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Les catastrophes naturelles peuvent frapper durement le marché de l’immobilier, mais les investisseurs n’en sont pas suffisamment conscients. Une correction des actions immobilières se profile à l’horizon.

C’est ce qu’affirme Lucas Vuurmans, gestionnaire de portefeuille chez Van Lanschot Kempen, dans un entretien avec Investment Officer. Pour le marché américain des bureaux, on s’attend à une correction due aux risques climatiques de plus de 3 % en moyenne. Dans les zones plus risquées, la baisse de valeur pourrait même atteindre 10 à 12 %. 

Le mois d’avril a déjà été marqué par un début actif de la saison des tornades aux États-Unis, avec plus de 300 tornades enregistrées entre janvier et mars. En juin, près de 100 personnes ont été blessées par des chutes de grêle extrêmes lors d’un concert près de la ville américaine de Denver. 

Selon M. Vuurmans, il s’agit d’un sujet difficile : quel est l’impact du changement climatique sur l’immobilier ? Après tout, personne ne connaît la réponse exacte à cette question.

Selon Van Lanschot Kempen, il est déjà nécessaire d’inclure les risques climatiques dans les modèles d’évaluation immobilière. Pour rendre ces risques transparents, le gestionnaire d’actifs a fait appel à une aide extérieure. Dans un premier temps, la maison de fonds a cherché à coopérer avec des organisations à but non lucratif et des entreprises technologiques, mais les données qu’elles fournissaient étaient insuffisantes ou beaucoup trop chères, explique M. Vuurmans.

Unir ses forces avec Munich Re

Nous avons fini par collaborer avec le réassureur Munich Re», explique l’expert immobilier de Van Lanschot Kempen. Depuis quarante ans, ce réassureur collecte des données sur toutes sortes de catastrophes dans le monde et sur leur impact financier. Ces données nous sont extrêmement utiles. Elles nous permettent de nous faire une idée beaucoup plus précise de l’impact anticipé des catastrophes naturelles sur l’immobilier».

Lors de l’évaluation des biens immobiliers, Van Lanschot Kempen tient compte, entre autres, de l’emplacement, de la qualité du bien et de la solvabilité des locataires. Depuis plusieurs années, la société de gestion intègre également les risques climatiques. Ceux-ci ont désormais une pondération de 20 % dans l’évaluation totale. Si nous constatons dans cinq ans que le changement climatique évolue plus rapidement que prévu, notre modèle d’évaluation nous permet d’accorder aux risques climatiques une pondération plus importante dans l’ensemble.

Les catastrophes naturelles mises dans le même sac

Selon M. Vuurmans, il convient de noter qu’à l’heure actuelle, toutes les catastrophes naturelles sont encore mises dans le même sac. Les tremblements de terre ne pèsent pas plus lourd dans le modèle d’évaluation que les inondations, alors qu’il est peu probable que l’impact de ces catastrophes soit le même. Nous n’avons encore rien trouvé à ce sujet. Au cours des cinq prochaines années, il se peut qu’un risque joue un rôle plus important que l’autre dans l’évaluation des biens immobiliers. Nous devrons alors l’ajuster dans notre méthodologie d’évaluation, mais nous ne sommes pas encore en mesure de le faire en raison du manque de données.

Bien que Van Lanschot Kempen ait trouvé un moyen de rendre les risques climatiques transparents avec Munich Re, beaucoup d’autres parties ont encore du mal à le faire. Tout le monde est en train de chercher», déclare Vuurmans. Il n’existe pas encore de norme pour l’évaluation des risques climatiques.

Selon l’expert, les régulateurs et les introductions en bourse devraient faire davantage pression sur les sociétés immobilières cotées en bourse pour qu’elles rendent compte de l’impact du changement climatique sur leur portefeuille. Les entreprises ne font pas vraiment de rapports sur les risques climatiques». Selon lui, les sociétés immobilières n’interviennent en fait que lorsque des catastrophes naturelles se produisent déjà.

D’importantes dépréciations en vue

Mais quel est précisément l’impact anticipé du changement climatique sur l’immobilier ? M. Vuurmans donne deux exemples à l’aide de divers scénarios RCP (Representative Concentration Pathway). Ces scénarios décrivent l’évolution des gaz à effet de serre jusqu’en 2300. Le scénario RCP8.5 est le plus extrême et le plus pessimiste. Il implique que rien ne soit fait pour contrer le réchauffement climatique. Le scénario RCP4.5 est considéré comme le scénario de référence, dans lequel les mesures nécessaires ont été prises pour réduire les émissions de CO2

Dans l’exemple de Van Lanschot Kempen, la valeur d’un immeuble de bureaux au Texas, une région présentant un risque accru de catastrophes naturelles, pourrait chuter de 7 % dans un scénario 4.5. Un immeuble similaire situé dans le Massachusetts, où la probabilité de catastrophes naturelles est plus faible, voit sa valeur diminuer d’environ 2 %.  

Si l’on tient compte d’un scénario RCP 8,5, la propriété au Texas pourrait perdre jusqu’à 16 % de sa valeur et celle du Massachusetts à peine 10 %.

Les risques climatiques ne sont pas suffisamment pris en compte

Selon M. Vuurmans, les investisseurs tiennent peu compte de ces baisses de valeur. Les risques climatiques ne sont pas suffisamment pris en compte par le marché». Cela signifie qu’une correction des actions immobilières se profile à l’horizon, selon le gestionnaire de portefeuille. Pour le marché américain des bureaux, une correction due aux risques climatiques de 3,3 % en moyenne est attendue. Dans les zones plus risquées, la baisse de valeur pourrait même atteindre 10 à 12 %.

En Europe, les risques de catastrophes naturelles semblent moins importants. Les vagues de chaleur et les inondations, en particulier, peuvent entrer en ligne de compte. Mais Munich Re estime que l’impact des catastrophes naturelles en Europe est assez faible par rapport aux États-Unis.

M. Vuurmans s’attend donc à ce qu’il y ait moins de dépréciations importantes dues aux risques climatiques en Europe. L’immobilier européen coûte actuellement moins cher que l’immobilier américain ou asiatique, par exemple, mais cela est principalement dû à d’autres facteurs, notamment la crise énergétique et la guerre en Ukraine.

Migration vers des zones plus risquées

Selon M. Vuurmans, il est également frappant de constater que la demande de biens immobiliers dans les zones à haut risque est en fait en augmentation, en particulier aux États-Unis, en partie en raison d’un climat fiscal plus favorable et d’un climat plus chaud. En raison des coûts élevés dans des villes comme New York et San Francisco, les gens s’installent dans les régions chaudes du sud, mais nous pensons qu’il s’agit d’un phénomène à court terme. Les risques climatiques sont tellement plus élevés dans le sud qu’ailleurs que les gens quitteront de toute façon cette région à un moment ou à un autre», explique M. Vuurmans.  

 

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