« L’environnement réglementaire du secteur de la gestion d’actifs devient de plus en plus complexe. Ceux qui pensaient que le plus gros des nouvelles législations était derrière nous se trompent », déclare Marc Van de Gucht. Selon le directeur général de la BEAMA, se conformer à une réglementation toujours plus stricte constitue l’un des quatre défis majeurs que les gestionnaires d’actifs belges doivent anticiper dans les années à venir.
Marc Van de Gucht, directeur général de la Belgian Asset Managers Association (BEAMA), déclare : « Cela peut sembler une évidence, mais les prochaines années s’annoncent exceptionnellement riches en défis pour le secteur de la gestion d’actifs ». « Ces dernières années, l’économie mondiale est devenue de plus en plus volatile en raison de facteurs tels que la pandémie de Covid-19, la guerre en Ukraine et la hausse de l’inflation. Ces incertitudes se sont traduites par une baisse des cours boursiers. Cependant, avec l’atténuation des craintes d’une récession et les perspectives de baisses des taux d’intérêt, les marchés ont repris des couleurs ces derniers mois. Néanmoins, des changements dans le paysage politique et macroéconomique pourraient rapidement venir ternir ce tableau. »
« Il incombe aux gestionnaires d’actifs de suivre toutes ces évolutions de près et, le cas échéant, d’adapter leur politique et les portefeuilles qu’ils gèrent », souligne Marc Van de Gucht.
Défi 1 : mettre en œuvre les nouvelles exigences ESG
« Il y a urgence à s’attaquer aux défis mondiaux tels que le changement climatique, la perte de biodiversité et les violations des droits humains. Ces enjeux constituent des menaces sérieuses pour notre planète et notre société », avertit Marc Van de Gucht.
« Relever certains de ces défis nécessite des investissements considérables de la part des secteurs public et privé. Ils représentent également un risque croissant pour les entreprises qui les ignorent, et une opportunité pour celles qui en tiennent compte. »
« L’Union européenne prend la durabilité au sérieux et en a fait une priorité absolue. Elle a cependant souvent élaboré des directives et règlements pour le secteur financier de manière précipitée et insuffisamment réfléchie, entraînant un manque (total) de cohérence. La mise en œuvre de ces nombreuses nouvelles exigences ESG représente donc un défi majeur pour les gestionnaires d’actifs, car ces critères ESG doivent être intégrés dans le processus d’investissement, la gestion des risques, la transparence et le reporting aux clients. L’un des principaux défis à cet égard réside dans l’obtention de données standardisées, fiables, de haute qualité et abordables. »
Marc Van de Gucht observe que la Belgique joue un rôle de pionnier en matière d’investissements durables. Selon une étude de la BEAMA, plus de 75 % des fonds commercialisés en Belgique sont des fonds Article 8 ou 9 selon la SFDR (voir graphiques ci-dessous). Dans ce domaine, la Belgique n’est devancée que par les pays scandinaves. L’Allemagne et les Pays-Bas suivent loin derrière.
« Le secteur belge de la gestion d’actifs souhaite continuer à jouer un rôle de pionnier dans le domaine de l’investissement durable », déclare Marc Van de Gucht. « Il est donc important que le secteur belge de la gestion d’actifs joue un rôle de premier plan afin de garantir la cohérence de toutes les politiques actuelles et futures, ainsi que la bonne coordination de leur mise en œuvre.
Le directeur général indique que la BEAMA participe, dans la mesure du possible, à la révision des règles de durabilité prévue par l’Union européenne.
Les fonds durables Articles 8 et 9 sont plus nombreux en Belgique que dans d’autres pays européens
Défi 2 : assurer la conformité face à une législation et une réglementation croissantes
Le deuxième défi majeur identifié par Van de Gucht pour les gestionnaires d’actifs belges est la réglementation. Celle-ci devient en effet de plus en plus complexe, avec l’introduction de nouvelles règles destinées à protéger les investisseurs ainsi qu’à accroître la stabilité et la transparence des marchés financiers et de leurs acteurs.
