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Paul Jackson, responsable mondial de la recherche sur l’allocation d’actifs chez Invesco, se demande, après la récente reprise des marchés, si la crise est déjà passée. Il ne donne pas d’emblée une réponse positive et estime que les marchés, soutenus par l’intervention massive des autorités monétaires, tablent déjà trop sur une reprise économique forte et rapide.

Les banques centrales réagissent rapidement 

Selon Jackson, contrairement à la crise financière de 2008, les décideurs politiques ont déployé leurs mesures très rapidement. « La Réserve fédérale est rapidement passée à l’achat illimité d’actifs. Et la BCE passe elle aussi à l’action et rachètera pour environ 1100 milliards d’euros d’actifs d’ici la fin de l’année. En outre, les banques centrales ont augmenté les liquidités et pris des mesures réglementaires afin que les banques puissent octroyer davantage de crédits. Au Royaume-Uni, par exemple, la banque centrale pourrait fournir 290 milliards de livres de crédits, soit 13 % du PIB. »

Il note également qu’on pouvait constater une corrélation accrue entre les actifs pendant les semaines de crise, même avec l’or. « Et au sein des banques centrales, les sonnettes d’alarme se sont déclenchées dès que les obligations d’État se sont mises à réagir de la même manière que les actions. Étant donné que les gouvernements ont commencé à augmenter leurs dépenses, les taux d’intérêt sur les obligations d’État ont augmenté, et le moment était venu pour les banques centrales de peser de tout leur poids. » Jackson note que cette année, les bilans des banques centrales vont connaître leur plus forte augmentation plus depuis la crise financière. « Et il est important de noter que bien qu’avec un certain retard, l’expansion de l’assouplissement quantitatif est toujours suivie par une forte performance de différents actifs. La question est bien sûr de savoir si cet effet a déjà été joué ou non. » 

Découplage entre les marchés et la réalité

Pour Paul Jackson, l’impact économique de cette crise ne sera pas négligeable, le scénario central étant une contraction du PIB de 3,4 % en 2020. « Toutefois, si l’on examine les cours actuels des marchés boursiers, il est plus probable que ceux-ci tablent sur un scénario économique nettement plus favorable, à savoir une légère récession. En d’autres termes, un découplage est apparu entre ce sur quoi tablent les marchés et la réalité économique. En effet, si le scénario central se réalise, nous estimons que le S&P devrait coter à 1400 points, l’Eurostoxx 50 à 1350 points, l’or à 1750 dollars l’once et le pétrole Brent à 20 dollars. Cela s’est déjà produit pour ces deux dernières matières premières, mais pas pour les indices boursiers cités, qui sont tous deux environ deux fois plus élevés et cotent à environ 2800. » Le chercheur d’Invesco se demande également ce qui se passerait si même le scénario central s’avérait trop optimiste et que nous assistions à un déclin économique comme lors de la Grande Dépression ? « Alors, ces faibles attentes sont encore trop élevées. » 

Pour lui, il est clair que les banques centrales et leur assouplissement quantitatif sont les principales raisons pour lesquelles les marchés des actions se sont aussi si bien comportés et les rendements obligataires moyens sont restés aussi bas. « En raison des achats massifs, l’argent s’infiltre dans le système et se retrouve dans toutes sortes d’actifs, ce que nous ne pouvons pas ignorer. Et dès que le marché a réalisé que, tout comme en mars 2009, les banques centrales continueraient à acheter des actifs jusqu’à ce que la panique sur les marchés se soit complètement dissipée, le mouvement de reprise à grande échelle a été initié. La question qui se pose maintenant est bien sûr de savoir si les marchés peuvent continuer à ignorer la réalité. »

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