Je pense que nous ne sommes pas loin du pic d’inflation et que nous l’avons peut-être déjà atteint», a déclaré Erik Joly, économiste en chef chez ABN AMRO Belgique. Par conséquent, les actions américaines sont légèrement surpondérées.
Selon Joly, la Fed a réagi trop tard à la hausse de l’inflation. Comme beaucoup, y compris nous-mêmes, ils ont probablement pensé que l’inflation ne décollerait jamais comme ça. Mais il estime que la réponse est désormais décisive. D’après nos estimations, il y aura encore deux hausses de taux d’intérêt cette année. Nous serons alors bloqués autour d’un niveau d’environ 4,50 % d’ici la fin de l’année». En fonction de la situation macroéconomique, une ou plusieurs augmentations suivront ensuite en 2023.
Selon M. Joly, les mesures prises par la Fed commencent à produire leurs effets. Il y a certainement un certain nombre d’indicateurs qui indiquent un ralentissement de l’économie. Il fait tout d’abord référence au refroidissement du marché immobilier américain. La forte hausse des taux hypothécaires pèse lourdement sur celle-ci, et le nombre de permis de construire est également en baisse. Cette tendance est irréversible, le marché de l’immobilier se refroidit. Deuxièmement, les dépenses de consommation des ménages commencent à diminuer. Le chômage est encore faible, à 3 %, mais nous nous attendons à ce qu’il atteigne 5 % l’année prochaine. Troisièmement, les prêts aux entreprises sont en baisse et les investissements dans le secteur manufacturier sont moins nombreux.
L’inflation pourrait continuer à augmenter pendant un certain temps, selon M. Joly, mais les facteurs cités la ralentiront. Je pense donc que nous ne sommes pas loin du pic d’inflation et que nous l’avons peut-être déjà atteint. Compte tenu de tous ces facteurs, il estime qu’il est possible que les taux d’intérêt soient abaissés à partir du second semestre de 2023. Ce faisant, il n’exclut pas la possibilité de réduire de 100 points de base à ce moment-là.
L’Amérique d’abord
En termes d’allocation d’actifs, la banque est sous-pondérée en actions et légèrement surpondérée en obligations. Le cash, quant à lui, reste surpondéré. Au niveau régional, nous sommes légèrement surpondérés en actions américaines et légèrement sous-pondérés en actions de la zone euro». Cela s’explique en partie par le fait que les États-Unis disposent de leurs propres ressources énergétiques et d’un marché du travail très flexible. De plus, les indices boursiers américains contiennent de nombreuses actions liées aux données, le nouvel or. L’Europe est à la traîne à cet égard».
En Europe, la situation est beaucoup plus problématique», estime M. Joly. Il souligne, entre autres, la rigidité du marché du travail et l’énorme désavantage concurrentiel causé par la hausse du prix de l’énergie. En outre, il n’y a pas d’unité de commandement politique dans la zone euro, ce qui rend difficile la prise de mesures. En conséquence, la BCE est dans l’embarras et n’a d’autre choix que de relever les taux d’intérêt. L’Europe est aux prises avec une inflation massive et se dirige vers une récession brutale. Aux États-Unis, nous supposons une légère récession», a déclaré M. Joly.
Sur les marchés émergents, la préférence va aux actions chinoises, qui se négocient à un prix relativement bas, à 12 fois les bénéfices. Pourtant, la Chine est également confrontée à des vents contraires. Le chômage des jeunes dans les zones urbanisées se rapproche de 20 %. Cela pourrait éventuellement mettre des bâtons dans les roues.
De nombreux jeunes diplômés préfèrent travailler pour l’État ou dans des entreprises publiques. Cela peut entraîner une baisse de la productivité. La répression des entreprises technologiques peut également être problématique et étouffer l’esprit d’entreprise privé». Ensuite, les inquiétudes concernant le marché de l’immobilier persistent. Enfin, les politiques de type «zéro covide» peuvent conduire à une économie de type «stop and go». Néanmoins, nous voyons des opportunités pour les investisseurs dans la région. Notre préférence va à la Chine», conclut M. Joly.
Les obligations commencent à retrouver leur place dans les portefeuilles bien diversifiés. Selon le moment, nous incluons à la fois des obligations de base et des obligations périphériques. Il nous arrive déjà d’oser inclure de la dette italienne dans le portefeuille si les spreads avec le papier allemand s’élargissent trop.” Ce faisant, la préférence va aux obligations à court terme, principalement en euros. Nous n’achetons pas d’obligations indexées sur l’inflation pour le moment, car nous pensons qu’il y a déjà beaucoup trop d’inflation dans les prix.
Construire avec précaution
M. Joly estime que les investisseurs doivent particulièrement surveiller les évolutions aux États-Unis. Parce que, comme c’est souvent le cas, les marchés américains continuent de signaler des ordres de marche. Pour l’instant, nous commençons prudemment à renforcer nos positions en actions. Dans l’ensemble, bien que nous soyons toujours sous-pondérés en actions, nous le sommes moins qu’il y a quelques semaines», déclare M. Joly.