Selon Stefan Isaacs, responsable adjoint de la division Fixed Income chez le gestionnaire britannique M&G, 2019 a été une excellente année pour les obligations grâce à la nouvelle baisse des taux d’intérêt et à la réduction des spreads de crédit. Selon lui, il n’y a donc aucun mal à mettre en lumière les risques potentiels et à porter un regard critique sur la catégorie d’actifs dans son ensemble. En tout état de cause, le gestionnaire du M&G (Lux) Optimal Income Fund voit encore (certaines) opportunités.
Risques potentiels
Aujourd’hui, on demande souvent à Stefan Isaacs si le moment d’une récession n’est pas venu, car l’expansion économique actuelle dure tout de même depuis 10 ans sans la moindre contraction. Il ne pense pas que ce soit le cas, car malgré les indicateurs économiques actuels assez bons, la croissance des 10 dernières années a été régulière et non excessive, et il n’y a en fin de compte pas beaucoup d’exagération dans le système. « Ce dernier a d’ailleurs permis aux banques centrales d’adopter et de maintenir une politique souple. »
Néanmoins, le gestionnaire estime que certains points doivent être tenus à l’œil et peuvent être qualifiés de risque. Tout d’abord, il identifie les dettes contractées par les entreprises, en particulier aux États-Unis. « De très nombreuses entreprises, en particulier celles de la catégorie ‘investment grade’, utilisent un effet de levier plus élevé que la normale grâce à la faiblesse des taux d’intérêt. » Deuxièmement, notamment en raison de l’incertitude des relations (commerciales) internationales, les entreprises ont réduit leurs investissements. « Lorsque les entreprises sont incertaines concernant les règles à suivre, elles préfèrent attendre », explique Isaacs. Et troisièmement, il épingle la courbe de rendement inversée aux États-Unis, avec un taux d’intérêt à deux ans sur les obligations qui, à un moment donné, a donné un rendement supérieur au taux à dix ans. « Historiquement, ce phénomène a souvent prédit une récession dans un délai de 1 à 2 ans. Même s’il n’y a plus d’inversion aujourd’hui, nous continuons à suivre cet indicateur de près. »
En revanche, le gestionnaire de M&G est positif à propos du consommateur américain, qui a retrouvé sa force et apporte un grand soutien. « La stabilité du marché immobilier, la vigueur du marché actions, un prix du pétrole qui n’a pas dérapé et le faible taux de chômage ont donné un coup de pouce à son pouvoir d’achat. » Et Isaacs est également de plus en plus confiant dans la force du consommateur européen.
Prudence de mise
Aujourd’hui, il est beaucoup plus difficile d’être gestionnaire d’un fonds obligataire. Il y a la forte performance de la classe d’actifs en 2019 qui rend la valorisation moyenne moins attrayante, l’énorme quantité d’obligations d’État avec un rendement négatif, ainsi que la difficulté de trouver un rendement acceptable sur les marchés obligataires. « Nous acceptons de prendre beaucoup de risques lorsque nous sommes bien rémunérés, mais sommes plus prudents lorsque le marché est cher, comme c’est le cas aujourd’hui. Il y a longtemps que nous n’avions plus détenu autant de liquidités dans le portefeuille du M&G (Lux) Optimal Income Fund. »
Cependant, le gestionnaire estime qu’il existe encore des opportunités ici et là. « Nous trouvons toujours de la valeur dans la partie inférieure de la catégorie Investment Grade chez des noms tels que AT&T, GM, Ford, etc., et surtout sur leurs obligations à long terme à 30 ans, par exemple, où le rendement est de 100 à 150 points de base plus élevé que sur les obligations assorties d’une échéance plus courte. Et à terme, nous voyons le spread de crédit se resserrer, ce qui peut générer d’importants gains en capital. En revanche, nous couvrons la partie intérêts. Nous avons également une exposition plus élevée que la moyenne aux obligations de banque et compagnies d’assurance, car le marché est encore trop négatif envers le secteur financier. »
Enfin, Isaacs pense que les obligations d’État sont chères. Il souligne également que votre pouvoir d’achat ne vous protégera pas dans les années à venir. Et bien qu’il ne compte pas directement sur une forte hausse des taux d’intérêt, le profil risque/rendement ne pose pas de problème. Par exemple, si le taux d’intérêt allemand à 10 ans devait passer à 1 %, le titulaire devrait prévoir une perte en capital de 11,4 %. « Ce ne sont pas des investissements sans risque », prévient le gestionnaire de M&G.