Imec est un centre de recherche belge de renommée mondiale qui se concentre sur la technologie des puces et la numérisation. Toutes ces activités de R&D n’ont cependant pas suffisamment de retombées. Cette lacune constitue une occasion à saisir, selon imec.xpand, un fonds de capital-risque lié à imec mais indépendant de celui-ci. Il fait progresser les jeunes entreprises de matériel informatique grâce à de solides levées de fonds. Selon Tom Vanhoutte, partenaire du fonds, ces start-up pourront parfaitement résister aux tensions géopolitiques et à une crise économique à venir.
Pourquoi imec.xpand a-t-il vu le jour ?
Tom Vanhoutte : « Nous avons constaté que les retombées d’imec étaient restées en deçà des attentes au cours des trente dernières années. On pourrait penser qu’un centre de R&D renommé ayant un impact mondial produit de belles retombées. À l’heure actuelle, il est impossible de trouver un téléphone mobile, ordinateur, écran ou dispositif médical qui ne contienne pas un morceau de technologie imec. Mais il y avait toujours un manque de retombées solides. C’est alors qu’est née l’idée de créer un fonds assez vaste pour investir dans des entreprises du monde entier qui utilisent la technologie d’imec. Il s’agit parfois d’une spin-off, parfois d’une entreprise qui utilise simplement la technologie d’imec. Nous sommes convaincus que les entreprises qui travaillent avec imec sont meilleures. Et nous le constatons dans notre portefeuille. Sur nos 16 investissements, un seul a échoué, les autres se portent tous très bien. »
Vous vous concentrez sur les start-up de matériel informatique. Quelle est l’incidence de ce choix sur vos investissements
Tom Vanhoutte : « Le capital est encore plus important pour le hardware. Deux personnes dans un garage suffisent pour développer des logiciels. Pour le hardware, ce n’est pas possible. Des levées de fonds importantes sont nécessaires car quelque chose doit être développé physiquement. Pour commercialiser cela, il faut beaucoup d’argent. C’est pourquoi il est important pour nous de nous impliquer tôt, car les levées ultérieures sont souvent colossales. Nous nous distinguons également des autres fonds early-stage. Grâce à notre relation avec imec, nous sommes bien placés pour évaluer avec précision le risque technologique à un stade précoce. »
N’est-il pas plus difficile d’obtenir de bons rendements avec le matériel informatique ?
Tom Vanhoutte : « Il faut notamment investir intelligemment dans le hardware. Auparavant, les investissements dans le matériel informatique ne se prêtaient pas à des valorisations élevées. Les grandes entreprises technologiques comme Google et Facebook sont axées sur les logiciels. Aujourd’hui, cela change. Dans des domaines comme les batteries, l’informatique quantique et les puces, les valorisations sont très élevées. Si l’on regarde ce que valent aujourd’hui ASML et ARM, il est clair que les investissements dans le hardware peuvent être rentables. Le délai de sortie est certes plus long. Mais de plus en plus d’occasions se présentent. »
En quoi le fonds imec.xpand est-il différent des autres ?
Tom Vanhoutte : « Nous nous distinguons des autres fonds concurrents dans plusieurs domaines. Grâce à notre collaboration avec imec, nous sommes en mesure d’évaluer le risque technologique à un stade très précoce. Cela nous permet d’investir des sommes importantes dans les premières levées de fonds. Nous réalisons généralement des levées initiales de 10 millions d’euros, dont 3 à 4 millions à notre charge. Nous avons aussi une approche résolument internationale, plus que d’autres fonds d’amorçage. Toutes nos ventures ont déjà réussi à attirer des investisseurs internationaux à un stade précoce. En faisant appel à notre réseau, nous aidons les entreprises, dans les premières et dernières levées. Dans certains cas, presque tous les investisseurs des levées suivantes provenaient de notre réseau. C’est un atout formidable. »
Dans quelle mesure êtes-vous indépendant d’imec ?
