Alors que l’économie mondiale se dirige vers un ralentissement structurel et cyclique, l’attrait pour les obligations et, dans certains cas, pour le crédit est indéniable. Nous identifions de la valeur dans les obligations « périphériques » européennes, le crédit européen (y compris les obligations sécurisées ultra-sûres) et certaines dettes financières. En outre, après deux trimestres de repli modéré des bénéfices, les actions devraient connaître une croissance faible à l’avenir. Cela se traduit par une baisse de performance boursière attendue contrebalancé toutefois par une politique d’assouplissement de la banque centrale, ce qui devrait limiter les risques à la baisse et, en fin de compte, aider à la hausse. Dans ce contexte de marché incertain, nous continuons de privilégier les portefeuilles résilients et les actions défensives avec une composition sectorielle diversifiée et comprenant notamment l’immobilier et les infrastructures cotés. Les stratégies de performance absolue tendent à améliorer le profil rendement/risque, bien que toutes ces stratégies ne se valent pas.
Le choc des Titans
Les négociations commerciales entre les États-Unis et la Chine ont connu un nouveau rebondissement, la Chine ayant renoncé à ses promesses antérieures, laissant le président américain affaibli aux yeux des républicains radicaux, un groupe qu’il considère comme sa base électorale.
Le processus d’escalade et désormais de désescalade devrait durer quelques semaines. Avec une faible croissance aux États-Unis et en Chine, il y a de fortes chances que les deux présidents se dirigent vers un accord commercial de fortune au deuxième ou au troisième trimestre 2020, juste à temps pour avoir un impact sur les élections présidentielles américaines. Cela dit, il est toujours possible que la situation s’aggrave, car l’un ou l’autre souhaitera prouver ses compétences de négociateur acharné. Un tel scenario se produirait probablement au premier trimestre, suffisamment éloigné de l’élection pour que les chocs sur la croissance et les actions aient le temps de se dissiper.
L’accord sera probablement axé principalement sur l’agriculture et l’industrie. En raison de cette « thématique », l’instabilité sur les marchés actions devrait perdurer dans les mois à venir avec notamment les marchés émergents étant les plus sensibles et offrant de ce fait des opportunités, dans la mesure où nous nous attendons à une résolution de ce problème à moyen terme. Nous pensons que l’opportunité se situe davantage dans les obligations que dans les actions.
Japonification – opportunités dans l’univers obligataire
L’économie mondiale connaît un ralentissement à la fois structurel et cyclique. Il y a trois causes - la première est structurelle : Plusieurs pays composant les marchés émergents commencent à évoluer et leurs économies passent d’un secteur manufacturier très efficace vers un secteur de services à valeur ajoutée beaucoup plus élevée mais moins efficace. Deuxièmement, les populations vieillissent partout dans le monde, du Japon à la Finlande, en passant par l’Italie, l’Allemagne, etc. Cette tendance tend à augmenter l’épargne et de fait à réduire la consommation. Le troisième facteur est la technologie, qui est assez complexe. La recherche de rendement oblige les entreprises des secteurs matures à réduire leurs coûts, ce qui fait baisser la demande, mais aussi leur capacité d’innovation.
En outre, les taux d’intérêt faibles facilitent grandement la mise sur le marché des entreprises. Cela signifie que le rythme des progrès technologiques est probablement beaucoup plus rapide que ne l’indiquent nos mesures actuelles, ce qui se traduit par une faible inflation. Par exemple, un nouvel entrant sur le marché de détail norvégien, tel que Lidl, avec son modèle basé sur l’efficacité du contrôle de ses coûts, pourrait faire chuter considérablement une structure de prix extrêmement élevée. Dans le même temps, Lidl s’est effondré en Norvège après avoir échoué dans son offre produit, de stratégie et d’emballage. L’innovation n’est pas un processus à sens unique.
Sur le plan cyclique, l’économie mondiale ralentit, ceci en raison notamment d’une crise du bilan en Chine et, dans une moindre mesure, dans la zone euro. Il y a trop de capacité en Chine et pas assez de bilans sains parmi les institutions financières. Par conséquent, le gouvernement chinois est intervenu pour retarder la compression éventuelle des capacités et pour assouplir les conditions de financement, tout en conservant des conditions relativement strictes dans le secteur immobilier, secteur très tendu. Les données chinoises sont peut-être douteuses - en effet, la croissance devrait avoisiner 4,2 % et se diriger vers 3,7 % après la guerre commerciale - mais les autorités sont très crédibles. Ils finiront par adapter leur stratégie. Ce choc de croissance frappe durement l’Europe, en particulier l’Allemagne, et les Etats-Unis également. La fin de l’ère de la forte croissance des marchés émergents et la guerre commerciale a perturbé les entreprises, néanmoins nous anticipons que ces craintes excessives s’inversent.
