Euro
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Le président Biden et Olaf Scholz, le nouveau chancelier allemand, ne sont pas sur la même longueur d’onde concernant Nordstream 2. Biden menace qu’aucun gaz naturel ne passera par le gazoduc si la Russie envahit l’Ukraine. Mais pour l’Allemagne, Moscou est beaucoup plus proche et M. Scholz se rendra compte que 40 % de tout le gaz naturel en Europe provient de Russie.

Contrairement aux Pays-Bas, l’Allemagne passe effectivement des chaudières au lignite et au fioul au gaz naturel. Pendant ce temps à Moscou, Macron tente de désamorcer la question, ne serait-ce que pour les prochaines élections françaises. En mars, alors que tous les regards sont tournés vers la Russie et l’Ukraine, le danger pour l’Europe vient d’un autre endroit. Mme Lagarde a indiqué qu’elle aussi ne considère plus l’inflation comme un phénomène temporaire. Il est même question de relever les taux d’intérêt cette année. Pour rendre une telle chose possible, il faudra d’abord arrêter le programme d’achat. 

C’est pourquoi les taux d’intérêt augmentent actuellement en Europe. La hausse des taux d’intérêt n’est pas le problème en soi. En Europe, le problème réside principalement dans la divergence des taux d’intérêt entre les différents pays de la zone euro. La politique de rachat de la BCE garantit implicitement que les taux d’intérêt en Europe ne divergent pas trop. Il ne s’agit pas d’une politique officielle, mais simplement du résultat du discours » whatever it takes » de Draghi en 2012. À l’époque, c’était le seul moyen de désamorcer la crise de la dette européenne. Un banquier central dispose tout simplement d’un arsenal illimité.

Les PIIGS sont de retour aux affaires

Lorsque le marché est convaincu que cet arsenal illimité sera utilisé, le marché fait le travail pour la banque centrale. À un moment où les taux d’intérêt doivent être abaissés et l’économie stimulée, la politique implicite (comme la promesse de Draghi) et la politique réelle sont alignées. Mais maintenant que Lagarde oriente la politique monétaire dans la direction opposée, des frictions entre la politique réelle et la promesse antérieure apparaissent. C’est le moment pour le marché de tester cette promesse. Les écarts entre les taux d’intérêt allemands et ceux de la zone euro, plus faibles, se creusent. Les PIIGS sont de retour. 

La seule chose qui s’est améliorée en Italie depuis 2012 est le fait que Mario Draghi soit devenu Premier ministre italien. La dette publique italienne, exprimée en pourcentage du PIB, est passée de 120 % à 160 % au cours des dix dernières années, sans que le potentiel de croissance de l’économie italienne ne s’améliore. En Grèce, la dette dépasse désormais 200 % du PIB. La France est maintenant au même niveau que l’Italie en 2012 et semble être à une seule récession de la situation italienne.

La promesse de Draghi est en jeu

La BCE est en mesure d’intervenir si le marché s’emballe, mais il reste à voir si les États membres du Nord seraient à l’aise avec une telle décision. Le problème en 2012 était un problème collectif européen où les dettes élevées ont conduit à une collatéralisation croisée des banques européennes, ce qui a entraîné une faible croissance économique. Le problème de l’inflation ne peut être résolu par la baisse des taux d’intérêt (sauf en Turquie) et l’achat d’obligations. Avec les hausses de taux d’intérêt de la BCE, la promesse de Draghi risque de disparaître.

Aujourd’hui, le gouvernement allemand de gauche est, si possible, encore plus pro-européen que le gouvernement précédent, mais l’aversion pour l’inflation est profonde chez les Allemands. L’hyperinflation pendant la République de Weimar n’a fait qu’apporter l’instabilité politique et la radicalisation en Allemagne. En 1914, 1 dollar était encore égal à 4,20 marks. Dans les années qui suivent, la monnaie allemande perd rapidement de sa valeur.

En 1923, c’est le coup de grâce. Après un conflit sur le non-paiement des réparations, 100 000 soldats français occupent la région de la Ruhr. Cela paralyse le cœur de l’industrie allemande et l’économie s’effondre. Au plus fort de la crise, en novembre de cette année-là, 1 dollar valait 4,2 trillions de marks. Grâce aux travaux de Marx, la gauche sait aussi que l’inflation peut détruire la cohésion sociale et que ce sont surtout les membres les plus faibles de la société qui sont touchés.

En outre, il convient de noter que la montée des nationaux-socialistes a commencé avec l’hyperinflation de 1923. Chaque mois, les chiffres de l’inflation allemande sont encore expliqués en détail à la télévision allemande ; en Italie, il faut utiliser une loupe pour les trouver dans la section financière. La Bundesbank, en tant que gardienne du mark allemand, a toujours un statut presque mythologique en Allemagne. Tous les Allemands ne croient pas en Dieu, mais tout le monde croit en la Bundesbank. 

La camisole de force de l’euro 

La camisole de force de l’euro est en fait une version atténuée de l’étalon-or. L’Allemagne avait alors les mains liées. Il y a eu aussi une crise bancaire qui s’est transformée en une crise de la dette dans des pays comme l’Autriche et l’Irlande. À l’époque, la solution à la crise consistait à abandonner l’étalon-or ; aujourd’hui, la solution consiste à quitter la zone euro. La solution ultime en Allemagne a alors été de se passer largement de la démocratie au profit d’une technocratie.

Aujourd’hui, la politique européenne est encore largement déterminée par des technocrates et il existe un grave déficit démocratique en Europe. N’oubliez pas que l’euro ne peut exister que si la BCE peut tenir la promesse de M. Draghi, ce qui implique de faire fonctionner la planche à billets. Si la BCE ne peut pas sauver l’euro par tous les moyens possibles, il n’y aura bientôt plus d’euro. 

Han Dieperink est chef de la stratégie d’investissement chez Auréus Asset Management. Plus tôt dans sa carrière, il a été directeur des investissements chez Rabobank et Schretlen & Co. Dieperink fournit son analyse et ses commentaires sur l’économie et les marchés. 

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