Dans ses perspectives pour 2022, JPMorgan Asset Management ne cache pas que les actions restent intéressantes, même si l’inflation se maintient un peu plus longtemps que prévu. En période d’inflation et de taux d’intérêt réels négatifs, les actions n’ont historiquement presque jamais donné de rendement négatif.
C’est ce qui ressort des perspectives de JPMorgan avec le stratège en chef Vincent Juvyns (photo). Avant de donner ses perspectives, Vincent Juvyns se penche sur les résultats de ses prédictions de l’année dernière, ce qu’il qualifie lui-même de test de modestie. Il avait raison concernant l’économie et les actions, mais tort sur d’autres points. « La croissance a fait mieux que la valeur, alors que nous comptions précédemment sur la valeur pour faire la différence. Compte tenu de tous les problèmes qu’elle a connus ces derniers mois, la Chine a été un des pays à la traîne, ce que nous n’avions pas prévu.
Cependant, les perspectives à long terme de la Chine restent intactes. En revanche, nous avons enregistré de bons résultats avec les obligations d’État chinoises, qui ont affiché un rendement de 15 % en euros dans un environnement où la plupart des obligations d’État ont enregistré des performances négatives. Nous avions également annoncé un dollar plus faible, mais la monnaie est restée assez forte et nous pensons que le billet vert restera fort en 2022 également. »
Inflation, mais pas de stagflation
Juvyns s’attend à ce que l’inflation se normalise d’ici fin 2022. « C’est un peu plus loin dans le temps que ce que nous avions espéré à la mi-2021. Néanmoins, nous commençons à observer une réduction des goulets d’étranglement du côté de l’offre, tandis que les coûts des conteneurs commencent enfin à rediminuer. En revanche, l’inflation du coût de la main-d’œuvre pourrait se maintenir légèrement plus longtemps. En de nombreux endroits, il y a plus de postes vacants que de chômeurs, et la tension sur le marché du travail est l’une des raisons de relever les prévisions d’inflation pour les 5 à 10 prochaines années. Il en va de même pour l’ESG, car la modification obligatoire du mix énergétique en faveur de plus d’énergie renouvelable entraînera une augmentation des coûts. Nous assistons déjà à une flambée des prix des droits d’émission de CO2. »
Cependant, Juvyns estime qu’il n’y a pas de stagflation en vue. « Il y aura peut-être une inflation plus élevée, mais aussi de la croissance. L’économie mondiale devrait connaître une croissance de 4 à 4,5 % en 2022, ce qui est supérieur à la tendance. Les consommateurs continueront à soutenir la croissance, notamment en raison de l’excédent d’épargne qui s’est accumulé ces dernières années. En outre, les investissements des secteurs privé et public jouent également un rôle de soutien. » Il affirme également que jamais les bilans des entreprises n’avaient été aussi solides. « Des investissements peuvent être réalisés et sont nécessaires, notamment pour rapprocher les installations de production. Et ces investissements plus élevés stimuleront la productivité et atténueront l’impact démographique négatif. »
Taux d’intérêt
JPMorgan AM souligne que c’est le bon moment pour emprunter de l’argent, car on peut aujourd’hui le faire à des taux d’intérêt réels négatifs. « Ce sera donc une mauvaise année pour les épargnants, les liquidités et les investissements à revenu fixe. Et l’investisseur devra prendre plus de risques que jamais. » Juvyns ajoute que le rendement réel sera négatif à long terme sur la plupart des marchés. En effet, les banques centrales ne peuvent pas laisser les taux d’intérêt augmenter trop rapidement, sous peine de tordre le cou aux gouvernements. Il table sur une normalisation de la politique monétaire partout sauf en Chine, mais celle-ci pourrait être plus lente que ce que les marchés intègrent actuellement.
