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La prédominance des Sept Magnifiques diminuera en 2024, ce qui se traduira par une réorientation plus large des marchés boursiers pour l’année à venir, prévoient les experts en actions. « Il ne sera plus question des Sept Magnifiques l’année prochaine. » Concernant d’autres thèmes, les avis sont partagés.

Une double question préoccupe actuellement les marchés : dans quelle mesure l’économie mondiale sera-t-elle touchée par les relèvements rapides des taux d’intérêt menés en 2023 par les banques centrales, et à quelle vitesse la Fed et la BCE vont-elles commencer à procéder à d’éventuelles réductions des taux ? D’une manière générale, les experts semblent s’accorder sur le fait que la récession aux États-Unis et en Europe sera légère. « Pour une récession profonde, il faut d’importants déséquilibres dans l’économie mondiale, mais ce n’est pas le cas », affirme Joost Van Leenders, stratège en investissement chez Van Lanschot Kempen.

Fortes baisses de taux

Le consensus estime que les banques centrales du monde entier vont abaisser leurs taux d’intérêt, ce qui pourrait atténuer l’impact des nombreux relèvements des taux sur l’économie mondiale. Selon les experts consultés, les États-Unis pourraient réduire leurs taux de 100 à 150 points de base. À la BCE, la baisse des taux pourrait être plus importante qu’à la Fed : une baisse allant jusqu’à 200 points de base a déjà été évoquée.

« Nous pensons que les baisses de taux de la Fed et de la BCE sont désormais intégrées de manière réaliste, voire quelque peu agressive par le marché », déclare Joost Van Leenders. Cela laisse peu de place à la politique monétaire pour apporter un soulagement supplémentaire. « Si les banques centrales réduisent les taux d’intérêt plus que que ce qu’on ne prévoit actuellement, cela s’accompagnera d’un refroidissement rapide de l’économie et d’une baisse des bénéfices des entreprises, auquel cas la baisse des taux d’intérêt pourrait s’accompagner d’une chute des marchés boursiers. »

Bénéfices sous pression

Les investisseurs semblent très optimistes dans leurs prévisions de bénéfices pour les entreprises en 2024. Le marché table actuellement sur une croissance des bénéfices d’environ 12 % pour les États-Unis, tandis que les prévisions pour les entreprises européennes se situent entre 7 et 8 %. « Nous pensons que les entreprises vendront moins, ce qui compliquera le maintien de leurs marges bénéficiaires », a déclaré Andrew Harvie, spécialiste des actions chez Columbia Threadneedle.
« Le fait que les entreprises aient pu augmenter leurs prix l’année dernière en réponse à l’inflation élevée a aidé, mais il semble que cette stratégie ait atteint ses limites », ajoute Siegfried Kok, gestionnaire de portefeuille chez Obam Investment Management. 

« L’année 2023 a été un excellent cru boursier : pas seulement du fait des valorisations, mais aussi de la croissance réelle des bénéfices », affirme Joost Van Leenders. « Il sera difficile de maintenir cette croissance des bénéfices au cours de l’année à venir, ce qui nous laisse penser que les actions vont traverser une période difficile. »

Joost Van Leenders n’exclut pas une chute des cours de 10 à 15 % par rapport aux niveaux actuels, avant qu’une reprise ne s’amorce au second semestre, alimentée notamment par la baisse des taux d’intérêt des banques centrales.

Fin de l’ère des Sept Magnifiques

Anna Stupnytska, économiste en chef chez Fidelity, pense que les entreprises technologiques pourraient bénéficier d’une politique monétaire plus souple de la part des banques centrales, mais que cet effet favorable ne sera pas significatif. « À moyen terme, les taux d’intérêt resteront structurellement élevés pendant une longue période. Les banques centrales doivent accepter que l’inflation reste supérieure à l’objectif de 2 % et que cela entraîne une hausse des taux d’intérêt. » Dans le cycle actuel, Fidelity prévoit que les taux d’intérêt américains se stabiliseront autour de 3 %, alors que la Fed vise actuellement 2,5 %. 

