Investment Officer lance une nouvelle rubrique : Le Miroir. Toutes les deux semaines, nous demandons à un éminent professionnel du monde financier de revenir sur sa carrière.
Koen Hoffman (photo), CEO de Value Square, donne le coup d’envoi et jette un œil dans Le Miroir.
Koen Hoffman, CEO du gestionnaire d’actifs gantois Value Square, n’est pas un jobhopper. Directement après sa formation à la Vlerick Business School, il est entré chez KBC. Trois ans plus tard, il a rejoint KBC Securities, où il a travaillé pendant 20 ans, dont près de quatre en tant que CEO. Depuis 2016, il dirige Value Square. Il exerce également de nombreux mandats d’administrateur dans des sociétés cotées en bourse, dont Fagron, Greenyard et MdxHealth.
Que vous a appris votre premier emploi ?
« Chez KBC, j’étais actif dans le financement de projets. Il s’agissait de dossiers de crédit très complexes pour le financement de centrales électriques et d’usines chimiques, entre autres. Cette expérience a fait de moi ce que je suis aujourd’hui. Lorsque vous évaluez ces projets, vous ne pouvez pas vous appuyer sur un track-record avéré ou un bilan d’entreprise solide. L’ensemble du financement est basé sur le flux de trésorerie attendu. En tant que banquier, j’ai appris à penser en entrepreneur. Et lorsque je suis confronté aujourd’hui en tant qu’administrateur à une entreprise en difficulté financière, je peux toujours mettre à profit les expériences de mon premier emploi. »
Quel a été le moment le plus marquant de votre carrière professionnelle ?
« Une réunion dans le couloir de la KBC avec Michel Vanderkeilen, qui était alors CEO de KBC Securities. Nous avons engagé la conversation et, quelques semaines plus tard, je rejoignais déjà la société de bourse. Je n’avais ni chaise, ni PC, ni téléphone. Je ne savais même pas en quoi consisterait mon travail, mais je ressentais une attirance incroyable pour la salle des marchés. Je voulais être impliqué moi aussi. Mais les premières semaines ont été très difficiles. J’ai essayé de me débrouiller, sans formation spécifique ni description de fonction. C’est ainsi que ma carrière a pris un nouveau tournant. Sans cette rencontre fortuite, ma vie et même celle de mes enfants auraient été très différentes. Avec des postes chez Roland Berger et le groupe de capital-investissement Carlyle, ils ont eux aussi été aspirés dans ce réseau professionnel. »
Quelle est votre plus grande déception professionnelle ?
« L’éclatement de la bulle internet en 2000. À l’époque, KBC Securities était étroitement impliquée dans des transactions concernant Real Software et Lernout & Hauspie, entre autres. L’éclatement de la bulle internet a fait du tort à nombre de nos clients. C’était une période sombre. »
Quelle ambition n’avez-vous pas réussi à réaliser ?
« Tout d’abord, je suis très fier de mes enfants, qui suivent leur propre voie et font carrière chez Roland Bergen et Carlyle. En tant que banquier d’investissement, je regrette toujours de n’avoir jamais travaillé à l’étranger. J’ai navigué pendant quelques années entre la Belgique et Londres, en rentrant toujours à la maison le week-end, mais ce n’est tout de même pas la même chose que de vivre à l’étranger de manière permanente. J’aurais aimé vivre quelques années à New York, ça doit être une expérience incroyable. C’est pourquoi j’envie mon fils, qui se construit une carrière internationale et vit à Londres. Si un acteur étranger m’appelait, j’envisagerais tout de même d’au moins en discuter. Non que j’aie l’intention de partir, mais ça reste quelque chose qui parle à l’imagination. »
Vous exercez plusieurs mandats d’administrateur dans des entreprises cotées en bourse. Dans quelle mesure influencent-ils votre vision en tant que gestionnaire d’actifs ?
« Il s’agit d’une interaction très intéressante, car vous apprenez à connaître l’aspect opérationnel d’une entreprise de l’intérieur. Mon expérience d’administrateur m’a rendu beaucoup plus réaliste quant aux ambitions et aux valorisations des entreprises. Je réalise maintenant que chaque entreprise a des problèmes en coulisses, que toutes les décisions ne sont pas rationnelles et que la présentation de chaque entreprise contient également une composante marketing. »
Quelle est votre plus grande contrariété ?
« Je ne suis pas une personnalité amère, mais je regrette parfois que de nombreux gestionnaires d’actifs et banques ne placent toujours pas le client au premier plan. Très souvent, on recommande à un client un fonds d’investissement non parce que c’est celui qui répond le mieux à ses besoins, mais simplement parce que ce fonds est la mode du moment. On le voit maintenant aussi pour l’ESG. Je suis totalement pour l’ESG, mais je vois de nombreux fonds dotés d’un emballage ESG pour lesquels on ne se demande pas s’ils constituent la meilleure solution pour le client à long terme. »
Réalisez-vous tous vos investissements dans des fonds de Value Square ?
« Certains de mes investissements sont dans le private equity, et le reste dans des fonds de Value Square. Ce qui est logique. Le CEO de Skoda ne peut tout de même pas rouler en BMW ! Ici, nous investissons tous dans nos propres fonds. Par conséquent, nous investissons aussi différemment. Lorsque vous ne travaillez pas avec votre propre argent, il est facile de viser le rendement le plus élevé et de prendre les risques qui vont de pair. »
À quand remonte la dernière fois où les actualités boursières vous ont empêché de dormir ?
« Lundi dans la nuit, je me suis réveillé et j’ai eu la mauvaise idée de regarder mon smartphone pour voir s’il y avait des nouvelles concernant l’Ukraine. Ensuite, je n’ai pas bien dormi. Je me préoccupe surtout de l’argent de nos clients, mais j’apprends à relativiser en vieillissant. »