« Nous pensons que la Réserve fédérale procédera à deux hausses des taux d’intérêt en 2022, à savoir en juin et en septembre, et l’assouplissement quantitatif aux États-Unis devrait être terminé en juin. Dans le même temps, le déficit budgétaire s’améliorera, de sorte que le gouvernement devra émettre moins, ce qui empêchera les taux d’intérêt d’augmenter trop fortement. À la fin de l’année 2022, nous prévoyons également des taux d’intérêt positifs en Allemagne et en Europe. » Sur le front des obligations, Juvyns s’intéresse désormais principalement au haut rendement, car jamais le taux de défaut après une récession n’avait encore été aussi bas, ainsi qu’aux obligations chinoises. » Le rendement est élevé et offre une grande diversification, tandis que la banque centrale est plus susceptible de réduire les taux d’intérêt. »
Marchés actions
Vincent Juvyns souligne qu’en période d’inflation et de taux d’intérêt réels négatifs, les actions n’ont presque jamais donné de rendements négatifs par le passé. « Nous sommes donc toujours très positifs sur les actions, même si la croissance des bénéfices va se normaliser en 2022. Les coûts pour les entreprises vont certes augmenter, mais il n’y a plus de tabou sur l’augmentation des prix : les marges resteront fortes. En d’autres termes, les actions constituent une bonne couverture contre l’inflation. Les valorisations sont par contre assez élevées, même si elles sont légèrement inférieures à celles du début de 2021 grâce à la forte croissance des bénéfices. »
Le stratège conclut que le S&P a un potentiel de 5 à 6 % si la croissance des bénéfices atteint 8 %. Il qualifie également la Chine d’un de ses marchés favoris et s’attend à ce que les dividendes et les acquisitions d’actions propres regagnent en importance. « Compte tenu de la hausse attendue des taux d’intérêt, nous penchons davantage pour la valeur aux États-Unis et voyons donc les actions à dividendes surperformer. Les secteurs de qualité et cycliques ont également notre préférence. » Enfin, JPMorgan AM continuera à investir dans le thème structurel de la transition énergétique. « Il est cependant plus difficile d’acheter de l’énergie propre et de vendre l’ancien secteur énergétique. Ce dernier secteur est aujourd’hui valorisé selon le pire scénario possible et a de toute façon encore une petite place dans le portefeuille. Nous pensons également que le secteur des énergies propres en Chine est largement sous-estimé. »
Des étapes supplémentaires pour un rendement supérieur à la moyenne
Pour les 10 à 15 prochaines années, JPMorgan AM calcule un rendement annualisé de 2,8 % pour un investisseur en euros dans un portefeuille passif 60/40. « C’est plutôt décevant et contraste fortement avec ce que nous avons connu au cours des dix dernières années, à savoir un rendement annuel de 6 %. » Cette répartition 60/40 sera insuffisante et les gestionnaires d’actifs ont donc beaucoup de travail à faire pour combler cet écart de plus de 3 %, indique le groupe financier.
Cependant, le gestionnaire d’actifs déclare qu’il existe différentes façons de fournir ce rendement supplémentaire. « Premièrement, dans un environnement à faible rendement, la gestion active peut faire la différence grâce à une allocation d’actifs et une sélection de titres tactiques. Sur les marchés financiers, les valorisations, qui se trouvent en moyenne à des niveaux record, varient considérablement et il existe de très nombreuses possibilités de générer de l’alpha moyennant un peu de travail de recherche. Deuxièmement, la sélection des entreprises les mieux notées sur le plan ESG peut fournir un rendement supplémentaire. Les 20 % d’entreprises ESG les plus performantes génèrent en moyenne 2,5 % d’alpha par an par rapport à l’indice.
Les entreprises affichant un score ESG plus élevé sont plus rentables et moins volatiles. Nous essayons d’identifier ces gagnants ESG grâce à notre propre système de notation. Troisièmement, de l’alpha supplémentaire peut être trouvé dans des alternatives telles que le capital-investissement, la dette privée, les fonds spéculatifs et les actifs réels. Enfin, la diversification est également essentielle, c’est pourquoi la Chine ne cesse de gagner en importance. »