De nombreux experts pensent également que la prédominance des Sept Magnifiques va s’estomper et que les gains boursiers seront plus largement répartis. 

« L’optimisme sur les marchés boursiers de l’année dernière peut être attribué en grande partie aux Sept Magnifiques, mais la question est de savoir à quel point un marché aussi tendu est durable », déclare Andrew Harvie, de Columbia Threadneedle. « Au cours de la dernière décennie, nous n’avions jamais vu autant d’opportunités sur les marchés plus larges qu’aujourd’hui. Une période favorable s’annonce pour les sélectionneurs de titres actifs. »

Chez Obam, Siegfried Kok s’attend à ce que l’ère des Sept Magnifiques prenne fin : « Elles seront plutôt cinq. » Tesla a vu ses bénéfices fortement diminuer après le ralentissement significatif du marché des voitures électriques et, selon Siegfried Kok, la croissance est également terminée chez Apple. « Il n’y a plus guère d’innovation chez Apple et je ne vois pas non plus comment l’entreprise pourrait tirer profit de l’IA à court terme. »

Monétiser les opportunités de l’IA

L’essor marqué de l’intelligence artificielle a beaucoup profité aux valeurs technologiques l’année dernière, Nvidia faisant en particulier figure de gagnant évident. 

« Le battage autour de l’IA est passée, il est maintenant temps que les entreprises monétisent les opportunités offertes par cette dernière », déclare Andrew Harvie, de Columbia Threadneedle. Il est particulièrement impressionné par Microsoft et Amazon, qui, grâce au cloud computing, peuvent faciliter les possibilités offertes par l’IA.

Explosion des investissements

Les experts se positionnent de manière généralement plus défensive à l’approche de 2024 et privilégient des secteurs tels que la santé et l’énergie. Leur préférence va surtout aux entreprises de haute qualité, dotées d’un bilan solide et peu endettées.

Selon Andrew Harvie de Columbia Threadneedle, les entreprises ont également besoin d’une certaine capacité d’action pour relever les défis actuels du monde. Une forte augmentation des dépenses en capital, est selon lui nécessaire pour réussir la décarbonation, tandis qu’il faut également investir dans l’automatisation, le reshoring, le nearshoring et les chaînes d’approvisionnement. « Ces investissements vont créer une certaine pression sur les marges des entreprises dans tous les secteurs, mais celles qui saisiront ces opportunités d’investissement en tireront un bénéfice substantiel. »
Andrew Harvie est également positif sur les entreprises financières, en particulier les sociétés de paiement telles que Mastercard et Visa, soutenues en partie par les achats en ligne et le déclin des espèces en tant que moyen de paiement. 

Marchés émergents

Les banques traditionnelles des marchés développés n’intéressent pas particulièrement le spécialiste des actions, mais ce dernier voit des opportunités sur les marchés émergents et cite la banque indienne HDFC et la Bank Central Asia. « Ces banques ont une gouvernance conservatrice et sont soutenues par la croissance du PIB national. »

Plusieurs experts sont également positifs quant aux opportunités sur les pays émergents, principalement en raison des faibles valorisations. Le Japon, en particulier, est souvent mentionné. « La politique monétaire du pays est loin d’être un frein pour l’économie, affirme Joost Van Leenders. Nous ne nous attendons pas à un refroidissement de l’économie japonaise. » 

Les entreprises japonaises deviennent également de plus en plus accueillantes envers les actionnaires, note Andrew Harvie. Chez Obam, Siegfried Kok met en garde contre la forte exposition des entreprises japonaises à la Chine, que les experts ne voient pas d’un très bon œil. « La situation dans ce pays est incertaine, même si l’économie semble se stabiliser », déclare Anna Stupnytska de Fidelity.

Ces perspectives 2024 sont les deuxièmes d’une série de quatre, publiée par Investment Officer. Jeudi 14 décembre, les responsables des investissements des trois plus importants gestionnaires de fortune européens avaient présenté leur vision respective. Cette semaine, nous passerons aussi en revue les attentes en matière d’obligations et de marchés privés.

Outre les parties nommées, Anthos a également contribué à cet article. 

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