
L’évolution des préférences des consommateurs résultant de mégatendances telles que la santé, l’urbanisation et la durabilité a une influence sur les entreprises investissables dans l’industrie alimentaire.
Nous sommes de plus en plus exigeants quant à l’aspect santé de ce que nous mangeons, nous voulons des informations claires sur la valeur nutritionnelle des produits alimentaires, nous optons de plus en plus pour le bio et nous attendons des emballages durables pour les snacks.
Michael Landymore gère le fonds Parvest Smart Food d’Impax AM, qui pesait 622 millions d’euros fin septembre. Il décrit ce qui se passe au niveau des consommateurs dans l’industrie alimentaire. En effet, comme l’explique le gérant de la société de fonds affiliée à BNP Paribas AM, l’alimentation constitue un élément important de l’investissement dans ce secteur, bien que la partie ‘comestible’ soit loin d’être la seule.
Santé et changements démographiques
Selon Marie-Laure Schaufelberger de Pictet Asset Management, les développements sont le résultat de deux mégatendances qui influencent le secteur : la santé et les changements démographiques.
« Les pouvoirs publics sont de plus en plus conscients du fait qu’une alimentation saine peut contribuer à la prévention de maladies, tandis que les consommateurs sont prêts à payer plus cher pour cela », explique-t-elle. « Et en raison de l’urbanisation, on constate que de plus en plus de gens mangent à l’extérieur, et désirent le faire le sainement possible. »
Ces tendances ont une influence sur les entreprises investissables dans l’industrie alimentaire, ce qui exige des producteurs qu’ils adaptent les processus opérationnels et renouvellent leur offre. Ce qui n’est pas aussi facile que ça en a l’air. Landymore : « Les consommateurs veulent être en meilleure santé, mais attendent aussi que le goût et la ‘sensation en bouche’ soient préservés. »
Schaufelberger : « Si un boulanger se met du jour au lendemain à vendre du pain avec moins de sel, le consommateur n’hésitera pas à aller chez un autre boulanger parce que le goût ne lui plaît pas. »
Surtout des entreprises européennes
Ce sont surtout des entreprises européennes qui font de la recherche dans ce domaine et accompagnent la transition vers une alimentation plus saine, note Schaufelberger. Comme le français Danone et le suisse Nestlé.
Landymore, qui applique dans son portefeuille une surpondération structurelle sur l’Europe, explique : « Le portefeuille de produits des grandes entreprises alimentaires américaines telles que McDonald’s, Coca-Cola et Kraft Heinz ne correspond pas vraiment à notre définition de la pensée durable. En Europe, les entreprises semblent plus avancées. En outre, le régime alimentaire européen est plus frais, plus léger et souvent plus bio que celui des Américains. »
Outre l’évolution des préférences des consommateurs, l’appel mondial à la durabilité a également un impact majeur sur l’industrie alimentaire. L’ensemble de la chaîne de production doit devenir plus durable – ‘de la ferme à l’assiette’, selon Schaufelberger - et la montagne de déchets causée par l’industrie doit être réduite.
L’accent est mis sur des technologies pouvant contribuer à la durabilité, comme des méthodes limitant l’utilisation de pesticides nocifs par les agriculteurs.
Producteurs d’emballages
Mais les producteurs d’emballages pourraient encore faire l’objet d’une plus grande attention, analyse Landymore, qui considère les déchets comme ‘le thème le plus important à une époque où le changement climatique et la croissance démographique bouleversent l’industrie de l’approvisionnement’.
À cet égard, deux questions sont centrales, explique-t-il : savoir si nous devons opter pour des emballages en plastique ou en fibre, et si nous devons considérer l’emballage comme une solution plutôt que comme un problème. « Le développement d’emballages efficaces est une opportunité dans l’industrie, et nous prêtons attention aux entreprises qui embrayent sur celle-ci. »
Pictet AM est sur la même longueur d’onde et a sauté sur l’introduction en bourse du fabricant suisse d’emballages SIG Combibloc. « Il y a de fortes probabilités que votre eau de coco ou votre soupe vegan soit contenue dans un emballage de ce fabricant, qui détient une part de marché de 21 pour cent », explique Schaufelberger.
Landymore est moins spécifique dans son choix d’entreprises, mais explique sa méthode : il se concentre à cet égard sur les performances antérieures des entreprises de l’industrie de l’emballage, les solutions qu’elles proposent au problème, et la composition des matériaux qu’elles choisissent. Ce qui suit est une évaluation de due diligence. En effet, nous ne sommes pas un fonds feel good, nous voulons encore du rendement. »
Le gestionnaire de fonds d’Impax AM fait de même pour des entreprises d’autres sous-secteurs alimentaires qui consacrent au moins 20 % de leurs activités à l’industrie alimentaire, le font de manière durable et peuvent garantir une liquidité par le biais d’une valeur marchande décente. Les entreprises dont le mix produit leur permet de se développer plus rapidement que le secteur sont ensuite présélectionnées.
Dans son fonds Pictet Nutrition (325 millions d’euros d’actifs sous gestion à la fin septembre), Pictet AM répartit ses investissements sur différents supports : producteurs de technologie agricole, acteurs logistiques, produits et ingrédients alimentaires et entreprises lifestyle telles que Weight Watchers.
Il en résulte un portefeuille fortement exposé aux biens de consommation de base, ce qui lui confère un caractère quelque peu cyclique. Ce qui frappe actuellement Schaufelberger, c’est que les actions de producteurs d’aliments sains spécifiques sont à la traîne. « Les consommateurs sont prêts à payer de plus en plus cher pour de bons aliments, mais cela ne se reflète pas encore dans le cours des actions. »
Opportunités de rendement
Ce qui peut changer. Les développements dans l’industrie alimentaire sont rapides et les effets importants, notent les deux experts. Landymore : « Nous avons de gros problèmes de dégradation des sols, nous mangeons probablement trop de viande et nous produisons beaucoup de déchets. Nous cherchons des entreprises qui offrent une solution aux problèmes auxquels est confrontée l’industrie. Il y a là des possibilités de rendement. »