Pour Marc Van de Gucht, « l’évolution rapide et la complexité croissante de la réglementation obligent les gestionnaires d’actifs à investir dans toujours plus de ressources, tant techniques qu’humaines, notamment dans les nouvelles solutions technologiques de conformité, afin de pouvoir continuer d’assurer le respect des nouvelles règles. En effet, le coût de la non-conformité est (trop) élevé. Recruter et fidéliser l’expertise nécessaire constitue également un défi. »
« Ceux qui pensaient que le plus gros des nouvelles législations était derrière nous se trompent. Un véritable tsunami de nouvelles réglementations à intégrer va encore déferler sur le secteur. Rien qu’avec la réglementation ESG (de la SFDR à la CSRD, en passant par les notations ESG, la CSDD, le règlement contre la déforestation et les normes mondiales pour le reporting de durabilité), il s’agit d’un des plus grands projets que le secteur ait eu à mettre en œuvre depuis la directive OPCVM », estime le directeur général de la BEAMA.
Dans ce contexte, il est essentiel d’éviter les divergences de transposition des directives en droit national entre États membres. Les coûts croissants de la mise en conformité avec la réglementation, conjugués à l’augmentation d’autres coûts tels que ceux liés aux données, rendent la survie des petits et moyens gestionnaires d’actifs de plus en plus difficile. La consolidation du secteur ne fait donc que s’accentuer », anticipe Marc Van de Gucht.
Défi 3: adopter les avancées technologiques
« Avec l’émergence rapide de technologies innovantes telles que l’IA, il est primordial pour le secteur de la gestion d’actifs en Belgique d’embrasser le progrès technologique. Cela constitue un pilier fondamental pour la croissance, le maintien d’une position concurrentielle solide et l’amélioration du service client afin de garder une longueur d’avance sur un marché concurrentiel », déclare Marc Van de Gucht.
Outre l’amélioration et la rationalisation des processus existants, Marc Van de Gucht souligne l’importance de proposer un large éventail de produits d’investissement pour répondre à la diversité des besoins et des profils de risque des investisseurs, de la gestion active à la gestion passive, et des classes d’actifs traditionnelles aux classes d’actifs alternatives.
En Belgique, le secteur de la gestion d’actifs dispose déjà d’une offre étendue. Cependant, il est essentiel qu’il soit en mesure d’intégrer de manière appropriée les nouvelles tendances internationales dans ces domaines, sans être limité par des restrictions locales par rapport à d’autres acteurs du marché international. Un secteur belge de la gestion d’actifs fort revêt également une importance stratégique, non seulement pour les clients, mais aussi pour l’économie belge. Le secteur agit comme une force motrice pour le financement de l’économie réelle du pays. »
Défi 4 : la guerre des talents
Pour progresser en matière d’investissement durable, de transformation numérique, de développement de nouveaux produits ou de démocratisation des catégories d’investissement alternatives, les gestionnaires d’actifs belges doivent proposer des offres attractives, estime Marc Van de Gucht. « Il est crucial d’attirer les jeunes talents prometteurs et de continuer à développer les compétences disponibles – par exemple, en collaborant avec des universités et des centres de formation. »
« Afin de prospérer dans l’environnement dynamique actuel, le secteur de la gestion d’actifs doit rester agile et tourné vers l’avenir. Tous ces défis présentent également des opportunités. Le secteur a déjà démontré par le passé sa capacité à surmonter les défis et la BEAMA est confiante dans la capacité des gestionnaires d’actifs à réitérer cet exploit. Ce n’est pas sans raison que le FMI a qualifié de robuste le secteur belge de la gestion d’actifs. »
Cet article constitue le premier d’une série consacrée aux défis auxquels sont confrontés les gestionnaires d’actifs belges. Le deuxième volet examinera comment les gestionnaires d’actifs font face à la nécessité de durabilité, à l’intensification de la réglementation, à l’émergence de nouvelles technologies et à la recherche de talents.