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L’investissement passif est devenu populaire au cours des 25 dernières années. Aujourd’hui, les investisseurs passifs comptent parmi les plus grands actionnaires de presque toutes les sociétés de l’indice. Il y a dix ans, j’avais déclaré lors du Fondsevent que si tout le monde investissait passivement, cela signifierait la fin du capitalisme.

Ma remarque avait été rejetée par les médias comme une absurdité, une voix de l’ordre établi qui tentait de faire obstacle au progrès. Il est vrai que j’ai toujours été un grand partisan de l’investissement indiciel, mais là n’est pas la question. Il semble être devenu une religion fermée à la critique et qui n’écoute que ceux qui prêchent l’évangile de l’indice. Néanmoins, je voudrais formuler les observations critiques suivantes.

L’investissement passif est basé sur l’hypothèse de l’efficience des marchés financiers. Les prix du marché sont un reflet de toutes les informations disponibles. Selon cette hypothèse, il n’y a pas de coûts de transaction, toutes les informations sont gratuites, les attentes sont homogènes et chaque investisseur est pleinement rationnel. Dans le monde réel, ce n’est bien évidemment pas le cas. Néanmoins, sous la devise du jeu à somme nulle (tous les investisseurs forment ensemble le marché et reçoivent en tant que groupe le rendement du marché après déduction des coûts), des milliards affluent chaque jour vers l’indice.

Stratégie du momentum 

C’est de l’argent qui ne s’intéresse pas aux fondamentaux, mais influence chaque jour activement le rendement. Les actions de l’indice bénéficient de ces achats. Celui qui achète chaque jour dans l’indice suit une stratégie de momentum. Depuis 1995, le momentum a surperformé la valeur dans 73 % des périodes de trois ans, et même dans 85 % des cas depuis 2011. L’investissement indiciel est donc une stratégie de momentum actif.

Une deuxième conséquence de la popularité de l’investissement indiciel est une plus grande corrélation entre les différentes actions de l’indice. Le calcul de la corrélation nécessite une grande puissance de calcul, c’est pourquoi les données d’avant 2010 disponibles sont insuffisantes. Cependant, il existe davantage de données concernant le nombre de hausses et de baisses. Un jour où la bourse affiche peu de résultats, il y a probablement autant de hausses que de baisses. Avec davantage de résultats, il y a plus de hausses ou plus de baisses. La tendance dans le nombre de hausses et de baisses en cas de résultats plus importants a été clairement à la hausse au cours des dernières décennies, ce que nous avons constaté dans une mesure extrême lors de la récente correction. Sur les 20 jours de bourse de la correction actuelle, au moins 470 actions de l’indice ont évolué dans le même sens, ce qui est sans précédent. Le spreading n’est plus nécessaire, l’indice se négocie comme une action.

Liquidité

Il est maintenant facile de dire que c’est la faute de l’investisseur privé qui, dans la panique, vend ses fonds indiciels. Mais ce n’est pas le cas. Les investisseurs indiciels, tant professionnels que particuliers, ne sont pas intéressés par le prix. Ils investissent selon un plan et s’y tiennent. Cela signifie également qu’ils n’achètent pas si les investisseurs actifs veulent réduire le risque, le prix n’est pas pertinent. Le marché est donc beaucoup moins liquide qu’il n’y paraît à première vue. Les corrections sont alors rapidement amplifiées. 

Il est donc possible que le momentum, la corrélation et la liquidité aient joué un rôle majeur dans cette correction. C’est un problème de marché et donc, de capitalisme. Les épargnes ne sont plus allouées de manière optimale, ce qui nuit à l’innovation et à la productivité.

Heureusement, je suis cette fois-ci couvert par ma déclaration précédente concernant la fin du capitalisme. John Bogle, le fondateur de Vanguard et l’inventeur du fonds d’investissement indiciel, m’avait soutenu en mai 2017 en déclarant : « If everybody indexed, the only word you could use is chaos, catastrophe… The markets would fail. »

Han Dieperink est investisseur et consultant indépendant. Plus tôt dans sa carrière, il a été chief investment officer chez Rabobank et Schretlen & Co. Il fera quotidiennement part de son analyse et ses commentaires sur la crise du coronavirus à Investment Officer durant la période à venir.

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