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Au cours des dix dernières années, des initiatives gouvernementales ont permis de réduire considérablement l’évasion fiscale internationale. Cependant, l’impact réel de ces mesures reste un sujet de débat. Un nouveau rapport plaide désormais en faveur d’une taxe mondiale minimale sur les ultra-riches.
 

Le Rapport mondial sur l’évasion fiscale 2024  révèle une baisse significative de l’évasion fiscale offshore, notamment grâce à la collaboration d’une centaine de chercheurs internationaux. Ce rapport, publié cette semaine par l’Observatoire européen de la fiscalité, hébergé par l’École d’économie de Paris  suscite des inquiétudes quant aux disparités nationales et à la réduction des mesures fiscales mondiales. Grâce à l’échange automatique de données bancaires, l’évasion offshore a diminué, confirmant ainsi l’impact d’une politique soutenue par la volonté politique.

Le rapport appelle à une révision approfondie des stratégies fiscales internationales afin de promouvoir l’équité et de réprimer les tactiques qui alimentent les inégalités. L’une des solutions recommandées est l’instauration d’une taxe minimale mondiale à hauteur de 2 % de la fortune des milliardaires. Selon des estimations préliminaires, cette taxe, prélevée sur moins de 3000 personnes, pourrait rapporter près de 250 milliards de dollars par an. Un renforcement de l’imposition minimale mondiale sur les multinationales, sans échappatoire, permettrait de générer 250 milliards de dollars supplémentaires par an. Ensemble, ces montants pourraient, selon le rapport, contribuer de manière significative aux 500 milliards de dollars de financement public nécessaires pour s’attaquer au problème du changement climatique.
« Il est temps d’instaurer une taxe minimale mondiale sur les ultra-riches, comme le préconise ce rapport », déclare Joseph Stiglitz, lauréat du prix Nobel d’économie et partisan de réformes internationales de l’impôt sur les sociétés. « Cela peut sembler impossible, mais il en allait de même il y a quelques années pour la remise en cause du secret bancaire et l’introduction d’une imposition minimale pour les sociétés. » 

Politique fructueuse

Holdings

Avec la France et les États-Unis, les Pays-Bas se démarquent tout particulièrement, car ils bénéficient de la préférence des milliardaires. « L’une des principales raisons pour lesquelles les milliardaires bénéficient souvent de faibles taux d’imposition effectifs est que, dans de nombreux pays (mais pas tous), ils peuvent utiliser des sociétés de portefeuille personnelles pour échapper à l’impôt sur le revenu », indique le rapport.
Les multinationales, quant à elles, transfèrent d’importants bénéfices vers les Pays-Bas et l’Irlande, à hauteur de plus de 140 milliards de dollars pour chaque pays au cours des dernières années. Le Luxembourg, fréquemment cité dans le rapport, figure en cinquième position parmi les principaux bénéficiaires de ces transferts de bénéfices, derrière les Pays-Bas, l’Irlande, la Suisse et les îles Vierges britanniques. 

Opportunités immobilières

Dans son avant-propos, Joseph Stiglitz salue l’analyse approfondie de l’évasion fiscale mondiale et les progrès réalisés en matière de concurrence.
« L’un des principaux enseignements est que des avancées sont possibles lorsque la réponse politique est adéquate. L’avènement de l’échange automatique de données bancaires, qui a réduit le secret bancaire à l’échelle mondiale, a permis de diviser par trois l’évasion fiscale offshore », déclare l’économiste. « Cependant, le rapport souligne également que d’autres efforts internationaux ne sont pas à la hauteur de leur ambition initiale. L’immobilier continue d’offrir aux riches de nombreuses possibilités d’éviter et d’éluder l’impôt. »
L’optimisme concernant un impôt minimal mondial pour les multinationales, initialement fixé à 20 %, s’amenuise. Alors qu’on s’attendait initialement à ce que les recettes de l’impôt sur les sociétés augmentent de près de 10 % à l’échelle mondiale, la multiplication des échappatoires a réduit cette prévision de moitié. Cependant, les auteurs du rapport ont calculé que par rapport à un taux d’imposition minimal fixe de 20 %, les recettes attendues ont été multipliées par trois. »

De l’offshore au national

Les arènes nationales deviennent les derniers épicentres de l’évasion fiscale. Les sociétés-écrans, de plus en plus utilisées par les milliardaires du monde entier, permettent d’obtenir des taux d’imposition effectifs négligeables, de parfois à peine 0,5 %. Cette tendance largement ignorée menace sérieusement la confiance du public dans les systèmes fiscaux actuels, avertissent les auteurs du rapport.
L’impôt sur le revenu des expatriés est devenu un autre champ de bataille entre les pays. Aux Pays-Bas, quelque 92 000 expatriés bénéficient d’un taux d’imposition inférieur à celui des travailleurs néerlandais grâce à une réduction de 30 % sur l’impôt sur le revenu pendant cinq ans. Cette mesure rend les Pays-Bas relativement attrayants pour les entreprises qui souhaitent embaucher du personnel international.
Le Luxembourg dispose d’un régime similaire pour les expatriés et fait partie des dix pays de l’UE à offrir une imposition préférentielle des revenus mondiaux ou étrangers. L’Italie et le Portugal ont des régimes spéciaux d’imposition des pensions pour les étrangers afin d’attirer les pensionnés fortunés.

30 régimes d’imposition

Au sein de l’Union européenne, il existe actuellement pas moins de 30 régimes nationaux différents d’impôt sur le revenu, qui permettent à quelque 260 000 personnes d’économiser en moyenne 28 392 euros par an en impôts. Le coût fiscal de ces régimes est d’environ 7,6 milliards d’euros par an.
Le rapport souligne que l’évasion fiscale n’est pas une fatalité, mais le résultat de décisions politiques. La coopération internationale peut faire pencher la balance, soit en facilitant l’évasion fiscale incontrôlée, soit en encourageant les efforts pour la réprimer. Des pactes mondiaux ambitieux peuvent accélérer les changements, mais même des actions individuelles peuvent avoir un impact significatif. L’étude reconnaît cependant que les données sont limitées et souligne l’importance d’améliorer les statistiques publiques, notamment des données plus détaillées sur les bénéfices des entreprises et les taux d’imposition effectifs pour les différents groupes socio-économiques. Néanmoins, certaines tendances claires se dégagent, comme la réussite de l’échange automatique d’informations et les migrations constantes des bénéfices vers des paradis fiscaux.

Où se trouve la richesse offshore dans le monde ?

    

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