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Dans un monde saturé de polarisation politique et de scepticisme partisan, il est facile de se perdre dans le bruit entourant le changement climatique, l’écoblanchiment, l’excès de réglementations et ce que d’aucuns qualifient simplement de wokeness. Dans ce contexte tumultueux, une révolution tranquille s’est cependant produite dans le secteur de l’investissement. 

Au cours des dix dernières années, les fonds dédiés à l’investissement responsable se sont révélés constituer un pilier de stabilité, défiant tous les sceptiques et parvenant à conserver leur part de marché tout en voyant leurs actifs sous gestion croître. Malgré les remous politiques qui secouent la scène internationale, tant les investisseurs particuliers qu’institutionnels soulignent unanimement leur engagement en faveur de l’investissement responsable, transcendant ainsi les clivages partisans.

Une étude récente du CFA Institute met en exergue cette tendance transformationnelle et montre comment les sociétés d’investissement intègrent de plus en plus les facteurs environnementaux, sociaux et de gouvernance (ESG) dans leurs processus décisionnels. Non seulement les fonds d’investissement responsable ont conservé leur part de marché, mais ils ont également connu une croissance régulière, évoluant de concert avec le marché plus large des fonds d’investissement. L’augmentation mondiale des actifs sous gestion témoigne d’un engagement collectif en faveur de la durabilité. 

Idées reçues

L’une des principales idées reçues chez les détracteurs de l’ESG est la conviction que privilégier la durabilité et les pratiques éthiques se fait au détriment du rendement financier. Cependant, de nombreuses études ont démontré que les entreprises affichant de solides performances ESG surperforment souvent leurs homologues sur le long terme. Les investisseurs intégrant les facteurs ESG dans leur processus décisionnel sont mieux à même d’identifier les entreprises dotées d’une solide gestion des risques et d’une vision stratégique, ce qui conduit finalement à des portefeuilles plus stables et plus résilients.

Les facteurs ESG constituent un puissant outil de gestion des risques. Les entreprises qui ignorent les réglementations environnementales, les responsabilités sociales ou les principes de bonne gouvernance s’exposent à des risques juridiques, opérationnels et de réputation accrus. Les investisseurs soucieux des critères ESG reconnaissent l’importance d’éviter ces risques, ce qui permet de constituer des portefeuilles résilients, mieux armés pour faire face aux défis imprévus et aux fluctuations du marché.

Nous observons au niveau mondial un changement de paradigme dans l’attitude à l’égard de la durabilité et de la responsabilité des entreprises. Les gouvernements, les régulateurs et les consommateurs exigent de plus en plus de transparence et de responsabilité de la part des entreprises. Les entreprises qui ignorent ou nient l’importance des critères ESG risquent de perdre les faveurs des investisseurs et des clients et de compromettre ainsi leur pérennité à long terme.

Décisif

Il devient de plus en plus crucial d’afficher de bonnes performances ESG pour pouvoir accéder aux capitaux. Les investisseurs affichent une préférence croissante pour les entreprises correspondant à leurs objectifs de durabilité. Par conséquent, il est souvent plus facile pour celles affichant une image positive en matière d’ESG de lever des capitaux et de négocier des conditions de financement avantageuses. Les détracteurs de l’ESG peuvent se retrouver désavantagés, car le coût du capital pour ces entreprises peut augmenter au fil du temps.

Au-delà des considérations financières, les critères ESG jouent un rôle déterminant dans la définition de l’impact social et de la réputation d’une entreprise. Les décisions d’achat des consommateurs sont de plus en plus influencées par les valeurs de l’entreprise et son engagement envers le développement durable. Non seulement les acteurs soucieux des critères ESG apportent une contribution positive à la société, mais ils tissent également des liens plus étroits avec leurs clients, ce qui favorise la fidélité à la marque et sa pérennité.

 Les détracteurs de l’ESG négligent une évolution cruciale dans le paysage de l’investissement. Les preuves sont indéniables : l’intégration des critères ESG dans les stratégies d’investissement est non seulement moralement justifiée, mais aussi financièrement judicieuse. Alors que la communauté internationale accorde une importance croissante à la durabilité (nos propres membres et candidats réclament l’intégration de plus de thématiques liées à l’ESG dans nos qualifications), les considérations ESG joueront probablement un rôle encore plus significatif dans le processus décisionnel en matière d’investissement. Les investisseurs qui se rallient à cette évolution en tireront avantage tant d’un point de vue financier que moral. En revanche, ceux qui nient l’importance de l’ESG risquent de se retrouver du mauvais côté de cette transformation dans le monde financier.

Motivations différentes

Une étude du CFA Institute révèle que les motivations des investisseurs particuliers et institutionnels pour intégrer les critères ESG diffèrent, ce qui complexifie le paysage mondial pour les gestionnaires d’actifs, confrontés au défi de trouver un équilibre entre les intérêts des parties prenantes et les considérations réglementaires. Par exemple, bien que la propriété privée prédomine à l’échelle mondiale, le volume des actifs institutionnels a dépassé celui des actifs privés en 2018 aux États-Unis, ce qui indique un changement dans les préférences des demandeurs.

Comprendre ces évolutions est vital pour les professionnels de l’investissement qui doivent se frayer un chemin dans un paysage où les fonds d’investissement responsable acquièrent une importance croissante. Cela explique pourquoi le CFA Institute est aussi engagé dans le soutien au développement professionnel dans ce domaine. Se tenir à jour représente indéniablement un véritable défi pour les professionnels de l’investissement, notamment pour garantir des connaissances et une capacité suffisantes. C’est l’une des principales raisons pour lesquelles le CFA Institute a décidé de lancer le Climate Risk, Valuation and Investing Certificate et d’apporter son soutien à la Capacity-building Alliance of Sustainable Investment (CASI).

Le chemin vers l’investissement responsable ne consiste pas seulement à adopter le changement, mais aussi à reconnaître notre capacité à façonner un avenir durable où la réussite financière peut coexister harmonieusement avec la responsabilité sociale et environnementale. Cependant, en dépit de preuves de plus en plus nombreuses et d’un consensus mondial quant à l’importance de l’ESG, il existe toujours des sceptiques et des détracteurs qui remettent sa pertinence en question. Hormis l’intérêt personnel, je ne comprends pas très bien pourquoi on soutiendrait que l’ESG n’est pas judicieux d’un point de vue financier.

Paul Moody est Managing Director du CFA Institute, partenaire d’Investment Officer.

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