Credal lance un produit destiné aux institutionnels et aux particuliers fortunés, en vue de rentrer dans le capital de projets avec un impact sociétal important. La coopérative spécialisée ambitionne d’investir chaque année dans une grosse dizaine de projets au travers de Change.
Credal est un acteur reconnu du financement citoyen en Belgique. Créé en 1984, ce groupe rassemble aujourd’hui 4.000 coopérateurs, et offre une alternative aux personnes ou aux (petites) entreprises exclues des financements bancaires classiques en offrant une gamme de produits qui va de microcrédits de 500 euros jusqu’à des financements de plusieurs centaines de milliers d’euros. Credal emploie une cinquantaine de personnes avec des fonds propres de 43 millions d’euros.
Fonds solidaire
Depuis mai 2019, le groupe a ajouté une corde à son arc avec le lancement de Change, un fonds qui vise à investir dans le capital de sociétés ayant un impact positif, et à les accompagner dans leur développement. « Typiquement, nous visons des entreprises actives dans la transition énergétique, dans l’alimentation durable, dans la mise en place d’une économie circulaire et dans l’inclusion sociale ». indique Philippe Herbiet (Coordinateur du projet).
« En outre, l’affectation des bénéfices doit viser prioritairement la croissance de l’entreprise plutôt que la rémunération des actionnaires ». Dans ce cadre, les trois personnes derrière le projet vont typiquement rechercher des sociétés qui se sont lancées sur leurs fonds propres, et qui sont encore trop petites pour intéresser vraiment les acteurs bancaires classiques (entre 100.000 et 400.000 euros). « Ces entrepreneurs ont souvent un problème d’accès au capital ».
Projets
Anne-Laure Rase (Business et Impact Analyst chez Change) souligne que la disponibilité des projets ne fait pas vraiment défaut. « Nous sommes un acteur relativement connu dans le domaine des financements alternatifs (notamment au travers du réseau Solifin), et nous participons à beaucoup d’événements à l’occasion desquels nous sommes mis en contact avec des entrepreneurs. Les dossiers ont donc tendance aujourd’hui à venir naturellement à nous ».
Les projets sélectionnés seront souvent des co-investissements avec d’autres acteurs de la finance sociétale. « Il y a plus de collaboration que de compétition sur le marché belge, notamment en vue de partager les risques et pouvoir financer des levées de fonds complémentaires ». Anne-Laure Rase souligne que Change dispose aujourd’hui d’une cinquantaine de projets dans le pipeline, dont dix ont été considérés comme éligibles, et quatre dans lesquels un investissement a déjà été décidé. Parmi les premiers projets soutenus, nous pouvons citer Waio (plate-forme de vente en ligne pour des produits durables) ou Ethiquable (commerce équitable rassemblant 120 produits de 40 coopératives).
Recherche d’investisseurs
« Il faut être certain que le projet soit mûr, avec un objectif de rentabilité raisonnable et un accompagnement qui sera apporté dans le développement du projet. Le premier critère de sélection reste toutefois l’impact sociétal ». Elle souligne également que les projets trouvent souvent leur origine dans une génération d’entrepreneurs relativement jeunes (moins de 40 ans), qui cherchent à créer du sens, avec des salaires très raisonnables et une attention à la bonne gouvernance.
Change vise à financer entre 10 et 15 projets par an (pour environ 2 millions d’euros) dans une gamme diversifiée, avec une rentabilité attendue autour de 2% et une cible qui le réserve à des institutionnels (fonds de pension, etc) ou des particuliers fortunés. « Nous avons des projets dans le pipeline, et le défi est aujourd’hui de trouver des investisseurs afin de les financer ». La recherche d’impact par de nombreux intervenants sur les marchés financiers constitue un argument pour la réussite du projet.
Illiquide
Initialement orienté sur le marché belge, Philippe Herbiet n’exclut pas que le fonds investisse à terme dans les pays voisins si les opportunités se présentent. La durée d’investissement tourne au minimum autour de cinq à six ans, car la liquidité ne pourra être assurée que lorsqu’un projet sortira du portefeuille. « Lorsqu’une vente sera réalisée, les actionnaires auront l’opportunité de choisir entre une sortie et un réinvestissement. Dans l’intervalle, il faut être certain de ne pas avoir besoin de ces fonds ».