L’inflation ne restera pas élevée en 2024 et les arguments en faveur d’un portefeuille neutre sont nombreux. Ces deux attentes étaient partagées par les quatre CIO qui ont clôturé par un débat l’événement IO Outlook 2024 qui s’est tenu jeudi à Amsterdam. Sur pratiquement tous les autres sujets, ils étaient en désaccord.
Atterrissage en douceur ou brutal pour l’économie américaine ? Continuer à investir dans des actions durables ou pas ? S’en tenir aux Magnificent Seven ou opter pour des segments de marché pour lesquels les attentes sont actuellement faibles ? Anticiper l’élection de Donald Trump en tant que président des États-Unis ?
Comme il sied aux investisseurs, les CIO d’Auréus, ING, Rabobank et Van Lanschot Kempen (par ordre alphabétique) ont eu du mal à se mettre d’accord concernant les réponses à ces questions jeudi.
Il s’agit en effet de questions difficiles, car elles relèvent de la prédiction. Bob Homan, responsable l’Investment Office d’ING : « Je ne sais pas trop comment aborder les possibles développements géopolitiques. Dois-je anticiper maintenant la possible réélection de Trump à la présidence des États-Unis ? Les taux d’intérêt vont-ils alors augmenter ou diminuer ? Je n’en ai aucune idée. » Luc Aben, économiste en chef chez Van Lanschot Kempen : « Trump veut imposer des droits de douane de 10 % sur tout ce qui entre aux États-Unis. Il faudra tout de même tenir compte de cette option. »
2 contre 2
‘Le risque’ Donald Trump faisait partie du débat sur la question de savoir si l’économie américaine (Bob Homan : « C’est encore là que tout se passe ») allait connaître un atterrissage en douceur ou brutal l’année prochaine. Il y avait égalité des voix, 2 contre 2. Bob Homan et Luc Aben penchaient pour un atterrissage brutal (Aben : « Mais ce ne sera pas une récession avec un grand R »), tandis que Taoufik Boussebaa, responsable de la stratégie d’investissement chez Rabobank, et Han Dieperink, CIO d’Auréus, considéraient toujours que l’atterrissage en douceur était le plus probable. Han Dieperink devait cependant reconnaître qu’il s’agissait d’un « scénario très étroit ». En effet, une transition aussi fluide vers une croissance plus faible ne s’est produite qu’une seule fois dans l’histoire économique récente.
Cependant, Taoufik Boussebaa voyait suffisamment de raisons de ne pas être aussi pessimiste : « Les entreprises sont en bonne santé, les bénéfices augmentent au niveau mondial et les consommateurs sont également en bonne position, même si le taux d’épargne des consommateurs américains a vraiment chuté par rapport à il y a six mois. Mais les réserves sont là, dans le secteur privé, ce que je considère comme un point important. »
Han Dieperink a complété cette argumentation en soulignant qu’au cours des prochaines années, la croissance restera alimentée par l’innovation, notamment - et surtout - dans le domaine de l’intelligence artificielle. Cela se traduira-t-il par des résultats immédiats en 2024 ? Han Dieperink : « De toute façon, une vision à un an n’a aucun sens pour les investisseurs. »
Entreprises technologiques
Mais c’était bien sûr le format de la discussion, et les recommandations concrètes pour les portefeuilles d’actions ont tout de même été abordées. Celles-ci se sont concentrées sur la question de savoir si les sept grandes entreprises technologiques qui ont dopé l’indice américain en 2023 restaient une bonne idée en 2024. Luc Aben a indiqué qu’en ce qui concerne les actions, il « commencerait l’année avec un peu plus de prudence », surtout pour l’Europe et l’Asie. « Pour ces régions, nos attentes sont moins optimistes que les moyennes du marché à l’heure actuelle. » Il a également préconisé un mix légèrement plus défensif, qui inclurait davantage d’investissements dans le secteur de la santé, par exemple. « Les investissements dans le secteur de la santé peuvent bénéficier de l’innovation tout en étant de nature défensive. »
En revanche, Bob Homan (ING) a affirmé « rester pleinement intéressé » par « les Microsoft et Nvidia de ce monde. » « Ces entreprises ont été les plus performantes cette année et nous restons très positifs à leur égard. Ce sont de très grandes entreprises et elles font beaucoup de choses différentes, ce qui diversifie le risque. » Taoufik Boussebaa, stratège chez Rabobank, optait cependant pour une orientation différente : « À un moment donné, il ne sera plus possible pour ces entreprises de surpasser constamment les attentes. Je me concentrerais davantage sur les secteurs où les attentes sont faibles, comme l’Asie et le Japon. Sortir des obligations et se tourner vers les actions dans ces régions me semble être une bonne option. »
Moins de 2 %
Chacun des quatre CIO a indiqué s’attendre à un environnement inflationniste modéré l’année prochaine. Han Dieperink prévoyait même que les indices des prix passeraient à un moment donné sous la barre des 2 %, tandis que d’autres tablaient sur une inflation moyenne de 4 ou 5 %. D’où la conviction commune que le portefeuille neutre est de nouveau ‘tout à fait d’actualité’. Bob Homan n’a cependant pas pu s’empêcher de commenter brièvement ce consensus. « Selon moi, le portefeuille neutre n’a jamais disparu. »