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Parallèlement aux souffrances humaines, la propagation du coronavirus engendre une période d’extrême incertitude sur les marchés financiers.

Il semblerait aujourd’hui qu’une vague ravageuse déferle sur la planète. Là où elle a pris naissance, en Chine, la menace semble lentement mais sûrement s’estomper. Les mesures draconiennes prises par le gouvernement pour endiguer l’épidémie commencent clairement à porter leurs fruits. Mais les médias, et, dans leur sillage, la planète tout entière, ont désormais détourné leur attention de ce reflux pour suivre la vague là où elle est en passe d’atteindre son paroxysme, à savoir l’Europe et les États-Unis. Les mauvaises nouvelles fusent de toutes parts : fermetures d’écoles, augmentation du nombre de contagions, perspectives négatives pour les entreprises, fermeture de l’espace aérien,… Tous ces éléments contribuent à mettre sous pression les marchés financiers, qui ne détestent rien autant que l’incertitude.

À ce cocktail délétère vient s’ajouter la chute du pétrole. La dégringolade de l’or noir a fait déferler une onde de choc sur le système. Le marché craint, de manière légitime, qu’un certain nombre de producteurs de pétrole de schiste fassent faillite – car les banques et autres opérateurs détiennent leurs crédits et obligations. Ce dévissage fait souffler un vent de panique sur le marché du crédit, qui gagne ensuite celui des actions. 

Nous sommes ici en présence de deux problèmes bien distincts. En ce qui concerne le coronavirus, il faut espérer que le reste du monde connaîtra la même évolution que la Chine. En Europe, les mesures visant à enrayer la propagation deviennent de plus en plus radicales. Si à court terme, elles auront incontestablement un effet négatif sur l’économie, elles nous permettront de maîtriser plus rapidement le virus. Il semble clair que les premier et deuxième trimestres de cette année seront particulièrement difficiles pour l’économie et les entreprises du monde entier. Mais nous espérons une amélioration au deuxième semestre.

Pour ce qui est du prix du pétrole, la Russie et l’OPEP pourraient parvenir à un accord. Si ce n’est pas le cas, le redressement sera plus long, et quelques producteurs de pétrole de schiste disparaîtront. Mais d’une manière ou d’une autre, ce problème aussi sera résolu. 

Ainsi, si nous sommes aujourd’hui vraiment au creux de la vague, des opportunités d’achat se présenteront tôt ou tard. La question qui se posera alors sera : « qu’acheter ? » L’élaboration d’un portefeuille solide de titres à dividende, très attrayants du fait des récentes dévaluations, semble s’imposer comme une première étape évidente. Le calcul est vite fait. Si un portefeuille offre un rendement net moyen de 4 % sur une période de dix ans, cela signifie que si les actions ont baissé de 40 % d’ici dix ans, l’investisseur est tout de même gagnant par rapport à un livret d’épargne – et ceux qui tablent sur un tel scénario ont une vision bien noire du monde, non seulement pour les trimestres à venir, mais aussi pour de nombreuses années. 

Il faut ensuite déterminer si l’on privilégie les actions de valeur, dont la valorisation, par rapport aux actions de croissance, est extrêmement bon marché dans une perspective historique, ou si l’on mise au contraire sur les entreprises de demain. Il y a quelque temps, j’ai eu la chance de pouvoir écouter Yuval Harari au Sportpaleis d’Anvers, après avoir dévoré ses livres Sapiens et Homo Deus. Même dans l’hypothèse très prudente où seuls 10 % des avancées technologiques se concrétisent, l’on ne peut se permettre de faire l’impasse sur le secteur. Peter Hinssen, pour sa part, défend clairement la thèse des titres « valeur ». Dans son nouvel ouvrage, The Phoenix and the Unicorn, il met l’accent sur les entreprises établies capables de se réinventer, et qui sont donc susceptibles de voir leur valorisation augmenter. Il est aujourd’hui aussi difficile de trancher entre les deux thèses que d’affirmer lequel de ces livres est le meilleur. Avec la récente correction de marché, les valorisations des deux segments, pour un investisseur ayant une approche à long terme, se justifient. Un mix équilibré des deux styles complètera un portefeuille de titres à dividendes. Et peut-être pourrait-on alors libeller notre approche The Phoenix, the unicorn and the cash machine… 

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