
Pascal Paepen est économiste et cofondateur de Spaarvarkens.be. Qu’allait-il fêter dans un restaurant Quick ? Pourquoi se sentait-il parfois comme un Martien dans la City ? Et pourquoi doit-il des excuses à ses amis ?
La casquette de fondateur de Spaarvarkens.be n’est pas la seule qu’arbore Pascal Paepel. Pendant des années, il a été une voix familière pour ceux qui suivent la Bourse de près, avec une chronique boursière quotidienne sur Radio 1. Aujourd’hui, l’économiste est expert en investissements pour le journal Het Laatste Nieuws et rédige une chronique pour Het Belang van Limburg. Il est également chargé de cours à la KU Leuven et à l’institut Thomas More. « J’ai toujours rêvé d’enseigner. Au début, je voulais être facteur, mais en quatrième année, j’ai eu un professeur formidable et depuis ce moment-là, j’ai voulu être professeur moi aussi. »
C’est pourquoi il poursuit des études de philologie germanique, mais pour une courte période seulement. Dès 1988, il se fascine en effet pour la Bourse. C’est l’année où éclate la bataille pour le rachat de la Generale Maatschappij, un événement qui l’amène à investir et éveille sa passion pour les marchés financiers.
« C’était assez drôle : alors que la plupart des étudiants se couchaient tard, je me levais à six heures du matin. Pourquoi ? Le facteur livrait le journal Financieel-Economische Tijd, via un abonnement étudiant. Je lisais ce journal de bout en bout. Je n’avais jamais suivi un seul cours d’économie, mais cela me fascinait. » Entre-temps, les lectures obligatoires en allemand ne progressent pas. « Bien sûr, si vous ne lisez pas ces livres, vous n’y arrivez pas. Finalement, j’ai choisi d’étudier l’économie et la finance. J’apprenais la finance et je savais que je voulais travailler dans une banque. »
Greed is good
Après ses études, M. Paepen travaille la Kredietbank, aujourd’hui KBC. Il commence tout de suite dans la salle des marchés. « Je trouvais ça fantastique. C’était un rêve, car j’avais été marqué par le film Wall Street, avec Michael Douglas. »
Après avoir signé son contrat avec la Kredietbank, il se rend au Quick, place de la Monnaie à Bruxelles. « J’allais rarement au restaurant. Mais je connaissais le Quick. Pour moi, c’était le summum. Je me suis dit : je dois fêter ça. »
La City
Après sept ans passés dans la salle des marchés de KBC, M. Paepen est prêt à relever un nouveau défi. Il déménage à Londres. « J’en avais un peu marre de Bruxelles. La mentalité était un peu trop nine to five pour moi. Cela commençait à m’agacer. De plus, en tant que négociant en obligations convertibles, j’étais régulièrement en contact avec des personnes à Londres. Ça me plaisait. »
La vie dans la City est complètement différente de la vie à Bruxelles. « Là, c’était tout sauf nine to five. Nous commencions à six heures du matin et à sept heures du soir, j’étais encore au bureau. On pourrait dire : qu’y a-t-il d’amusant à cela ? Car, vous travaillez plus dur. Mais c’est un environnement beaucoup plus professionnel. Je ne recevais plus des ordres de plusieurs dizaines de milliers d’euros, mais d’un million d’euros ou plus. Bien sûr, je gagnais plus aussi. Mon salaire a doublé. J’avais du mal à y croire. Je ne l’ai pas fait pour cette raison, car honnêtement, je ne le savais même pas à l’avance. »
Il loue un petit appartement dans l’East End, où les loyers sont moins élevés et lui permettent de continuer à économiser. L’idée était de rester à Londres pendant deux ans, mais il y reste finalement 12 ans. Le cliché est bien vrai. « Gordon Gekko était une icône dans les années 1980. Je suis arrivé en 2000, et cette ambiance était toujours là. C’était un monde de jeunes hommes blancs. Et si vous en réunissez trop dans un même espace, vous obtenez un comportement machiste. Aujourd’hui, c’est différent. La réglementation du secteur financier est devenue beaucoup plus stricte. Vous devez respecter de plus en plus de règles. Ce n’est pas plus mal, car c’était parfois extrême à l’époque. »
Il essaye alors de s’éloigner le plus possible de cette culture. « J’y participais le moins possible, mais je ne pouvais pas y échapper complètement. J’ai souvent eu l’impression d’être une exception, mais heureusement je n’étais pas le seul. Des personnes de tous les pays imaginables se retrouvaient. Et ceux qui dépassaient les bornes étaient souvent des gens de l’East End. À l’époque, il n’était pas exceptionnel d’emmener des clients dans une maison close. On considérait ça normal. »
