Jeremy Cunningham
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Pour Jeremy Cunningham, directeur des investissements à revenu fixe chez Capital Group, il est clair qu’après des années de taux d’intérêt négatifs, les investisseurs obligataires vivent aujourd’hui dans un monde nouveau. Selon lui, le moment est venu de profiter progressivement des rendements élevés d’émetteurs de haute qualité pendant de plus longues périodes.

Jeremy Cunningham part du principe que les taux d’intérêt resteront élevés pendant une longue période, alors que le marché se montre aujourd’hui légèrement trop optimiste en estimant que les banques centrales ne tarderont pas à changer à nouveau leur fusil d’épaule.

« Aux États-Unis, le pic des taux d’intérêt durera plus longtemps que ce que prévoit le marché, en raison de la résilience de l’économie et de la persistance de la pression inflationniste. Le marché du travail est également très robuste. » Cependant, Jeremy Cunningham estime que la forte hausse des taux d’intérêt ne s’est pas encore réellement répercutée. « Les consommateurs vont commencer à la ressentir, mais cela prendra un certain temps. Nous prévoyons également que la croissance des salaires ralentira progressivement, ce qui commencera à réduire la pression sur l’inflation. Cependant, il ne faut pas s’attendre à un recul spectaculaire de l’inflation, il ne s’agira pas d’une belle descente linéaire. »

Jeremy Cunningham souligne que la Fed veut s’assurer que l’inflation revienne à un niveau acceptable avant de réduire à nouveau les taux d’intérêt. « Nous tablons sur un atterrissage en douceur aux États-Unis. En revanche, le secteur bancaire américain reste faible : une grande partie de l’épargne a été transférée des banques régionales vers les grandes banques. »

Il estime également qu’il ne faudra pas compter sur le soutien de l’économie chinoise, qui suscitait encore beaucoup d’optimisme fin 2022. « La pandémie a vraiment eu un impact considérable en Chine, ce qui a entraîné une baisse de la confiance des consommateurs et incité ces derniers à économiser. Il ne serait donc pas surprenant que la déflation se profile à l’horizon. Dans le même temps, le marché de l’immobilier ne se porte pas bien non plus. »

Il estime donc que l’économie mondiale va stagner, et l’Europe en subira également les conséquences. « La hausse des prix du pétrole contribue en outre à maintenir l’inflation élevée et la BCE n’aura d’autre choix que de maintenir plus longtemps les taux d’intérêt à un niveau élevé. La Banque centrale européenne se trouve dans une situation difficile, car l’économie ne se porte pas particulièrement bien en ce moment. »

Perspectives des marchés obligataires 

Selon le spécialiste de Capital Group, la valorisation moyenne des marchés obligataires est historiquement attrayante pour le moment. Cependant, il souligne d’emblée que les rendements élevés tels que ceux que nous connaissons actuellement ne durent jamais très longtemps.

« Le défi pour les investisseurs consiste aujourd’hui à savoir comment tirer parti de ces valorisations de manière prudente. Selon nous, la base du portefeuille doit être composée de titres de haute qualité, avec des obligations ‘ investment grade ’ et de la dette des marchés émergents. De nombreux pays de cet univers affichent actuellement des fondamentaux solides et génèrent néanmoins un rendement supplémentaire. C’est pourquoi la duration est indiscutablement votre alliée actuellement. Vous en avez besoin parce qu’elle offrira une couverture naturelle du risque de crédit dans votre portefeuille. » Ce qui selon lui est d’autant plus remarquable que ces dernières années, tout le monde voulait réduire sa duration.

Il ajoute également que les investisseurs doivent être conscients du fait qu’ils ne pourront jamais entrer sur le marché au moment idéal. « Par conséquent, construire progressivement et prudemment sa position nous semble constituer la meilleure approche. C’est ce que nous conseillons à nos clients. Il ne faut pas oublier que c’est dans les six mois précédant le pic des taux de la Fed et les six mois suivant que les bénéfices les plus importants sont généralement réalisés. »

Actuellement, il y a énormément d’argent en liquidités et autres actifs liquides. « De nombreux clients me disent qu’ils détiennent beaucoup de liquidités et obtiennent des rendements de 5 à 6 % tout en dormant sur leurs deux oreilles. Mais que feront-ils dans un an, lorsque les taux d’intérêt auront baissé ? En effet, le marché est extrêmement rapide pour anticiper un revirement de la politique monétaire. »

Quatre objectifs

Quel rôle doit donc jouer la composante obligataire dans le portefeuille global ? « Elle en a en fait quatre objectifs : la protection contre l’inflation, la préservation du capital, la diversification des actions et la génération de revenus. Pour atteindre ces objectifs, différents segments obligataires, comme le haut rendement, peuvent être utilisés. Si vous optez pour la génération de revenus, par exemple, il est absurde de constituer un portefeuille qui remplit ce rôle une année et pas la suivante. Vous devez alors composer un portefeuille à même de tirer ces revenus de sources très diversifiées. »

Aujourd’hui, la plupart des clients se concentrent sur la génération de revenus. « Pour ce faire, nous nous intéressons surtout à la dette des pays émergents, principalement en monnaie locale. Les valorisations dans cette partie de l’univers sont extrêmement attrayantes. De plus, la perspective d’un léger affaiblissement du dollar pourrait constituer un puissant vent favorable. Les obligations d’entreprises investment grade mondiales sont également très prisées, ce qui n’est pas surprenant car ces entreprises de grande qualité offrent des rendements rarement vus au cours des dernières décennies. Ce qui est intéressant, c’est la duration longue de 6,5 ans en moyenne, alors que le rendement moyen s’élève à 6 ou 6,5 %. Cette partie du portefeuille restera très solide même en cas de ralentissement économique plus marqué. »

Selon Jeremy Cunningham, même si ce rôle doit encore être rempli par une partie du portefeuille, la protection contre l’inflation est devenue moins importante qu’il y a un an. « Le marché table clairement sur le fait que l’inflation sera plus faible au cours des 12 à 18 prochains mois, mais cela ne se produira pas nécessairement de manière linéaire. Cette vision comporte bien entendu un risque, notamment en raison de la hausse des prix du pétrole et de certaines matières premières. La démondialisation a également un effet inflationniste, par exemple. »

Que répond-il aux clients qui avaient compté sur une de ces quatre fonctions pour 2022, une année extrêmement mauvaise pour les obligations ? « Les produits à revenu fixe n’ont pas pu remplir leur rôle traditionnel. De nombreux investisseurs ont été extrêmement déçus par la composante obligataire de leur portefeuille. Cela se produit peut-être une fois tous les 50 ans, généralement à la suite d’un choc inflationniste inattendu. Le fait que cela se produise si rarement est en soi suffisamment rassurant aujourd’hui. De plus, rares sont ceux qui s’attendent à ce que l’inflation fasse un nouveau bond significatif. L’inflation pourrait être persistante, mais un choc nous semble peu probable. »

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