La taille n’est pas forcément un atout. Les plus grands centres commerciaux et les plus hautes tours de bureaux comptent parmi les biens immobiliers ayant le plus souffert de la crise du coronavirus. Ces biens font souvent partie de grands portefeuilles institutionnels ou de fonds immobiliers cotés en bourse.
Une cotation en bourse amplifie en outre les évolutions défavorables, ce qui, en raison de l’effet de levier, se traduit par une évolution dramatique des cours.
Quiconque pensait il y a un an qu’une tour de bureaux à Canary Wharf offrait la sécurité en est pour ses frais. Contrairement à l’immobilier à petite échelle, tel qu’habitations, petits complexes multifonctionnels avec beaucoup de mètres carrés au rez-de-chaussée et bâtiments bas flexibles, avec fenêtres pouvant s’ouvrir et suffisamment d’espace extérieur. Ce type d’immobilier est souvent entre les mains d’investisseurs privés et, grâce aux faibles taux d’intérêt, prend de la valeur.
Immobilier commercial bouleversé
Le coronavirus a bouleversé le monde de l’immobilier. Néanmoins, il y a dans l’immobilier des tendances qui étaient déjà visibles avant la crise du coronavirus. Les problèmes des centres commerciaux se posent depuis de nombreuses années déjà en raison de l’essor des achats en ligne, une évolution peu favorable pour les investisseurs dans l’immobilier commercial. Avant l’essor du shopping en ligne, il y avait déjà trop de magasins dans le monde. Cet immobilier commercial est souvent financé par des capitaux empruntés, ce qui signifie que le fournisseur des fonds propres possède une proportion des magasins à peu près égale à la perte de chiffre d’affaires de ces mêmes magasins au profit de la concurrence en ligne.
Vu sous cet angle, une grande partie des fonds propres (la valeur comptable) s’était déjà évaporée avant la crise du coronavirus. La pandémie a fait que la part de marché des ventes en ligne est passée d’environ 15 % à plus de 30 %. De nombreux commerçants en ligne ont soudain plus de trois ans d’avance sur les prévisions de croissance délivrées précédemment. En conséquence, on assiste à une pénurie aiguë de centres de distribution. Amazon est même en pourparlers avec Simon Property Group (le plus grand exploitant de centres commerciaux des États-Unis) pour louer les magasins vacants de JC Penney et Sears en tant que centres de traitement des commandes : des entrepôts proches du client pour réduire les coûts sur le fameux ‘dernier kilomètre’. Les surfaces commerciales vacantes de JC Penney et Sears sont d’une belle taille et les magasins sont souvent situés à proximité de grands axes routiers, ce qui les rend parfaitement adéquats.
Bureaux paysagers définitivement enterrés
Avant la crise du coronavirus, les bureaux paysagers touchaient déjà à leur fin. Il y a quelques années, une étude de Harvard avait déjà montré qu’un bureau paysager ne favorisait pas l’interaction. Le contact visuel dans une entreprise composée de bureaux paysagers diminue de deux tiers par rapport à une entreprise dont les bureaux sont fermés. Le trafic de mails a par contre augmenté de plus de 50 % et ces messages sont également 75 % plus longs que lorsque chacun se trouvait encore dans son propre bureau. Les bureaux paysagers sont donc préjudiciables à la productivité.
Les entreprises qui emploient beaucoup de personnel possèdent de grands bureaux paysagers installés dans de hauts bâtiments équipés d’ascenseurs, des bâtiments qui sont devenus totalement inutilisables en raison de la crise du coronavirus. L’impact est également si important qu’il est peu probable que ces bâtiments puissent encore être utilisés comme bureaux. Il est possible qu’ils soient transformés en habitations ou en centres de repos et de soins en réponse au nombre croissant de personnes âgées.
Une grande partie des espaces de bureaux a maintenant été transférée à domicile. Le télétravail permet une plus grande productivité par rapport à un espace de bureau fermé, sans parler d’un bureau paysager. Cependant, la maison doit être suffisamment grande pour cela, d’où une nouvelle vague de suburbanisation. La distance par rapport au travail est moins problématique, mais un espace (extérieur) suffisant est devenu plus important.
L’immobilier direct en tire avantage
Le petit investisseur immobilier attentif à la taille humaine en tire avantage. Les gens sont plus souvent à la maison et sont donc prêts à dépenser davantage pour leur propre habitation. Les centres de construction sont plus sollicités que jamais et il faut attendre facilement plus de six mois pour faire installer une nouvelle cuisine ou une nouvelle salle de bains. Si autrefois, les mètres carrés situés au rez-de-chaussée d’un immeuble de bureaux étaient parmi les moins chers, le rez-de-chaussée est aujourd’hui très prisé. De même, la valeur des bureaux multifonctionnels, accueillant des prestataires de services tels que dentistes et autres petites entreprises spécialisées, est également en hausse.
Les grands bureaux restent fermés en raison de leur taille, mais dans les petits bureaux, il n’y a pas de grands groupes. Ce sont des bureaux dans lesquels il est possible de travailler même avec les règles strictes relatives au coronavirus, ne serait-ce que parce qu’il est possible d’ouvrir les fenêtres. La grande majorité de ce type de biens n’est pas cotée en bourse, ce qui permet également de garantir une évolution de la valeur beaucoup plus équilibrée que pour l’immobilier coté en bourse. En raison de ces évolutions, les différences de rendement au sein du secteur immobilier sont plus importantes que jamais cette année. Les biens immobiliers cotés en bourse présentent de terribles inconvénients par rapport aux avantages des investissements immobiliers directs.
Han Dieperink est investisseur et consultant indépendant. Plus tôt dans sa carrière, il a été chief investment officer chez Rabobank et Schretlen & Co. Il fait part de son analyse et de ses commentaires sur les conséquences de la crise du coronavirus pour l’économie et les marchés sur Fondsnieuws. Ses articles paraissent le mardi et le jeudi.