Retour à Mol
Après 12 ans, il quitte la métropole londonienne pour revenir à sa ville natale de Mol. « Je ne me suis jamais vraiment senti chez moi à Londres. Pas même dans le monde des traders. Je sortais toujours du lot. J’étais un peu comme un Martien. J’ai fini par revenir à mes racines. »
Au départ, il souhaite prendre une année sabbatique. Mais il revient vite à ses premières amours : l’enseignement, auquel il est toujours fidèle aujourd’hui. « Je n’ai jamais vécu cela comme un pas en arrière, bien au contraire. Enfant, j’avais un immense respect pour les enseignants. Plus encore que pour les camarades de classe ou les autres étudiants. Alors non, je n’ai pas eu l’impression de faire « moins » en devenant enseignant. Bien sûr, d’un point de vue financier, c’est un pas en arrière, mais je le savais. J’avais déjà travaillé en Belgique, je savais donc à quoi m’attendre. Je ne savais même pas exactement ce que gagnait un enseignant. Je pensais juste : comme tout le monde. Mais cela ne me préoccupait pas du tout. »
À son retour, quelque chose l’inquiète toutefois. « J’avais peur que les gens pensent que j’avais fait quelque chose de mal. J’étais inquiet à ce sujet. Pour qu’il n’y ait pas d’ambiguïté : on ne m’a pas obligé de partir. Ce qui s’est passé est le résultat de la crise financière. Notre service – qui était alors une filiale de KBC – a été vendu à Daiwa. C’était le moment de changer de direction. »
Les tirelires
M. Paepen travaille aujourd’hui en tant que conférencier et chroniqueur. Il y a cinq ans, il a également fondé Spaarvarkens.be (ndt : tirelire en néerlandais). « Au début, l’idée était d’écrire une chronique hebdomadaire. Je me suis dit : cela me prend une à deux heures par semaine. Mais maintenant, c’est ce que je fais en me levant et avant d’aller me coucher. Il y a tellement d’éléments à prendre en compte. »
Le projet s’est développé rapidement. « Nous sommes déjà cinq employés fixes et six collaborateurs indépendants. Si vous êtes un entrepreneur et que vous voulez bien faire les choses, vous y travaillez presque jour et nuit. J’avais sous-estimé cet aspect. » Cette expérience n’a fait que renforcer son respect pour les entrepreneurs. « Surtout pour les petits indépendants, les PME, ou les directeurs d’agences bancaires indépendantes. Dans le monde financier, la réglementation est de plus en plus stricte. Vous devez tout prendre sur vous. »
Obsession
La vie du fondateur de Spaarvarkens.be tourne entièrement autour de la Bourse. « En dehors des marchés financiers, il n’y a pas grand-chose dans ma vie. J’ai des amis, mais je ne les vois que lorsqu’ils m’appellent ou me rendent visite. Je ne vais pas vers eux. Peut-être que je suis antisocial à cet égard. La Bourse me fascine énormément. C’est une véritable obsession. Je suis en fait accroc au travail. Ce n’est peut-être pas une bonne chose, mais cela me convient parfaitement. En matière de sport, de musique ou de culture, je ne sais rien ou presque. Pour moi, tout tourne autour des marchés financiers. C’est peut-être dommage, mais cela ne me dérange pas. C’est ce dont j’ai besoin. J’aime découvrir de nouvelles choses tous les jours. Des choses que vous n’avez jamais vues auparavant, ou des variations sur des thèmes que vous connaissez déjà. Cela continue à me fasciner énormément. »
Écoutez l’intégralité du podcast Le Miroir avec Pascal Paepen et découvrez :
- pourquoi il y a des tirelires partout dans son salon
- de quoi il a discuté avec un directeur de banque il y a 6 ans
- pourquoi le sitostick est plus qu’un simple snack en Belgique
- comment on devient bon trader
- pourquoi l’éducation financière est si essentielle – et pourquoi les enfants des indépendants peuvent s’adresser à lui
- ce qu’il changerait en matière d’éducation
- ce qu’il pense faire du bâtiment en briques dans son jardin
- quel héritage il veut laisser
- et pourquoi il pense que les finfluencers doivent de toute urgence être contrôlés plus strictement
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