Lors de la COP28, à Dubaï, les pays participants ont exprimé leurs ambitions en ce qui concerne la transition vers un monde sans carburants fossiles. Pour autant, les entreprises actives dans le secteur ne vont pas cesser leurs activités immédiatement. Les fonds investissant dans le secteur énergétique ont certes connu une décollecte nette cette année, mais cette situation semble s’expliquer par des prises de bénéfices, après deux années extraordinaires, plutôt que par une désertion massive du secteur.
Depuis quelques années, le secteur énergétique est de plus en plus souvent exclu par les investisseurs, tant particuliers qu’institutionnels (fonds de pension, notamment). Les sociétés énergétiques produisant des carburants fossiles, comme le gaz, le pétrole ou le charbon, sont les plus affectées par cette tendance.
Rétrospectivement, toutefois, les investisseurs se mordront peut-être les doigts : le secteur énergétique a en effet remporté la palme sectorielle, tant en 2021 qu’en 2022. En 2021, l’indice MSCI World Energy a affiché un rendement de 50,73 %, contre 31,07 % pour le MSCI World : une performance correcte, mais moins brillante. Et le secteur énergétique a renoué sa prouesse l’année suivante, avec une avancée de 55,58 %, d’autant plus exceptionnelle que les places boursières ont été vraiment à la peine en 2022, avec un recul de 12,78 % pour le baromètre mondial des actions.
Le cru 2023 a été un peu moins rose. Les cours des actions de sociétés énergétiques ont globalement fait du surplace, alors que le MSCI World a gagné plus de 15 % entre début janvier et fin novembre. Les investisseurs se montrent-ils plus prudents et prennent-ils leurs bénéfices, ou s’inquiètent-ils des perspectives pour l’avenir ?
Lors de la COP 28, la conférence des Nations Unies sur le changement climatique, qui s’est tenue il y a peu à Dubaï, les pays participants ont promis d’engager ensemble la transition vers un monde sans énergies fossiles. La formulation retenue a été moins tranchée que ce que ne souhaitaient les pays européens, qui désiraient une sortie graduelle des énergies fossiles. Lors des conférences précédentes, les pays représentés n’étaient jamais parvenus à un accord sur ce point. L’accord final conclu à Dubaï constitue donc un jalon important.
Cela signifie-t-il pour autant la fin des entreprises actives dans les énergies fossiles ? Certainement pas, et à plus forte raison, pas à court terme. Car l’accord n’est qu’une déclaration d’intention, et ne comprend aucun calendrier concret ou obligatoire pour une réduction progressive de la part du pétrole, du charbon et du gaz. En outre, il couvre l’utilisation des carburants fossiles dans les systèmes énergétiques mais, par exemple, pas dans la production de marchandises. Les investisseurs ne semblent donc guère s’inquiéter : depuis la fin de la COP28, le MSCI World Energy devance le MSCI World de 2 points de pourcentage.
Ces dernières années, les investisseurs n’ont pas fui les fonds d’investissement engagés dans le secteur énergétique, bien au contraire. Fin décembre 2022, l’actif géré par ces fonds avait atteint son plus haut niveau depuis le lancement du suivi par Morningstar, en 2007. Les investisseurs européens avaient alors placé 14,8 milliards d’euros dans ces fonds, contre seulement 6 milliards d’euros fin 2020. Cette hausse s’explique en premier lieu par l’envolée des cours, mais aussi par une collecte nette de près de 2 milliards d’euros, sur ces deux années. Cette année, ces fonds enregistrent une décollecte nette de 1,4 milliard d’euros, mais après deux années de forte surperformance, ces flux sortants semblent davantage relever de prises de bénéfices que d’une fuite massive du secteur.
Le top 5
Le top 5 de cette semaine reprend les cinq fonds de la catégorie Morningstar des actions du secteur énergétique. Seuls ont été sélectionnés les fonds dont les données de portefeuille disponibles chez Morningstar ne sont pas antérieures à trois mois.
La première place revient au fonds Invesco Morningstar US Energy Infrastructure MLP. Cet ETF suit un indice de Morningstar qui réplique les performances d’un panier de MLP (Master Limited Partnership). Fin novembre 2023, l’indice comptait vingt positions, dont les plus importantes sont Energy Transfer LP et Enterprise Products Partners LP, avec une pondération de quelque 10 %, le maximum autorisé. Entre début janvier et fin novembre 2023, Plains All American Pipeline et Sunoco LP ont affiché les meilleures performances.
La troisième place revient au fonds Schroder ISF Global Energy, piloté depuis 2013 par Mark Lacey, un gérant très expérimenté actif dans le secteur énergétique depuis 1996, date de son entrée chez Goldman Sachs comme gérant d’un fonds énergétique mondial. Il a ensuite occupé la même fonction chez Investec, avant d’intégrer Schroders en 2013. Il est assisté par Alex Monk et Felix Odey, nommés co-gérants en janvier 2021. Tous les trois mettent l’accent sur les sociétés actives dans l’exploration et la production de pétrole et de gaz, mais peuvent aussi inclure en portefeuille des entreprises du secteur des infrastructures, des services aux collectivités et des énergies renouvelables et alternatives.
Le premier groupe se taille toutefois la part du lion, avec de nombreux représentants dans les dix principales positions : Galp Energia, Shell, Eni… Les actions affichant les meilleures performances entre début janvier et fin novembre proviennent cependant d’autres segments ; il s’agit notamment de Fugro, Technip Energies et Saras.
Ronald van Genderen est Senior Manager Research Analyst chez Morningstar. Morningstar analyse et évalue les fonds d’investissement sur la base d’études quantitatives et qualitatives. Partenaire d’Investment Officer, Morningstar propose chaque semaine un classement des cinq meilleurs fonds ou prestataires d’un secteur ou thème donné.