Philippe Gijsels, BNP Paribas Fortis
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Les taux d’intérêt américains à 10 et 30 ans se rapprochent du sommet de leur canal de tendance. Ces taux d’intérêt sont d’une importance capitale pour l’évolution future des actifs à longue durée. 2 pour cent sur le segment des 10 ans semble être un point de rupture. Une stratégie de type barbell entre valeur et croissance peut offrir une solution.

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Il s’agit d’un phénomène bien connu : les actifs de longue durée, dont les flux de trésorerie se situent dans un avenir lointain, ont été actualisés à des taux d’intérêt extrêmement bas au cours des dernières années. Ces valeurs de croissance, généralement technologiques, ont donc profité de manière excessive. Mais maintenant, les taux d’intérêt à long terme augmentent et cela exerce une pression sur ces actions, comme nous l’avons vu hier aux États-Unis lors de la séance de négociation du Nasdaq, la pire en six mois. 

Philippe Gijsels (photo), stratégiste en chef de BNP Paribas Fortis, trouve logique que les taux d’intérêt commencent à augmenter. Après la crise du corona, nous avons d’abord assisté à une hausse des taux d’intérêt. Parfaitement explicable, mais moins logique fut le déclin qui suivit. Vous constatez que les taux d’intérêt commencent à augmenter avec un certain retard.

Ce qui se passe souvent après Jackson Hole, c’est que les faucons sont envoyés pour faire passer un message de réduction progressive de la consommation. Ce sont des colombes déguisées plutôt que de vrais faucons. Powell déclare alors que le tapering ne sera pas un gros problème et les taux d’intérêt se détendent à nouveau. Mais cette histoire ne semble plus avoir la cote».

M. Gijsels affirme que les taux d’intérêt absurdement bas ne sont plus en phase avec la croissance et l’inflation. C’est une réaction très normale, cette hausse des taux d’intérêt. Nous sommes encore très loin de ce que nous devrions être. Cela dépend aussi du seuil de douleur de la Fed. Peut-elle vivre avec 2 % ou même un peu plus sur le segment des 10 ans ? Regardez ce qui s’est passé en 2018 entre Noël et le Nouvel An. Les marchés ont ensuite corrigé très fortement. Puis la Fed a ajusté son discours et 2019 a fini par être une belle année boursière. Il n’est pas inconcevable que nous nous retrouvions dans une telle situation».

BCE

En Europe, l’histoire est tout autre. Après tout, Mme Lagarde a déclaré que la première hausse des taux d’intérêt n’était pas prévue avant 2025. Le programme d’urgence PEPP expire à la mi-2022, mais il pourrait être remplacé par un autre programme rachetant du papier au rythme de 20 milliards d’euros par mois. 

Marchés

Selon M. Gijsels, la réaction du marché sera importante pour la position que prendra la Fed. Si les marchés corrigent encore de 15 pour cent, alors vous verrez ce qui se passera. Puis vous vous retrouvez avec une autre rhétorique et ce sera le QE pour toujours. Cela pose un énorme problème philosophique. L’inflation constitue une difficulté supplémentaire.

Jusqu’à présent, M. Powell a toujours affirmé que l’inflation était un phénomène passager, mais hier, son discours a commencé à se fissurer et il a cité certains éléments structurels tels que la forte hausse des prix de l’énergie. Cela soulève le scénario catastrophe de la stagflation, qui n’est en tout cas pas notre scénario de base.

Pendant des années, l’assouplissement quantitatif n’a pas entraîné d’inflation, mais le vent semble tourner maintenant. Gijsels l’exprime comme suit : Vous êtes coincé sur deux côtés en tant que Fed. Vous devez jouer la croissance et l’inflation, deux variables, avec un élément fixe, à savoir les taux d’intérêt. C’est extrêmement difficile.

Haltères

Selon M. Gijsels, les investisseurs peuvent donc mettre en place une stratégie de type barbell entre croissance et valeur. Le choix entre les deux est extrêmement difficile, et à la BNP nous le résolvons de cette manière. Vous voulez vraiment être dans la technologie pour le long terme. Jamais dans l’histoire de l’humanité nous n’avons eu des perspectives de croissance aussi exponentielles. Mais ces actifs de longue durée risquent de connaître des difficultés dans la période à venir. C’est pourquoi il est préférable de parier sur des actifs sensibles à l’inflation et aux taux d’intérêt. Les valeurs technologiques ont enregistré des gains considérables et si les taux d’intérêt continuent de grimper vers 2 %, il pourrait y avoir de nouvelles prises de bénéfices. Il faut en tenir compte.

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