Natixis IM CEO Philippe Setbon speaking to journalists in Paris on Thursday. Photo by Natixis.
Natixis IM CEO Philippe Setbon speaking to journalists in Paris on Thursday. Photo by Natixis.

« La gestion active est de retour » : tel était le message délivré par Philippe Setbon, CEO de Natixis Investment Managers, lors du Thought Leadership Summit organisé par l’entreprise jeudi dernier à Paris.

En tant que filiale de gestion d’actifs du groupe bancaire français BPCE, Natixis IM occupe une place centrale dans le paysage européen de l’investissement. En janvier, BPCE et Generali, basé à Milan, ont annoncé leur intention de regrouper leurs activités de gestion d’actifs. Leur ambition : devenir le leader européen du secteur en termes de revenus et se hisser au neuvième rang mondial, avec 1900 milliards d’euros d’actifs sous gestion.

Dans ce contexte, Natixis IM a réalisé en 2024 une collecte nette record de 40 milliards d’euros, une performance que Philippe Setbon attribue à la normalisation des taux d’intérêt.

Philippe Setbon« Notre modèle économique est conçu pour ce type de conditions de marché, et 2024 l’a confirmé », déclare-t-il. L’entreprise a enregistré une croissance dans l’ensemble de ses segments de clientèle : institutionnels, assurances, banque privée et banque de détail. Elle a également poursuivi l’expansion de sa plateforme française de retraite et d’épargne, Natixis Interépargne.

Effet barbell

Philippe Setbon ne mâche pas ses mots lorsqu’il critique le secteur. « Pendant vingt à trente ans, l’investissement passif a donné le ton. Trop de gestionnaires soi-disant actifs ont facturé des frais de gestion active tout en délivrant, en réalité, des performances passives. Nous refusons de jouer ce jeu-là. »

Il souligne que Natixis IM investit exclusivement sur la base de convictions fortes, aussi bien sur les marchés cotés que privés. « Notre ADN repose sur des stratégies basées sur des convictions. Nous n’investissons que dans des entreprises dans lesquelles nous croyons vraiment. »

Selon lui, on constate un « effet barbell » : d’un côté, l’investissement passif continue de dominer, tandis que de l’autre, la gestion véritablement active connaît un essor remarquable. L’entre-deux – les fonds qui facturent des frais de gestion active tout en suivant des stratégies passives – est en train de disparaître rapidement. Natixis IM affirme clairement son positionnement du côté des investissements basés sur des convictions fortes. « Ce ne sont pas nos clients qui s’adaptent à cette évolution, c’est nous qui nous adaptons à eux. »

Marchés privés et tokenisation

Les actifs privés occupent une place croissante dans les portefeuilles des clients, une tendance qui, selon Philippe Setbon, s’accélère. « 85 % de l’économie mondiale repose sur les marchés privés », souligne-t-il. Les investisseurs privés s’y aventurent également, une évolution que Natixis IM soutient via un fonds evergreen géré par sa filiale Flexstone. « L’éducation joue un rôle clé dans cette transition », ajoute-t-il.

La technologie, et en particulier la tokenisation, jouera un rôle déterminant dans l’accessibilité des marchés privés. « La tokenisation via la blockchain peut abaisser le seuil d’entrée pour les investisseurs et rendre les marchés privés plus accessibles et plus liquides. La technologie aidera les investisseurs à y accéder plus efficacement. Cette évolution est essentielle pour l’avenir de la gestion d’actifs. »

« Notre secteur est l’un des rares où les coûts augmentent sans que nous puissions les répercuter. »

Cependant, cette évolution s’accompagne également de défis. « Les actifs privés requièrent des volumes de capital de plus en plus importants. Ils sont certes moins strictement réglementés que les banques ou les assureurs, mais ils nécessiteront à terme beaucoup plus de capitaux. »

Consolidation inévitable

Le secteur est confronté à une augmentation des coûts, à un durcissement de la réglementation ainsi qu’à une demande croissante de services locaux, autant de facteurs qui accélèrent la consolidation en cours. « Notre secteur est l’un des rares où les coûts augmentent sans que nous puissions les répercuter sur les clients, déclare Philippe Setbon. C’est pourquoi la consolidation est inévitable - et elle va se poursuivre. »

Les clients institutionnels poursuivent eux aussi leur consolidation, aussi bien verticalement, au sein de leurs segments, qu’au-delà des frontières traditionnelles des services financiers. « Pendant des décennies, la banque, l’assurance et la gestion d’actifs constituaient des univers distincts. Depuis la crise financière, ces frontières se sont estompées. Le besoin de capitaux conduit à une convergence qui va remodeler en profondeur le paysage financier dans les décennies à venir. »

Dans le même temps, les clients adoptent une approche de plus en plus régionale, ce qui rend l’environnement encore plus complexe. « Combiner une envergure mondiale et une présence locale forte est coûteux, mais indispensable. »

Fin du libre-échange

Philippe Setbon considère la démondialisation comme une tendance fondamentale. « Depuis quinze ans, le libre-échange est en déclin. Les récentes mesures prises par les États-Unis, la Russie et la Chine n’en sont que les derniers exemples en date. » Cette évolution impose une réorientation. « Pendant des années, le libre-échange a constitué un moteur important de la croissance mondiale. Désormais, nous devons nous adapter à un monde marqué par une inflation plus importante, des taux d’intérêt plus élevés et des risques accrus. »

Il discerne cependant des aspects positifs. « Trop longtemps, les taux d’intérêt nuls ont brouillé la distinction entre bons et mauvais projets d’investissement. La normalisation des taux d’intérêt est une bonne nouvelle, car elle rétablit la discipline dans l’allocation des capitaux. »

Natixis cible les Pays-Bas

Outre sa stratégie de croissance européenne, Natixis cible spécifiquement le marché néerlandais. Fabrice Chemouny, responsable de la distribution internationale chez Natixis Investment Managers, dirige cette initiative stratégique visant à s’ancrer sur le marché néerlandais de la gestion d’actifs. La fusion prévue avec Generali Investments et l’ouverture d’un nouveau bureau à Amsterdam constituent à cet égard des leviers essentiels.

Fabrice ChemounyFabrice Chemouny adopte une approche prudente et réfléchie. Fort de 25 ans d’expérience dans le secteur, il sait que pénétrer un marché n’est pas une question d’échelle, mais de pertinence stratégique. « Notre objectif n’est pas de devenir le plus grand », souligne-t-il lors d’un entretien avec Investment Officer. « Nous le faisons avant tout pour répondre aux besoins de nos clients. »

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