Paul Jackson, global head of asset allocation chez Invesco, privilégie aujourd’hui les actifs cycliques. Il est clairement surpondéré en actions et dans l’immobilier, et se tourne à cette fin principalement vers les marchés émergents. Il continue de sortir des obligations à haut rendement, tandis que les obligations d’État et l’investment grade ne sont pas du tout intéressants.
Actions : sentiments mitigés
Selon Jackson, le modèle actuel d’allocation d’actifs d’Invesco laisse une plus grande place aux actions. « Je ne m’y attendais pas lorsque nous avons lancé notre processus d’évaluation, car les cours des actions ont déjà solidement augmenté depuis le début de l’année. Cependant, les bénéfices des entreprises et les dividendes ont augmenté encore plus fortement, alors que les rendements des produits à revenu fixe étaient nettement plus faibles au cours de la même période, ce qui fait que les actions semblent en termes relatifs plus attrayantes. »
Il indique également que les cycles des marchés actions ne s’achèvent généralement qu’avec l’arrivée d’une récession et que, étant donné que nous venons tout juste d’en connaître une solide, la probabilité que cela se produise semble faible. « L’économie mondiale se trouve dans une période de transition : le passage d’une croissance très élevée à une croissance plus normale. Et dans une phase de ralentissement, il y a toujours une incertitude quant à la possibilité d’une récession. Par le passé, ce type de période haussière durait d’ailleurs en moyenne cinq ans, c’est pourquoi nous avons actuellement encore quelques années devant nous. »
Paul Jackson préfère les actifs cycliques dans la phase actuelle du cycle, mais les rendements peuvent être volatils à court terme. Il souligne également que les actifs cycliques sont déjà assez chers, ce qui constitue un défi de taille pour les gestionnaires d’actifs. Jackson l’illustre par un exemple. « Les ventes de voitures commencent à se tasser pour diverses raisons et pourtant, les actions automobiles s’envolent.
En bourse, les investisseurs sont actuellement prêts à payer 2 à 3 fois plus par voiture vendue qu’avant la pandémie ! C’est un exemple extrême de la quantité de bonnes nouvelles qui ont déjà été intégrées dans les cours des actions. » Pour le gestionnaire d’Invesco, les actions américaines ont la valorisation la plus élevée car ce marché a déjà intégré énormément de bonnes nouvelles. « Ces valeurs sont donc sous-pondérées dans notre portefeuille. Avec la hausse des taux d’intérêt, nous voyons la valeur surperformer la croissance, une raison supplémentaire de sous-pondérer les marchés boursiers américains, qui tendent vers la composante croissance. »
Emergents
Invesco est cependant positif sur les actions des pays émergents, car la valorisation moyenne est attractive. « En outre, nous anticipons une corrélation nettement plus forte entre la croissance des bénéfices des entreprises des pays émergents et celle des entreprises américaines au cours des dix prochaines années. Cela n’a pas été le cas au cours des dix dernières années et les entreprises des marchés émergents sont restées loin derrière leurs homologues américaines.
De plus, nous prévoyons un impact positif des prix des matières premières sur les bénéfices des pays émergents, malgré leur potentiel de hausse limité. Il ne faut pas oublier que les marchés des matières premières ont été plutôt faibles au cours des dix dernières années. La faible valorisation et l’amélioration des perspectives de croissance nous font donc pencher pour les actions des pays émergents. Enfin, nous augmentons également notre position dans les actions britanniques, qui sont cotées bon marché. »
D’autres classes d’actifs ?
En ce qui concerne les obligations, Paul Jackson souligne que les choix sont limités. « Le haut rendement est désormais moins attractif, c’est pourquoi nous l’avons rétrogradé à sous-pondéré. Les spreads ne peuvent pas se resserrer beaucoup plus, car beaucoup de bonnes nouvelles ont déjà été intégrées sur le marché. Et comme nous prévoyons une hausse des taux d’intérêt des obligations d’État au cours des 12 à 24 prochains mois, il sera difficile d’opérer sur les marchés du crédit. Nous continuons donc à éviter les obligations d’État, tout comme nous évitons le corporate investment grade (IG) et les obligations d’État.
Nous préférons les liquidités : les rendements sont faibles, mais stables et décorrélés, ce qui en fait une excellente diversification. Nous sommes particulièrement friands de liquidités libellées en dollars. Nous voyons le billet vert augmenter dans les 1 à 2 prochaines années en raison de l’augmentation des écarts de rendement. À plus long terme, nous voyons cependant le dollar s’affaiblir sous l’influence de la dette extérieure élevée des États-Unis. »
Enfin, le gestionnaire d’Invesco est positif sur l’immobilier et prévoit des rendements plus élevés que sur les actions. « La valorisation moyenne est attrayante et les dividendes du secteur immobilier, qui sont encore au plus bas, pourraient bientôt opérer un mouvement de rattrapage des dividendes des actions. Nous sommes particulièrement attirés par l’immobilier sur les marchés en plein essor.
Les matières premières, à l’exception des matières premières agricoles, sont sous-pondérées parce que beaucoup de bonnes nouvelles ont déjà été intégrées dans les prix, notamment pour les matières premières industrielles, et parce qu’elles semblent chères. Nous ne voyons pas beaucoup de potentiel haussier. Enfin, Jackson affirme que les actions défensives et l’or n’entrent en ligne de compte que si une récession est imminente, ce qui « n’est pas le cas aujourd’hui. »