L’Argentine se prépare pour les élections présidentielles. La surprise des dernières élections intermédiaires a entraîné une chute drastique des prix des actifs dans le pays. La devise locale et les cours des actions ont chuté et les taux d’intérêt sur les obligations d’État ont augmenté de façon spectaculaire. L’Argentine étant un très petit marché en soi, le risque de contagion à d’autres pays d’Amérique latine était relativement faible, explique Gino Delaere, spécialiste des marchés émergents chez Econopolis à Singapour, à Investment Officer.
Victoire surprenante d’Alberto Fernández
Les résultats des élections ont choqué les marchés parce qu’Alberto Fernández, le candidat de l’opposition de centre-gauche, a battu le président pro-business Mauricio Macri avec une marge étonnamment importante. Fernández a obtenu 47,4% des voix, contre 32,3% pour Macri. « Ceci jette bien entendu de sérieux doutes sur les chances de Macri d’être réélu pour un second mandat lors des élections d’octobre prochain. Fernández est maintenant considéré comme le favori et son partenaire dans la campagne électorale est l’ancienne présidente Cristina Fernández de Kirchner, dont le gouvernement était connu pour son haut niveau de protectionnisme, sa forte intervention de l’État dans l’économie et son recours excessif à la planche à billets. Cela a finalement mené à la faillite de l’Argentine en 2014, suite à quoi les créanciers étrangers n’ont plus été remboursés », explique Delaere.
La forte inflation et l’austérité exigent leur tribut en Argentine
L’électorat argentin a clairement puni le gouvernement actuel en raison de la situation économique fragile, de l’inflation élevée et des mesures d’austérité prises par le gouvernement Macri.
Delaere : « Actuellement, l’économie est en récession, le chômage augmente et l’inflation monte en flèche. Auparavant, le FMI avait accordé à Macri un prêt de 56 milliards de dollars en échange d’une politique financière plus disciplinée. Compte tenu des résultats inattendus des élections, des questions majeures se posent quant à la politique future de la prochaine administration. »
Crainte d’une dette publique impayée
Bien que Fernández soit considéré comme un populiste plus modéré, on s’attend à ce qu’il suspende au moins une partie de la politique favorable au marché du gouvernement actuel. Delaere : « Il pourrait également tenter de réviser l’accord avec le FMI et d’introduire de nouvelles subventions économiques. Cependant, la plus grande crainte des investisseurs est que sous la direction de Fernández, l’Argentine ne rembourse plus ses dettes, même si elle a annoncé dans l’intervalle qu’elle n’en avait pas l’intention. »
Comment Fernández va-t-il gérer les déficits structurels ?
La préoccupation la plus urgente est le niveau élevé de la dette de l’Argentine et la persistance de ses besoins de financement. Il est donc essentiel de continuer à mettre l’accent sur les réformes afin de rétablir la confiance des investisseurs et du FMI, sans quoi l’Argentine pourrait entrer rapidement dans une crise de liquidité lorsque les investisseurs ne seront plus disposés à s’endetter à court terme.
« Les déficits structurels du pays, l’incapacité à générer suffisamment de dollars pour défendre le peso local ainsi que les réserves relativement limitées sont d’énormes problèmes. La façon dont Fernández relèvera ces défis s’il remporte les prochaines élections est donc extrêmement importante pour la croissance et les perspectives économiques du pays », déclare Delaere.