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La dette souveraine ne rapporte plus rien ; les investisseurs obligataires se tournent vers les obligations d’entreprises et la dette émergente, tout en suivant la politique des banques centrales et le conflit sino-américain.

Nombre de grands investisseurs estiment que les taux - tout comme la croissance - vont rester bas encore longtemps. Tant que les États-Unis ne connaîtront de contraction, ils trouveront surtout du rendement dans les obligations d’entreprises et la dette des pays émergents. 
À en croire une étude du cabinet Sprenkels & Verschuren, la plupart des gérants de fortune pensent que les emprunts d’État des grands pays européens ne rapporteront plus rien ces prochaines années. « Ils sont en revanche plus optimistes sur les emprunts souverains des marchés émergents, dont le rendement moyen est attendu à 2,8 % », affirme Caroline Bosch, associée au cabinet. Pour le haut rendement, les estimations varient entre 0,8 % et 4,8 %, avec une prévision médiane à 2,2 %.

Les anticipations de rendement déterminent dans une large mesure les conseils d’investissement donnés par les gérants. « Nous voyons par exemple que les chiffres élevés attendus par les gérants fiduciaires pour la dette émergente les amènent à conseiller davantage cette catégorie à leurs clients, au détriment des actions. Il est donc important que les fonds de pension soient conscients de l’ampleur de la divergence de ces estimations. »

Ces résultats montrent que les gérants sont nombreux à tabler sur une poursuite de la longue période de prospérité économique. Ils n’attendent pas de croissance spectaculaire, mais tant qu’il n’est pas question de contraction, le revenu fixe et les obligations d’entreprises feront belle figure – sauf en cas d’escalade du conflit commercial entre les États-Unis et la Chine ; mais là aussi, de nombreux investisseurs voient une issue favorable.

Moins de pessimisme

« Toute nouvelle escalade du conflit peut donner un coup de frein net à la croissance », avertit Patrick Dunnewolt, responsable Benelux chez Pimco ; mais à l’inverse, un accord raisonnable entre ces deux puissances stimulera l’économie. Le gérant obligataire estime toutefois que les tensions entre la Chine et les États-Unis ne disparaîtront pas totalement et continueront de susciter des inquiétudes. 
DWS fait preuve de davantage d’optimisme. Lors de la présentation des prévisions pour 2020, Stefan Kreuzkamp, le directeur des investissements, a déclaré que « le pessimisme [avait] déjà atteint son apogée », faisant référence aux heures les plus sombres du conflit commercial, du Brexit et de l’imbroglio politique en Italie. « Nous pensons que la Chine et les États-Unis vont parvenir à un accord sur les droits de douane. Le risque d’un Brexit dur est faible. En outre, l’UE et l’Italie vont trouver un terrain d’entente sur la question de l’endettement. »

L’attitude des banques centrales sera un autre facteur déterminant ces prochains temps. Pour Pimco, la Fed va continuer à stimuler l’économie américaine, même si elle pourrait ne pas répondre entièrement aux attentes du marché. « L’expérience montre que les marchés financiers pourraient dans ce cas surréagir, avec des dégagements sur les actions et les obligations d’entreprises », explique Patrick Dunnewolt.

Dette privée

Du fait de la politique menée par la BCE, Invesco mise surtout sur les obligations d’entreprises bien notées. « Les emprunts des entreprises se sont redressés en 2019 et devraient rester attrayants en 2020 » estime Rob Waldner, stratégiste revenu fixe chez Invesco. « Cela s’explique notamment par le programme de rachat d’actifs de la BCE, qui assure la liquidité nécessaire. » 
DWS constate aussi une demande croissante des investisseurs pour ce type d’obligations. « Les détenteurs de Bunds cherchent à liquider leurs positions. Cela va se traduire par un arbitrage vers les obligations d’entreprises investment grade » affirme Stefan Kreuzkamp. DWS estime que ces emprunts rapporteront 2,4 % l’année prochaine.

Pour le gérant allemand, « ni la BCE ni la Fed ne devrait abaisser ses taux l’année prochaine. Dans la zone euro, l’on réalise désormais qu’une nouvelle baisse serait contre-productive, car les banques centrales jouent toujours un rôle important en tant qu’apporteurs de liquidités », explique Stefan Kreuzkamp. Ces prévisions pourraient être bouleversées si la croissance est plus marquée que prévu. « Dans ce cas, les banques centrales pourraient même relever les taux. »

Relance budgétaire

Si Christine Lagarde, la nouvelle présidente de la BCE, affirme que les gouvernements doivent prendre le relais des banques centrales pour relancer l’économie, les gérants restent sceptiques. Pimco, Invesco et DWS ne voient pas Angela Merkel et ses pairs mettre la main à la poche pour stimuler la croissance. « Le gouvernement allemand a déjà diminué les impôts et augmenté les allocations familiales. En outre, des lois brident les dépenses publiques. » Et le consommateur allemand ne semble pas décidé à dépenser plus. « Les revenus supplémentaires sont épargnés, malgré les taux négatifs : les Allemands sont prudents par nature. »

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