Il y a quinze jours, la Commission européenne a présenté le Plan Climat, qui vise à réduire les émissions de CO2 de 55 % d’ici 2030. Pour les gestionnaires d’actifs, cela entraîne des conséquences majeures en matière de politique d’investissement et de construction de portefeuille. Nous avons interrogé trois grandes banques en Belgique sur les plus grands défis auxquels elles sont confrontées. Chez BNP Paribas, on souhaite proposer des mandats discrétionnaires et des services de conseil à faibles émissions carbone en plus de l’offre durable.
La rédaction d’Investment Officer a posé trois questions sur le Plan Climat aux personnes qui occupent les postes clés au sein des banques en matière de services d’investissement, de durabilité et de portefeuilles clients.
Ces trois personnes sont Guy Janssens chez BNP Paribas Fortis, Sebastiaan Grenné chez Argenta et Thierry Masset chez ING Belgique.
Le plan climatique présenté le 14 juillet par le commissaire européen Frans Timmermans vise à faire de l’Europe le premier continent à devenir « climatiquement neutre » d’ici 2050. La réalisation de ces objectifs, au sujet desquels, soit dit en passant, on s’attend à de nombreux combats avec les États membres et les lobbyistes, pourrait entraîner des conséquences majeures pour de nombreuses sociétés cotées en bourse qui ont inclus les banques susmentionnées dans leurs portefeuilles de clients.
Il s’agit d’une série en trois épisodes et nous commençons avec Guy Janssens (photo) de BNP Paribas Fortis.
Que signifie concrètement, pour la politique d’investissement, l’objectif de la Commission européenne d’atteindre une réduction de 50 % des émissions de CO2 en Europe d’ici 2030 ?
Guy Janssens : « La finance joue un rôle essentiel dans la réduction des émissions de CO2. Elle fait partie de l’engagement de BNP Paribas en faveur d’un avenir meilleur et d’un secteur financier durable. L’objectif est de permettre à nos clients de passer à une économie à faibles émissions carbone tout en respectant l’environnement.
Dans ce contexte, BNP Paribas Fortis suit le développement de produits et de services qui répondent spécifiquement aux enjeux du changement climatique et des émissions de CO2.
Nous avons déjà inclus plusieurs produits à faible empreinte carbone dans notre gamme et l’un des rares fonds neutres en carbone disponibles pour la distribution aux clients particuliers, et nous travaillons avec des fabricants de produits pour promouvoir le développement de gammes de produits à faible empreinte carbone et neutres en CO2, ainsi que des solutions alignées sur les objectifs de température de l’Accord de Paris sur le climat.
Nous avons également élaboré un plan visant à intégrer le changement climatique dans tous les aspects de nos services, en plus de l’intégration progressive des critères d’émissions de CO2 dans la taxonomie de l’UE.
Cela devrait accélérer la «décarbonisation» des produits et services d’investissement et avoir un impact important sur les émissions de CO2, les activités d’investissement contribuant de manière significative à la réalisation des objectifs de la Commission européenne. »
Quels risques sont associés à une telle politique appliquée par les législateurs lorsqu’il s’agit des portefeuilles de vos clients et que faites-vous concrètement pour atténuer ces risques (de transition) pour vos clients ?
Guy Janssens : « Le principal risque pour les clients est la baisse des rendements en cas de forte hausse des prix de l’énergie et des matières premières. Les secteurs de l’énergie et des matériaux, malgré certains progrès durables, contribuent encore beaucoup aux émissions de CO2. Par conséquent, ils sont sous-pondérés ou exclus de nos investissements durables.
Cela signifie que les investissements verts ne bénéficieront pas d’une certaine protection contre une éventuelle flambée de l’inflation alimentée par la hausse des prix de l’énergie ou des matières premières. Heureusement, la corrélation positive croissante entre la hausse des prix de l’énergie et la performance des fonds d’énergie verte compensera cette situation. En outre, nous avons récemment augmenté d’autres secteurs de valeur tels que les finances et l’industrie dans nos portefeuilles. Un bon équilibre entre les actions de croissance et les actions de valeur permettra d’obtenir des rendements optimaux. »
Les données ESG actuelles sont-elles suffisantes pour soutenir la transition énergétique ?
« La disponibilité des données ESG s’améliore très rapidement. Les fournisseurs de données, grands et petits, proposent des solutions plus complètes, notamment dans les domaines du changement climatique et du carbone. Outre les données, divers services sont disponibles pour mesurer l’empreinte carbone des portefeuilles d’investissement et la faire correspondre à l’accord de Paris ou aux objectifs de température.
Les données varient encore quelque peu d’un producteur à l’autre, mais le secteur s’améliore rapidement, tandis que l’intégration des indicateurs de CO2 dans la taxonomie européenne crée une forte dynamique en faveur de données plus solides et d’une couverture plus large. Ce n’est pas encore parfait, mais c’est très encourageant. »
Quel sera l’impact de la transition énergétique sur votre offre ?
« Nous ajoutons des produits et des solutions à faibles émissions de CO2 et neutres en carbone à notre offre à mesure que de nouveaux produits, données et technologies deviennent disponibles. Les clients peuvent déjà nous dire qu’ils préfèrent les solutions à faibles émissions de CO2 et nous veillerons à leur présenter des solutions pertinentes qui correspondent à leur profil financier.
Dans un avenir proche, nous proposerons des mandats discrétionnaires et des services de conseil à faibles émissions de CO2, en plus de nos offres durables actuelles.
À mesure que le secteur mûrit et que les clients prennent conscience de la possibilité de réduire l’empreinte carbone des solutions financières, les produits et services d’investissement à faibles émissions de CO2 pourraient devenir la norme et des options standard d’ici quelques années. »