Peter Vanden Houte, économiste en chef, et Steven Vandepitte, stratégiste chez ING, anticipent un atterrissage en douceur pour l’économie. Bien qu’un trimestre de contraction soit possible, 2024 devrait se terminer sur une croissance modeste. Ce scénario nécessite une politique d’investissement active, axée sur les actions d’entreprises affichant un bilan solide et les obligations investment grade.
« On ne peut pas vraiment dire que les banques centrales ont mal agi, déclare Steven Vandepitte. L’inflation est clairement en baisse, tandis que l’activité économique se maintient pour le moment. Nous nous attendons donc à un atterrissage en douceur, mais nous n’en sommes pas encore là : le train d’atterrissage est déployé, la piste d’atterrissage est en vue et le voyant « Attachez votre ceinture » est allumé. Cependant, ce n’est qu’une fois l’avion posé au sol que nous pourrons nous prononcer sur l’atterrissage. »
À l’échelle mondiale, le resserrement monétaire ne se manifeste qu’au bout d’un certain temps. Cela pourrait entraîner un premier semestre difficile, en particulier dans les secteurs sensibles aux taux d’intérêt, comme l’immobilier commercial et la construction. De même, le secteur manufacturier, confronté à des niveaux de stocks supérieurs à ceux souhaités, ne semble pas encore sorti d’affaire.
Marché du travail
« Le refroidissement temporaire du marché du travail contribuera également au ralentissement de la croissance, déclare Peter Vanden Houte. Cependant, un certain nombre de facteurs laissent présager un ralentissement limité de l’économie. Dans la plupart des pays occidentaux, le marché du travail est devenu structurellement plus tendu en raison de l’évolution démographique, ce qui fait que les entreprises hésitent à procéder des restructurations majeures. La baisse de l’inflation améliorera le pouvoir d’achat, ce qui limitera la perte de dynamisme de la consommation, par rapport aux récessions précédentes. Malgré un taux de croissance annuel qui devrait encore s’établir à 0,5 % environ, les États-Unis seront confrontés à une croissance négative. La zone euro devrait, au mieux, stagner durant les trimestres d’hiver, ce qui se traduira par une croissance annuelle de seulement 0,3 % en 2024. »
« Grâce à la baisse de l’inflation à partir du deuxième trimestre, nous anticipons une baisse significative des taux d’intérêt à court terme, mais le potentiel de reflux des taux d’intérêt à long terme devrait être plus limité », déclare Peter Vanden Houte.
Taux d’intérêt
Malgré les défis actuels, ING entend mettre l’accent sur les aspects positifs. À partir du deuxième trimestre, la croissance devrait s’accélérer. Dans le même temps, la baisse de l’inflation et des taux d’intérêt devrait également encourager les ménages et les entreprises.
Les taux d’intérêt à long terme ont déjà anticipé les assouplissements monétaires, ce qui limite le potentiel baissier. La précarité des finances publiques dans certains pays ralentira également la baisse des taux d’intérêt obligataires. Fin 2024, les taux d’intérêt européens à long terme pourraient déjà renouer avec leur niveau actuel », estime Peter Vanden Houte.
Selon Peter Vanden Houte, tant l’inflation globale que l’inflation sous-jacente devraient tomber à 2 % aux États-Unis et dans la zone euro. Les taux d’intérêt à court terme devraient retrouver un niveau neutre, probablement autour de 3 % aux États-Unis et de 2,5 % dans l’UEM, mais ces niveaux ne seront probablement pas atteints avant 2025.
Le dollar devrait céder un peu de terrain. Cependant, étant donné que le billet vert réagit de manière anticyclique et profite des périodes de tensions géopolitiques croissantes, un rebond temporaire au premier semestre n’est pas improbable, mais la tendance sous-jacente à la dépréciation devrait rester intacte.
« Tout cela implique une stratégie d’investissement active, car il y aura encore de la volatilité, en particulier sur le marché obligataire. Nous utiliserons les capitaux disponibles principalement pour des obligations investment grade », ajoute Steve Vandepitte.
Les actions d’entreprises peu endettées et affichant une solide croissance des bénéfices continueront à dominer, notamment dans le secteur technologique, où l’IA générative est apparue comme une opportunité d’investissement à long terme. Steve Vandepitte préfère rester prudent à l’égard des actions affichant un bilan plus fragile, qui sont en retard de 16 % par rapport aux États-Unis depuis le début de l’année. Il continue donc à se concentrer sur les titres de qualité présentant un faible risque de refinancement dans le secteur technologique. Ces actions se trouvent principalement sur le marché américain, raison pour laquelle ING oriente son allocation d’actifs davantage vers les États-Unis que vers l’Europe.
Obligations
Maintenant que les obligations ont pris un nouveau départ (le rendement moyen des obligations investment grade dépasse aujourd’hui de 3 % celui de fin 2020), il semble que les actifs à revenu fixe profiteront de la fin du cycle de relèvements des taux d’intérêt, même si le marché l’a probablement déjà anticipé en grande partie.
Les obligations de qualité supérieure peuvent redevenir efficaces en termes de diversification. Avec un rendement proche de 4 %, les taux d’intérêt sur les obligations de haute qualité se situent au niveau de la mi-2021 et sont de 1,7 % plus élevés que le rendement moyen attendu des dividendes des actions mondiales.