Andrew Jessop
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Les obligations américaines à haut rendement ont été absorbées dans la correction des marchés actions à la fin de l’année dernière. Mais dans l’intervalle, l’indice des ‘junk bonds’ est de nouveau largement au-dessus du niveau d’il y a quelques mois.

Jamais auparavant les obligations américaines à haut rendement ne s’étaient remises aussi rapidement d’une chute aussi brutale des cours. Selon Andrew Jessop, gestionnaire du Pimco High Yield Bond Fund, cela s’explique par le moment de la correction du marché et de la reprise, qui ont toutes deux eu lieu en grande partie au cours de la période durant laquelle on négocie le moins. 

« Durant les deux dernières semaines de l’année dernière et la première semaine de la nouvelle année, on ne négocie qu’en cas de stricte nécessité. Un manque de liquidités rend le marché plus sensible à la volatilité. »

Cette année, les obligations à haut rendement ont déjà réalisé un bénéfice de plus de 5%. Mais au-delà de la vitesse, la reprise du marché présente une autre particularité. On effet, on pourrait s’attendre à ce que les obligations les plus risquées, qui avaient le plus chuté à la fin de l’année dernière, soient de nouveau celles qui ont le plus augmenté, or c’est justement le contraire qui s’est produit. 

« Les cours des obligations à haut rendement présentant le risque le plus élevé dépassent 20 %, mais se sont à peine redressés. Les secteurs les plus défensifs, comme les services publics, les soins de santé et même les télécommunications, sont ceux qui ont connu la plus forte hausse, tandis que les obligations des sociétés cycliques sont restées à la traîne », explique Jessop. 

Investisseurs sur leurs gardes

« Cela s’explique par le fait que la correction du quatrième trimestre de l’année dernière a découragé les investisseurs. Ils sont maintenant moins enclins à prendre des risques parce qu’ils se rendent compte qu’il y a un risque accru de faillite parmi les entreprises les plus faibles si le marché demeure aussi volatile. Si des entreprises sur le marché actions font faillite, c’est un risque pour les obligations qu’elles ont en circulation. En effet, l’endettement de ces entreprises par rapport à leur valeur augmente. »

Mais, selon Jessop, environ 5% des entreprises à haut rendement entrent dans cette catégorie de risque. La plupart d’entre elles se situent dans des secteurs qui, comme l’exprime par euphémisme le Britannique, sont liés à des ‘changements structurels’ : les entreprises du secteur automobile, de la distribution et des télécommunications.  

Falling angels

Les risques les plus importants se situent plutôt de l’autre côté du marché. La part des obligations notées BBB, la note la plus basse de la catégorie investissement, n’a cessé d’augmenter depuis la crise financière. Ce marché a maintenant presque trois fois la taille du marché américain à haut rendement.

Jessop : « Si une grande société comme General Electric devait être dégradée en catégorie haut rendement, elle prendrait 1,2 % de l’indice en une fois, ce qui pourrait causer des problèmes pour les obligations qui sont déjà dans l’indice. Mais l’inverse se produit également : cette année, deux sociétés ont déjà été promues en catégorie investissement, ce qui a entraîné une baisse de l’indice. »

Jessop estime enfin que seulement 5 % environ du marché BBB court le risque d’être dégradé en catégorie haut rendement en cas de récession. « La majorité des sociétés BBB sont non cycliques, disposent de flux de trésorerie importants et sont en mesure de rembourser leurs dettes. En fait, le plus grand risque de perte de valeur se situe précisément dans le segment supérieur du marché investment-grade : un nombre croissant d’entreprises y traitent avec des actionnaires activistes qui veulent une politique financière plus agressive, par exemple en distribuant davantage d’argent aux actionnaires. En conséquence, le marché BBB pourrait encore croître cette année. » 

Les sociétés pétrolières et gazières sont également considérées comme un secteur à risque accru depuis les vagues d’insolvabilité de 2015 et 2016, et leurs écarts obligataires sont encore légèrement supérieurs à la moyenne du marché. 

« À environ 550 points de base, contre une moyenne de 425 points de base pour le marché. En moyenne, les sociétés pétrolières et gazières sont maintenant de meilleure qualité qu’en 2014, mais les obligations du secteur sont toujours volatiles et fluctuent en fonction des prix du pétrole. Au quatrième trimestre 2018, elles ont baissé de 10% et, cette année, elles sont à nouveau de 5% dans le vert. »  

Il n’est du reste pas vrai que ces sociétés pétrolières et gazières sont par définition volatiles, souligne Jessop. « La volatilité se situe principalement dans le secteur de l’exploration et de la production, soit un tiers du secteur. »

« Le haut rendement américain est plus attractif que l’Europe »

Le fait que la Fed ait annoncé le mois dernier qu’elle cesserait provisoirement de relever les taux d’intérêt est sans aucun doute aussi un facteur dans le rebond rapide des obligations à haut rendement cette année. Jessop : « Cela a certainement été bon pour le sentiment, mais il y a aussi une raison pour laquelle la Fed a changé de cap. Les perspectives économiques se sont quelque peu détériorées. » 

Toutefois, le marché américain à haut rendement est relativement peu affecté par l’affaiblissement de l’économie internationale et les tensions commerciales. « La plupart des sociétés de l’indice desservent uniquement le marché américain et sont actives dans le secteur des services. » 

Alors que la Fed vient de s’engager dans une voie plus ‘dovish’, en Europe, on vient justement de cesser de racheter des obligations. Bien que les obligations à haut rendement n’aient pas été incluses dans le programme de rachat de la BCE, de l’argent s’est infiltré via le marché investment-grade vers le segment supérieur du marché des titres à haut rendement. Cette tendance s’est arrêtée et, combinée à l’incertitude des perspectives de bénéfices pour les entreprises européennes et au fait que les rendements absolus sont encore très faibles, Jessop trouve l’Europe moins attrayante que les États-Unis. 

Au 31 décembre dernier, le Pimco Global High Yield Fund n’avait investi qu’environ 10% de ses actifs dans la zone euro, contre plus de 80% aux États-Unis.

 

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