Les spécialistes de Lazard Asset Management tablent sur une inflation qui va encore surprendre à la hausse durant les prochains mois, et préconisent donc un positionnement prudent à l’entame de 2023.
Lazard Asset Management a présenté ses perspectives économiques et financières pour l’exercice 2023. Ron Temple (Co-Head of of Multi-Asset and Head of US Equity) souligne que « la hausse des loyers américains a fortement décéléré, mais ils devraient continuer à contribuer positivement à l’indice des prix pour les prochains mois ». Dans le même temps, l’inflation salariale reste soutenue, avec 10 millions d’emplois encore vacants, soit 1,7 emploi pour chaque demandeur d’emploi. « Ceci reste significativement plus élevé que le chiffre de 0,9 que nous avions en 2019, lorsque l’économie américaine était déjà au plein emploi ».
Inflation américaine
Dès lors, il s’attend à ce que l’inflation reste soutenue. « Nous sommes aujourd’hui dans un changement de paradigme, avec une inflation américaine qui va rester soutenue autour de 3 à 3,5% durant les trois à cinq prochaines années ». Pour la politique monétaire, Ron Temple estime que le taux directeur américain devrait grimper au-dessus du consensus (5%), soit au moins 5,5%. « Et nous pensons également que la Fed laissera son taux directeur plus longtemps que prévu sur un niveau élevé ».
Il pointe également d’autres facteurs inflationnistes, notamment la reconfiguration des chaînes d’approvisionnement, avec une logique qui va passer du « just in time » au « just in case », avec la mise en place d’alternatives dans les capacités de production. De même, les milliards de dollars investis par les particuliers et les entreprises pour atténuer l’impact et les conséquences du changement climatique auront également un impact positif sur les prix.
Au niveau européen, il souligne que l’inflation est de nature différente (hausse des prix de l’énergie), mais semble également devenir « systémique », ce qui va amener la BCE à remonter son taux directeur entre 2,5 et 3% durant les 12 prochains mois. « La récession est mon scénario de base tant pour l’Europe que pour les Etats-Unis, mais elle devrait être relativement faible et de courte durée, car les deux économies entrent dans cette période plus difficile dans de bonnes conditions ».
Liquidité et rendement
En conséquence, il estime que les investisseurs obligataires ne devraient pas être aussi confiants, dans l’hypothèse d’une inflation qui sera difficile à maîtriser. « Dans le même temps, les attentes bénéficiaires pour restent encore trop élevés si le scénario d’une récession se confirment, et la hausse des taux fera encore pression sur les valorisations ». Dès lors, Ron Temple s’attend encore une correction de 15 à 20% sur l’indice S&P500 par rapport aux niveaux actuels. « Nous conseillons à nos clients de réduire leur exposition actuelle sur les actions américaines, afin de pouvoir revenir sur les marchés sur des niveaux plus attractifs ».
Dans cette configuration qui va rester difficile tant pour les actions que les obligations, il estime qu’il faut surpondérer les liquidités ainsi que les hedge funds qui permettent de diminuer la corrélation des portefeuilles avec les classes d’actifs traditionnelles. « Nous apprécions également les actifs réels qui génèrent des rendements attractifs comme l’infrastructure. Avec un environnement qui sera marqué par une hausse de l’inflation et des taux obligataires, nous sommes également prudents sur le private equity, qui ne sera pas en mesure de recourir aussi facilement à l’endettement pour doper sa performance »
Infrastructure et énergie
Pour Steve Wreford (Portfolio Manager/Analyst, Global Thematic Equity), « il faut privilégier les sociétés qui vont être exposée au supercycle des dépenses d’investissement », causé notamment par le besoin de rapatrier certaines chaînes de production ou de développer les politiques liées au changement climatique. « Une autre thématique que nous apprécions sont les investissements liés au secteur de l’énergie, notamment le besoin de mettre en place une nouvelle architecture à côté d’un système basé sur les énergies fossiles. Ce double système d’approvisionnement (fossile/électrique) est nécessaire pendant les trente à quarante ans que durera cette phase de transition ».
De son côté, Mark Little (Portfolio Manager/Analyst, International/Global Equity) constate que les actions défensives et de qualité ont eu tendance à sous-performer les marchés en raison de la hausse des taux. « Il existe aujourd’hui beaucoup d’opportunités dans ces secteurs, notamment dans l’énergie ou les bancaires.
Axe émergent
Enfin, les spécialistes de Lazard Asset Management pointent également les opportunités existant actuellement sur les marchés émergents. Denise Simon (Portfolio Manager/Analyst, Emerging Markets Debt) souligne le niveau élevé des rendements sur les dettes souveraines et corporate en devises locales, qui constituent une « belle assurance contre les risques actuels. Il n’est clairement pas trop tard pour en profiter », avec également des banques centrales qui devraient détendre leur taux plus rapidement que dans les pays développés.
James Donald (Portfolio Manager/Analyst and Head of Emerging Markets) souligne pour sa part que les actions émergentes sont valorisées de manière très attractive, même pour des entreprises de qualité avec une rentabilité et des dividendes élevés. « Si l’inflation se normalise et que la croissance se redresse durant les prochains mois, l’environnement sera beaucoup plus favorable pour les marchés émergents. En outre, cette classe d’actifs reste très fortement sous-pondérées dans les portefeuilles ».