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La chose qui l’empêche le plus de dormir, soupire Elaine Stokes, gestionnaire de portefeuille chez Loomis Sayles, filiale de Natixis, lors d’une réunion avec les médias à Paris, c’est le manque de liquidité des obligations à court terme. Mais elle n’est pas la seule à le dire : le travail des investisseurs obligataires a longtemps été ennuyeux, mais il est redevenu amusant. 

Cette spécialiste de la gestion obligataire basée à Boston est en visite chez Natixis Investment Management, un gestionnaire d’actifs basé en France qui compte 20 filiales. En conversation avec le Credit-CIO Philippe Berthelot d’Ostrum AM et le Deputy CIO François Collet de DNCA, Stokes partage ses inquiétudes. C’est un vrai problème !

La cause du manque actuel de liquidités est double, a-t-elle déclaré plus tard lorsqu’on lui a posé la question. D’une part, il y a l’énorme incertitude qui règne sur le marché, en raison de tous les événements récents. Cela a créé des écarts considérables. D’autre part, il y a un manque de nouvelles émissions, principalement d’obligations à haut rendement. Et comme les gens se contentent de recevoir leurs coupons dans l’intervalle, tout le monde saute sur l’occasion dès qu’il y a une nouvelle émission. En somme, il se passe beaucoup de choses en même temps», conclut-elle. 

Cependant, Mme Stokes affirme qu’il n’y a pas de situation persistante. Le trader qui l’a récemment alertée sur le fait que la situation était «aussi mauvaise qu’en 2020» commence aujourd’hui, avec beaucoup de prudence, à voir une certaine amélioration dans les bons du Trésor, affirme Mme Stokes. Ce qu’il faut, c’est moins d’incertitude. Et cela commence à se produire».

Risque moral

Ce n’est pas la seule chose dont elle se méfie. L’idée que les documents officiels et l’État de droit soient remis en question l’est tout autant. En Amérique, les banques s’effondrent, l‹ «aléa moral» rôde, et puis il y a les AT1. À long terme, la question est de savoir dans quelle mesure les gouvernements interviendront dans les décisions des marchés financiers».

Berthelot, d’Ostrum AM, affirme que le risque est en fait idiosyncratique, avec les petites banques américaines d’un côté et la réglementation du secteur bancaire européen de l’autre. Heureusement, le vent semble avoir tourné. La crise a été parfaitement gérée. Il n’y a pas de moment Lehman, il n’y a pas de chaos. Oui, il y a de la nervosité, il y a des points d’interrogation sur la documentation de l’AT1. Mais même si le marché est difficile, il fonctionne. Et cela rend la vie des investisseurs obligataires beaucoup plus attrayante que ces années de taux d’intérêt très bas. Ce travail a toujours été ennuyeux, mais c’est maintenant qu’il faut le refaire».

M. Stokes parle également d’une période intéressante pour les investisseurs obligataires. Les obligations ont été réévaluées et sont plus attrayantes que tous les autres placements possibles. Je n’ai jamais aimé travailler les week-ends, mais maintenant je m’amuse.

Investir dans les cocos

Tous les investisseurs ne sont pas de cet avis. M. Collet, de DNCA, craint que «2023 ne soit pas l’année des obligations». Nous sommes en train de changer de régime d’inflation. Cela a des conséquences importantes pour les obligations, car elles ne pourront offrir qu’une faible protection. Elles resteront volatiles et je pense également que la corrélation avec d’autres classes d’actifs augmentera à nouveau. Le jour précédent, M. Collet avait suggéré à un investisseur américain que les fonds du marché monétaire étaient préférables aux bons du Trésor. Les bons du Trésor à long terme rapportent 3,5 %, les fonds du marché monétaire 5 %. Dans l’ensemble, nous sommes négatifs sur les durées».

Le plus grand risque, selon l’investisseur de DNCA, est un échec de la politique monétaire entraînant une récession majeure. Maintenant que les banques centrales sont conscientes du problème du secteur bancaire, elles peuvent certainement mettre l’économie à l’arrêt». 

Berthelot, d’Ostrum AM, voit des opportunités dans le domaine des obligations, notamment dans les ABS et les obligations indexées sur l’inflation. Aux investisseurs dans les cocos, il conseille d’être constructif et sélectif. Le secteur bancaire européen est solide et fiable. Un investisseur rationnel demandera toutefois une prime plus élevée pour les AT1 suisses que pour les autres banques». 

Stokes : «Le prix des Cocos n’était pas bon parce que les gens cherchaient tellement à obtenir des rendements. Aujourd’hui, les gens comprennent les risques de l’AT1 et son prix est à nouveau bon. Cela en fait une classe d’actifs plus facile à investir». Revenant sur le manque de liquidité, elle précise que la volatilité peut aussi parfois être source d’opportunités. C’est lorsqu’il y a des bonnes affaires qu’il faut construire son portefeuille à long terme.

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