Luca Paolini, Pictet AM
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Les actions américaines sont bien plus volatiles, mais n’offriront pas de rendement par solde au cours des années à venir. D’un point de vue stratégique, il est temps de se défaire des positions en actions. 

Selon Luca Paolini (photo), stratège en chef chez Pictet Asset Management, les actions américaines ne rapporteront rien en termes réels au cours des cinq prochaines années. Il base ses prévisions sur le récent renversement de la courbe de rendement américaine, ce qui représente, historiquement parlant, un signe précurseur fiable de récessions et de malaise boursier. 

Le gestionnaire patrimonial est en ce sens encore plus pessimiste que le secular outlook publié précédemment. Alors que les actions américaines ont rapporté 10 % par an au cours des cinq dernières années, pour les années à venir Pictet AM table sur 2 % en valeur nominale, dont il ne restera rien après correction pour l’inflation.  
Luca Paolini constate qu’un renversement de la courbe de rendement, ramenant le rendement des obligations souveraines à longue échéance sous celui des titres de dettes courts, est fortement corrélé à l’output gap : la différence entre le rythme de croissance actuel d’une économie et le potentiel de rendement à long terme.

Pour les 12 prochains mois, Luca Paolini s’attend à une hausse sur le marché des actions, puisque depuis 1950, chaque marché haussier aux États-Unis a débuté par une reprise et s’est soldé par une récession.
 
Le stratège en chef prévoit un cours à 3000 de l’indice S&P 500 sur cinq ans, ce qui est comparable au cours actuel de l’indice. Cela exclut toutefois un marché des actions lisse : « On assistera plutôt probablement à une volatilité significative, autre conséquence typique d’une courbe de rendement inversée », précise-t-il. « L’indice VIX va grimper de 30. % au cours des deux prochaines années. »
 
Jeroen Blokland, gestionnaire de portefeuille multi-asset chez Robeco, estime lui aussi que le risque de récession a augmenté. « Il se pourrait que ce ne soit pas le cas cette fois-ci, mais l’histoire démontre que les cinq dernières récessions en date étaient précédées d’une yield curve inversée », ajoute-t-il dans son daily sketch du 19 août. 

Contrairement à Luca Paolini, Jeroen Blokland pense néanmoins que les investissements plus risqués devraient être maintenus : « Selon les données actuelles, toutes les classes d’actifs majeures ont obtenu un rendement moyen positif entre la date de l’inversion de la courbe de rendement et le début de la récession. Les rendements étaient certes plus modestes, mais il n’y a aucune raison de paniquer ; «proceed with caution”. »

Certains économistes mettent toutefois en doute la valeur prédictive de la yield curve inversée. Shamik Dhar, économiste en chef du gestionnaire de patrimoine BNY Mellon Investment Management, en fait partie.
 
Selon lui, la réaction des investisseurs au renversement de courbe était plus que probablement exagérée. Le 14 août, ils ont acheté des actions en masse, faisant dégringoler les cours des marchés d’actions internationaux. 

L’économiste en chef considère que l’état de la courbe de rendement inversée en tant qu’élément de prévision économique est surestimé. Les précédentes récessions avaient été provoquées par les banques centrales, selon lui. « Dans les années 1970, 1980 et 1990, les banques centrales ont augmenté le taux directeur en cas d’accélération de l’inflation. Cela incite à emprunter et dépenser de l’argent, ce qui crée les conditions d’une récession. »

Les spécialistes en investissements d’Invesco affirment également que les investisseurs ne doivent pas partir du principe selon lequel un inversement éphémère de la courbe de rendement induit une récession. 

Selon Kristina Hooper, Chief Global Market Strategist, Brian Levitt, Global Market Strategist, et Timothy Horsburgh, Investment Strategist chez Invesco, le renversement de la courbe de rendement est cette fois la conséquence de l’incertitude générée par le conflit commercial qui oppose les États-Unis et la Chine. 

Bien que le protectionnisme soit nocif pour une économie, il n’a pas toujours entraîné une récession par le passé. Kristina Hooper, Brian Levitt et Timothy Horsburgh affirment que les États-Unis sont la cause de leurs problèmes actuels. La Fed a fait ce qui était en son pouvoir et tous les regards sont à présent tournés vers le président Trump : « Nous pensons qu’il est encore temps d’éviter une récession. » 
 
Invesco espère que le gouvernement américain comprendra que le conflit avec la Chine n’est pas « gagné » et évitera les dégâts en acceptant un deal dans lequel la Chine fera quelques petites concessions. Parallèlement, la Fed poursuivra la baisse de taux. 

 

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