’il faut considérer cela comme un contre-indicateur, il s’agit par contre d’un bon signal. Par exemple, selon la BofA Global Fund Manager Survey, les gestionnaires prennent actuellement en moyenne 58 % de risques en moins dans leurs portefeuilles que la normale (ce qui est encore moins qu’en 2008) et affichent un des ratios de liquidité les plus élevés jamais enregistrés, même plus élevé qu’en 2008. De ce point de vue, il est donc préférable de ne pas retirer trop d’argent. »
Êtes-vous prêts à appliquer les exigences de durabilité dans le profilage des clients à partir du 2 août ?
« À partir du 2 août, nous demanderons à nos nouveaux clients ainsi qu’aux clients existants dont nous révisons le profil d’également nous indiquer leurs préférences en matière de durabilité. Cependant, nous ne voulons pas encore aller trop loin, car nous ne voulons pas ennuyer nos clients avec des questions auxquelles ils doivent apporter une réponse et pour lesquelles nous ne pouvons encore rien faire pour eux. Par exemple, la Corporate Sustainability Reporting Directive vient tout juste d’être approuvée par le Parlement européen.
Il s’agit d’une législation qui oblige les entreprises européennes à fournir des informations non financières de manière standardisée. Ce n’est donc qu’à partir de l’année prochaine au plus tôt que toutes sortes de données sur la durabilité seront rendues publiques dans ce cadre. C’est également à partir de ce moment-là seulement que la plupart des données de la Taxonomie européenne seront disponibles.
Dans une deuxième phase, nous questionnerons bien sûr nos clients de manière plus large et plus approfondie concernant leurs préférences en matière de durabilité. La durabilité a toujours été pour nous une question sérieuse. Déjà demander aux clients quel pourcentage d’investissements alignés sur la taxonomie ils souhaitent, quels PAI (Principle Adverse Impact) ils veulent que nous prenions en compte, etc., ne serait pas sérieux car ces données ne sont tout simplement pas encore disponibles, ou de qualité encore insuffisante. »
Avez-vous augmenté la part des actifs privés ?
« Les actifs privés ne constituent pas une partie stratégique ou tactique de notre allocation d’actifs. Ils sont plutôt placés dans le portefeuille de clients disposant de plus de 5 millions d’euros s’ils manifestent eux-mêmes un intérêt en ce sens. Mais bien que chez Kempen, nous disposions d’une expertise approfondie et d’une gamme de produits correspondante, cela reste provisoirement une niche. »
Comment se passe votre dynamique commerciale ?
« En termes de croissance des actifs sous gestion, nous avons à nouveau connu un fantastique premier quadrimestre (et ce pour la cinquième année consécutive). Les mois de mai et juin ont été un peu plus calmes, mais le mois de juillet se présente à nouveau sous les meilleurs auspices. L’inflation est présente et l’argent perd de sa valeur si vous n’en faites rien. Les investissements obligataires reprennent du sens.
Grâce à notre service personnalisé, nous avons beaucoup de contacts avec nos clients et ils comprennent notre approche à long terme. Dans l’intervalle, la production de crédits augmente bien et, à cet égard, nous sommes également très satisfaits du premier semestre de l’année. »