La combinaison d’un ralentissement structurel et cyclique et, dans certains cas, de problèmes de bilan, comme en Chine, signifie que la croissance et de l’inflation restent faibles : des ingrédients idéaux pour les solutions obligataires (et dans une certaine mesure du crédit). La dette périphérique européenne, comme l’Italie et la Grèce, sont des choix évidents dans le domaine obligataire. Le choix au sein du crédit est plus complexe.
Privilégier les actions défensives
Dans un monde où la croissance attendue est faible, tout comme la reprise potentielle des bénéfices, les perspectives pour les actions, du moins sur les marchés développés, sont peu prometteuses. Dans un tel marché indécis où il est difficile de définir l’orientation des actions, les investisseurs devraient se concentrer sur les actions qui offrent un certain rendement tout en offrant une certaine sécurité, notamment avec des flux de trésorerie stables.
On retrouve ces caractéristiques dans certains segments du marché, surtout dans l’immobilier et les infrastructures cotés qui présentent l’avantage de mieux contenir les baisses par rapport aux indices d’actions plus larges et affichent une performance décente. De façon plus générale, nous continuons de mettre l’accent sur les portefeuilles résilients - ceux qui sont bien diversifiés et qui comprennent parfois des stratégies de performance absolue (bien que toutes ne soient pas égales).
Obligations Européennes – Love Italy
La situation politique en Italie est difficile avec une coalition à gauche qui pourrait s’effondrer d’ici un an, mais ni l’extrême gauche ni la droite ne veulent quitter la zone euro et respectent le cadre défini par la zone euro. Il reste donc le problème du risque crédit sous-jacent. La croissance de l’économie italienne est beaucoup trop lente par rapport à l’augmentation de son niveau d’endettement, ce qui rend la dynamique de la dette insoutenable.
Pourtant, les Italiens épargnent beaucoup, comme en témoigne leur ratio de 2,6 % du compte courant par rapport au PIB. C’est également le cas pour l’ensemble de la zone euro. Une part importante de cette épargne sera investie dans des obligations où il sera possible d’obtenir un rendement et de la sécurité. Si on y ajoute le soutien de la BCE, on obtient un Carry Trade intéressant sur la courbe souveraine italienne ou BTP. Il existe d’autres façons d’exprimer cette opinion avec par exemple les obligations sécurisées et le crédit italien. Avec le temps, à mesure que la courbe souveraine s’aplatira davantage, l’économie finira par se redresser et le risque crédit diminuera, ce qui aidera les institutions financières et leur dette et soutiendra l’Italie. Ces positions peuvent être prises directement ou à travers des fonds exprimant cette position.
Privilégier le crédit européen au crédit américain
Les perspectives en matière de crédit sont plus attrayantes en Europe qu’aux États-Unis. Le ralentissement économique actuel souligne l’importance de l’analyse du bilan par les gérants actifs. En Europe, les primes de risque crédit sont à peu près conformes aux moyennes historiques, tandis que le niveau d’endettement n’est généralement pas excessif contrairement à certains segments du Haut rendement américain.
Mais il y a une disparité importante en Europe (par exemple, les CLO). Certaines entreprises sont particulièrement exposées au ralentissement économique. Les chocs sur les marchés émergents et le rythme rapide de la transformation technologique entraîneront le succès de certains titres défensifs tandis que d’autres disparaîtront. Cette réalité est beaucoup plus aiguë dans la zone euro, où la croissance est faible et devrait le rester, qu’aux États-Unis. Prenons l’exemple de la Deutsche Bank. Elle a réduit rapidement son bilan, certaines de ses activités et son personnel et espère qu’un budget informatique réduit suffira à couvrir les besoins de développement de l’entreprise. La course à l’informatique et à la transformation ne sera gagnée que par certaines entreprises, à savoir celles qui s’accrochent au bon wagon de croissance. UBS, par exemple, occupe une position dominante dans le secteur de la gestion privée et gère très bien cette branche, néanmoins son rendement n’est pas celui attendu par rapport au secteur dans lequel la société évolue. Aux États-Unis, les perspectives sont plus mixtes, avec des obligations de bonne qualité, chères mais attrayantes à mesure que la Réserve Fédérale se détend et que le levier se réduit sur les tranches les plus basses du Haut rendement. Le segment du haut rendement garde un certain attrait, mais avec prudence, car les craintes d’une récession pourraient revenir frapper de plein fouet ce secteur surendetté à l’effet de levier important.
Conclusion: La japonification et l’indécision sur les actions
En conclusion, nous continuons d’observer des opportunités dans l’univers obligataire et, dans certains cas, dans le crédit, en particulier dans la zone euro dans un contexte de japonisation. Dans un contexte de ralentissement économique, nous privilégions l’analyse bilancielle du risque de crédit effectuée par des gérants actifs. Pour les actions, l’incertitude sur la classe d’actifs nous incite à privilégier des fonds plus défensifs sur les thématiques de l’immobilier et les infrastructures cotées.
Remarque : Il s’agit d’une vue macroéconomique de NAM, non de la vue officielle de Nordea.