Pour les investisseurs qui ont jeté leur dévolu sur les fonds obligataires internationaux, l’évolution de la courbe des taux est aujourd’hui au cœur des préoccupations. Puisqu’une structure inversée des taux est l’un des facteurs prédictifs d’une récession, ils se demandent ce qu’augure la structure actuelle de la courbe.
Jeroen Siecker, analyste chez Morningstar, souhaite revenir sur ce phénomène avant de présenter les cinq fonds obligataires commercialisés en Belgique affichant le meilleur rendement. Car les références à la valeur prédictive de l’inversion de la courbe des taux par rapport à l’imminence d’une récession se multiplient ces derniers temps. Et pour cause : fin mars 2019, les titres du Trésor américain à 3 mois ont pendant quelques jours servi un rendement supérieur à celui des obligations à échéance 10 ans ; la courbe des taux s’était bel et bien inversée.
Comme l’explique Jeroen Siecker, « nous avons constaté une inversion des taux aux États-Unis avant les récessions de 1981, 1991 et 2001. Le même phénomène a aussi annoncé la crise financière majeure de 2008, deux ans avant sa survenue. »
L’une des principales réserves que l’on peut formuler sur la valeur prédictive de la courbe des taux est le fait qu’elle ne permet pas de déterminer avec précision le début de la récession. Par le passé, les récessions ont commencé entre six mois et deux ans après l’inversion de la courbe des rendements.
Il semble donc judicieux de s’interroger sur l’origine de cette inversion : pourquoi les taux à court terme ont-ils augmenté et/ou les taux à court terme baissé ?
Hausse des taux à court terme
La hausse des taux à court terme peut être liée à la politique menée par la banque centrale, qui prend en compte deux signaux importants pour déterminer l’inflation future : en premier lieu, l’augmentation de la masse monétaire à court terme, et deuxièmement, l’amélioration des variables macroéconomiques et financières (évolution des salaires, taux de change, politique budgétaire…).
Une fois que l’on a déterminé comment vont évoluer les taux à court terme, il est temps de se pencher sur l’influence sur les taux à long terme. Les intérêts représentent le prix de l’argent, dans la mesure où ils rémunèrent un prêt. Plus la durée du prêt est longue, plus le taux est élevé.
Le taux à long terme se compose en effet de deux primes : la prime de liquidité et la prime de risque. La prime de liquidité compense le fait que l’argent ne peut, tant qu’il est prêté, être utilisé à d’autres fins. Notons que cette prime diminue s’il y a suffisamment d’argent en circulation. Or, c’est le cas depuis des années déjà, car les banques centrales d’Amérique, d’Europe et du Japon ont régulièrement recours à la planche à billets.
L’autre volet est la prime de risque, qui compense notamment les dangers inhérents à la durée de détention d’un titre patrimonial. Plus la durée est longue, plus les risques d’inflation, de change et de débiteur, notamment, augmentent. La qualité du débiteur a aussi une influence sur la prime : un émetteur moins solvable devra s’acquitter d’une prime plus importante. Dans la mesure où l’inflation se maintient depuis longtemps sous l’objectif de la banque centrale, la prime de risque diminue aussi actuellement. Si l’on ajoute à cela les perspectives économiques peu réjouissantes pour l’avenir, on comprend alors pourquoi les taux à long terme sont orientés à la baisse.
Les cinq premiers fonds obligataires
Après avoir éclairci cette question qui domine réellement le débat sur les marchés obligataires, Jeroen Siecker nous présente maintenant les cinq meilleurs fonds de placement de la catégorie Morningstar
« Obligations internationales », sur la base de leur rendement sur la période avril 2018 - fin mars 2019. Le classement est dominé par le fonds Templeton Global Bond, géré par Michael Hasenstab, et qui s’est vu attribuer une note Silver de la part des analystes Morningstar.
Ce fonds s’affranchit de toute référence à un indice. « Michael Hasenstab construit le portefeuille sur la base d’une recherche fondamentale sur les emprunts d’État et les monnaies des pays concernés. Dans sa catégorie, il se distingue en évitant les emprunts à faible rendement des pays développés, et en mettant l’accent sur les pays émergents où il voit les meilleures perspectives financières et budgétaires. Le gérant est aussi disposé à acheter des emprunts d’État de pays boudés par les autres opérateurs. Il a notamment investi dans des titres irlandais lors de la crise de la zone euro en 2011, dans des titres ukrainiens en 2015, alors que la dette du pays faisait l’objet d’une restructuration, ou encore dans la dette argentine, malgré les troubles politiques récents. »
Selon l’analyste, le fonds se distingue aussi par ses positions à long terme face au yen et à l’euro. Le fonds tire parti de la hausse des taux, dans la mesure où il a une sensibilité négative de 1,4. Cette stratégie a été mise en place en juillet 2018.
À la deuxième place de ce top 5 figure le fonds Dodge & Cox Worldwide Global Bond. La société mère américaine a lancé la variante européenne de cette stratégie en décembre 2014.
« Le fonds investit une partie de son actif dans des emprunts d’État libellés en dollars, mais peut également envisager des placements en d’autres monnaies. » En outre, le fonds peut également investir dans des obligations d’entreprises, des obligations adossées à des actifs ou encore d’autres instruments obligataires. Pour garantir la diversification du portefeuille, le fonds doit investir au moins dans trois pays, sphère émergente comprise. »