Tom Vanhoutte : « Bien entendu, nous sommes liés à imec et plusieurs de mes partenaires ont travaillé pour ce centre de R&D. Mais nous prenons toutes les décisions nous-mêmes avec notre équipe de partenaires, indépendamment d’imec. Notre seul ICP est le rendement financier. Bien sûr, imec est notre partenaire le plus actif et le plus précieux. Il contribue au succès des entreprises du portefeuille et nous pouvons toujours compter sur son expertise, par exemple pour évaluer de nouvelles occasions. »
Et si une belle occasion qui n’est pas liée à imec se présente ?
Tom Vanhoutte : « On ne peut pas investir dans tout (rires). Nous avons choisi cette orientation parce que le champ d’application est suffisamment large et qu’il nous donne un avantage. Il arrive naturellement que l’on doive laisser passer de belles occasions. Mais notre concentration nous permet de saisir de très belles occasions. Si vous investissez dans ce genre de domaines très techniques, c’est un avantage plutôt qu’un inconvénient. Il est vrai que, de temps à autre, nous regrettons de ne pas avoir pu investir dans une occasion. Mais c’est le cas pour tous les investisseurs. Vous choisissez un périmètre, et vous vous y tenez. »
Dans quelles entreprises avez-vous déjà investi ?
Tom Vanhoutte : « Nous avons récemment investi dans Swave Photonics. Cette entreprise fabrique une puce permettant de projeter une image holographique autonome. Tout comme dans les films de science-fiction tels que Star Wars, mais dans la pratique. Cette technologie sera à son tour un catalyseur du métavers. Dans notre premier fonds, nous avons également investi dans Spectricity, qui produit une caméra hyper-spectrale suffisamment petite pour être intégrée à un smartphone. Cette entreprise travaille à présent avec l’un des plus grands fabricants de téléphones au monde. L’une des trois caméras de votre futur téléphone portable sera très probablement une caméra hyper-spectrale, intégrant la technologie de Spectricity. »
Comment les tensions géopolitiques affectent-elles votre travail ?
Tom Vanhoutte : « Nous nous tenons aussi loin que possible des discussions géopolitiques. Mais nous constatons que dans l’environnement actuel, une entreprise doit souvent choisir entre la Chine d’une part et l’Europe et les États-Unis de l’autre. Combiner les deux n’est pas facile. C’est regrettable car la Chine est un grand marché caractérisé par de nombreuses innovations. Le fait que nous soyons obligés de l’ignorer en Europe n’est pas toujours dans l’intérêt des start-up. Nous devons accepter le fait que les deux sont difficiles à combiner pour le moment.
Imec.xpand lance un deuxième fonds au milieu d’une crise économique qui frappe durement le secteur des technologies. Cela vous préoccupe-t-il ?
Tom Vanhoutte : « Nous ne sommes certes pas dans une période de haute conjoncture. Je crois néanmoins qu’on a tendance à mettre beaucoup de choses dans le même panier. Si vous examinez le capital-risque en Europe, et les entreprises que nous soutenons, la plupart des investissements sont réalisés avec des valorisations raisonnables. Les investissements sont ici basés sur des paramètres objectifs tels que la croissance des entreprises ou le progrès technologique. Aux États-Unis, la situation est différente. Là-bas, de nombreuses entreprises ont obtenu des évaluations ridicules. Il suffit de penser à toutes les SPAC qui ont généré des rendements énormes, qui n’avaient plus rien à voir avec la création de valeur fondamentale. C’était de la pure spéculation. Bien sûr, ce sont les premières entreprises qui baissent. Mais si votre entreprise est évaluée sur la base de paramètres fondamentaux, c’est une base solide pour l’avenir. »
Les éléments clés du fonds imec.xpand
- imec.xpand est un fonds de capital-risque qui collabore avec imec tout en restant indépendant de celui-ci.
- Le premier fonds d’imec.xpand a levé 117 millions d’euros.
- Aujourd’hui, imec.xpand est sur le point de clôturer son deuxième fonds. Il entend lever 250 millions d’euros d’ici la fin de l’année.
- imec.xpand se concentre principalement sur les levées initiales dans les start-ups spécialisées dans le matériel informatique.
- Le fonds est géré par quatre partenaires : Tom Vanhoutte, Peter Vanbekbergen, Cyril Vančura et Frank Bulens.