Dans un contexte économique qui devrait rester peu inspirant, Christophe Donay (Pictet Wealth Management) estime que la diversification des portefeuilles devra viser les sociétés avec du pricing power, les sociétés technologiques disruptives et les placements illiquides.
« Le monde actuel reste bouleversé par des tendances structurelles importantes telles que l’innovation technologique, la démographie, le changement climatique ou la montée des populismes », souligne Christophe Donay, le responsable de l’allocation d’actifs chez Pictet Wealth Management.
« En outre, la croissance économique reste largement liée à la croissance de la dette depuis près de 40 ans, ce qui conditionne aujourd’hui les attitudes accommodantes de la plupart des banques centrales ».
Pour les mois à venir, il s’attend à une poursuite du ralentissement de la croissance américaine, sans toutefois entrer en récession ; tandis que la Chine devrait être en mesure de soutenir son économie pour atteindre son objectif de 6 à 6,5% de croissance. Enfin, l’Europe restera impactée par la guerre commerciale qui affecte l’industrie manufacturière allemande, tandis que la consommation intérieure (soutenue par des politiques fiscales plus ambitieuses) influencera favorablement l’activité économique.
Guerre commerciale
« Jusqu’ici, l’impact de la guerre commerciale a été relativement limité au niveau américain », indique Christophe Donay. « Mais elle provoque une grande nervosité qui risque encore de s’accentuer avec les nouvelles mesures récemment annoncées. Et tant que cette thématique restera présente sur les marchés, le potentiel haussier sera plafonné ». En outre, il ne s’attend pas à ce que ce problème disparaîsse de sitôt.
« La guerre commerciale est liée à la hausse des populismes, mais surtout à un changement du leadership mondial entre les Etats-Unis et la Chine ». C’est surtout au niveau technologique que cette contestation de la suprémacie américaine commence à créer des étincelles, et l’administration de Donald Trump cherche aujourd’hui clairement à empêcher la Chine de se développer dans un domaine stratégique qu’elle considère comme stratégique pour les vingt prochaines années.
« Nous sommes aujourd’hui plus la première fois dans un monde capitaliste bipolaire, avec deux blocs qui s’affrontent. La Chine est l’endroit où la politique économique est aujourd’hui la plus puissante, où les autorités sont en mesure d’allumer ou d’éteindre tous les moteux de politique économique (fiscal, monétaire, budgétaire) selon les besoins », indique Christophe Donay. « Cette politique du stop and go entraîne également plus d’incertitudes sur les marchés.».
Investissements
Au niveau des marchés boursiers, il souligne que les valorisations sont aujourd’hui tendues dans les pays développés avec des rapports cours/bénéfice supérieurs aux moyennes historiques. « Une poursuite de la hausse nécessiterait de bonnes nouvelles et des surprises de nature à impacter la tendance. Mais le fait est que ce n’est pas vraiment le contexte que nous connaissons actuellement, avec une croissance qui déçoit et des attentes sur les résultats qui ralentissent ». Dès lors, Christophe Donay ne pense pas que les marchés se redressent au-delà des plus hauts qui ont déjà été atteints depuis le début de l’année.
Au niveau de l’allocation d’actifs, il apprécie les sociétés défensives ayant la possibilité de fixer leur prix sans perdre leurs parts de marché (par exemple sur l’agro-alimentaire, la pharmacie ou le luxe), ainsi que sur des thématiques technologiques disruptives. Au niveau géographique, Christophe Donay apprécie les actions asiatiques (notamment chinoises ou indiennes) en raison de la capacité de ces gouvernements à contrôler leur politique économique.
Inversement, les placements monétaires ne sont aujourd’hui plus un actif stratégique, tandis que la dette souveraine ne permet plus de protéger le patrimoine en dehors des pétiodes de volatilité extrême. Et en l’absence d’inflation, l’or ne représente pas non plus une diversification attrayante sauf pour se rassurer face à l’éventualité d’un risque extrême.
« C’est pourquoi nous recommandons aujourd’hui d’exposer un tiers de son patrimoine vers des actifs illiquides (private equity, immobilier direct, dette privée, etc). C’est la seule classe qui permet aujourd’hui d’avoir une espérance de rendement attractif (4 à 5% de surperformance annualisée) à condition de pouvoir immobiliser une partie de son patrimoine pendant 8 ans ».