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Fortino Capital est un fonds d’investissement fondé par des top managers. Le Managing Partner Duco Sickinghe a été CEO de Telenet, Renaat Berckmoes a été CFO de l’acteur télécom et Baudouin Jolly est un vétéran des start-up. Aujourd’hui, ils investissent dans des entreprises B2B de logiciels basés sur le cloud, tant en phase de démarrage qu’en phase de croissance, une niche où l’expérience des télécommunications s’avère étonnamment utile. En limitant les risques, ils parviennent maintenant à obtenir de bons rendements et à éloigner la concurrence.

Pourquoi êtes-vous passés du statut de manager à celui d’investisseur ?

Sickinghe : « Après leur carrière de management, les top managers deviennent souvent consultants ou membres indépendants de conseils d’administration. Mais cette perspective ne nous tentait pas. Nous voulions rester impliqués dans les dernières innovations du monde de la technologie. Nous avons donc commencé à investir de l’argent dans des entrepreneurs prometteurs, car c’est ce qui permet d’entretenir une relation durable avec eux. Nous avons d’abord investi dans des petites entreprises, ce qui relève généralement du capital-risque. Mais au fil du temps, de plus grandes opportunités se sont aussi offertes à nous. C’est pourquoi nous avons récemment créé un deuxième fonds, plus important. Mais quel que soit le stade de l’entreprise, nous investissons toujours dans des logiciels basés sur le cloud. »

Pourquoi cette focalisation sur les logiciels basés sur le cloud ?

Sickinghe : « Nous venons de l’industrie du câble, où le business model des abonnements existe également. Le business model du monde du logiciel est aujourd’hui comparable. C’est aussi un secteur qui connaît une croissance énorme. Cette combinaison en fait un choix attrayant. »

Que recherchez-vous dans une entreprise ?

Sickinghe : « Pour le capital-risque, nous recherchons des entreprises affichant un chiffre d’affaires d’environ 1 million d’euros et présentant une adéquation produit-marché. Nous ne faisons donc pas d’angel investing. Pour le capital de croissance, nous regardons plutôt des éléments tels que la rentabilité et le potentiel de transformation. Nous nous intéressons aussi énormément à l’équipe et donc, à des éléments tels que la vision et la culture. L’entreprise doit être capable de s’attacher des talents, car si elle n’y parvient pas, elle n’avancera pas. La culture est pour nous vraiment centrale. »

La Belgique dispose-t-elle de suffisamment de talents entrepreneuriaux ?

Sickinghe : « Il n’y a jamais assez de talents (rires) ! Néanmoins, il y a de plus en plus d’entrepreneurs ‘fit for service’ pour recevoir des investissements. Il y a également de plus en plus de projets numériques. Nous constatons donc un développement très sain sur le marché, ce qui attire à son tour plus d’argent. »

Pouvez-vous donner quelques exemples de votre portefeuille ?

Sickinghe : « Il y a Oqton, une start-up gantoise qui fabrique une sorte de Microsoft Windows pour les usines. Dans une usine, vous avez souvent un grand nombre de machines différentes, qui fonctionnent toutes avec des logiciels différents. Oqton fabrique un logiciel qui fonctionne comme une couche supérieure, qui permet aux machines d’être contrôlées et de communiquer entre elles. Nous avons investi dans cette entreprise, mais nous allons vendre notre participation dans un proche avenir car une belle opportunité se présente. La dernière entreprise dans laquelle nous avons investi avec notre fonds de croissance est Cenosco, de La Haye. Ils fabriquent des logiciels grâce auxquels les raffineries remplacent leurs pièces à temps. Dans une grande raffinerie, on parle en effet de dizaines de milliers de pièces, et leur logiciel permet de garantir que les entreprises qui se trouvent derrière sont toujours en conformité avec la loi. »

Qu’en est-il des sorties et du rendement ?

Sickinghe : « Oqton est une sortie dont j’ai déjà parlé. En 2019, nous avons également vendu PieSync à la société américaine HubSpot. Nous en sommes maintenant à des rendements à deux chiffres pour notre fonds de capital-risque, d’environ 20 % par an. Le fonds de croissance, par contre, n’existe pas depuis suffisamment longtemps pour qu’on puisse déjà voir des rendements. On attire souvent l’attention sur les risques du capital-risque, mais dans notre cas, ils sont restés relativement limités. Le capital que nous avons dû amortir dans notre premier fonds est inférieur à 10 %, ce qui est assez bas pour du capital-risque. Un bon contrôle des risques nous permet de maintenir les rendements du fonds à un niveau élevé. On peut protéger le downside en étant très attentif à ce qui arrive à ses entreprises. »

La concurrence augmente-t-elle dans votre domaine, et comment y faites-vous face ?

Sickinghe : « Il y a beaucoup plus d’acteurs qu’il y a dix ans, mais ce n’est pas comme si on rencontrait constamment tout le monde. Néanmoins, la concurrence s’intensifie. Nous nous distinguons sur ce marché par le fait que notre fonds est composé d’un grand nombre d’ex-managers. Nos collaborateurs s’adressent aux entreprises en tant que managers, et non en tant qu’investisseurs. C’est notre valeur ajoutée : nous avons des collaborateurs pour lesquels la tarification, la vente, le marketing, le développement et la stratégie des logiciels n’ont aucun secret. Tout ça, nous l’avons déjà fait dans le passé. »

Y aura-t-il davantage de pression de la part des capital-risqueurs américains ?

Sickinghe : « Les Américains sont souvent les acheteurs de nos entreprises. Ils ne sont pas tant des concurrents que de bons clients. Ils se trouvent souvent à des stades plus tardifs que nous. »

Quelles tendances surveillez-vous ?

Sickinghe : « L’industrie du logiciel va connaître une énorme consolidation dans les années à venir, et nous voulons en tirer parti. Nous pouvons acheter plusieurs entreprises, puis les intégrer pour en faire une seule grande entreprise. Une activité qui tient donc davantage du capital-investissement que du capital-risque. »

Comment se présente l’avenir ?

Sickinghe : « Nous avons actuellement trois ambitions. Nous voulons continuer à investir dans les petites entreprises, avec des tickets compris entre 10 et 45 millions d’euros. La deuxième ambition est de continuer à nous concentrer sur le Benelux. Et la troisième est de poursuivre la croissance en France et en Allemagne. »

Éléments clés de Fortino Capital

  • Fortino Capital a vu le jour en 2013.
  • Le fonds d’investissement a été fondé par Duco Sickinghe (ex-Telenet et Software Direct), Renaat Berckmoes (ex-Telenet et FPIM-SFPI) et Baudouin Jolly (ex-EarlyTracks et Spreds).
  • Fortino Capital compte 425 millions d’euros d’actifs sous gestion, répartis entre un fonds de capital-risque et un fonds de croissance.
  • Le fonds de capital-risque vise des investissements d’environ 1,5 million d’euros, tandis que le fonds de croissance s’adresse à des montants d’environ 5 millions d’euros.
  • Fortino Capital se concentre sur la région du Benelux, mais porte maintenant davantage d’attention sur l’Allemagne et la France.
     
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